Chronique « Pinocchio » : « Classique », vous avez dit « classique » ?
Scénario de David Chauvel (d’après Carlo Collodi), dessin et couleurs de Tim McBurnie,
Public conseillé : Tout public
Style : Aventure fantastique
Paru chez Delcourt, le 5 novembre 2014,
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L’histoire
Maître Antoine, un vieux menuisier que tout le monde appelait le père de la cerise, attrapa un bout de bois pour en faire un pied de table. Mais dès qu’il commença à le tailler, le bois se mit à parler et à se plaindre.
Ce soir-là, compère Gepetto passait par là. Il avait grande envie de fabriquer un pantin de bois. Après une échaffourré, les deux compères se rabibochèrent, et Gepetto embarqua la bûche magique. Celui-ci mit tant d’ardeurs, qu’il le nomma “Pinocchio”, du nom d’une famille riche de sa connaissance.
Mais le bonhomme de bois se sauva et dès qu’il le put, à grandes enjambées. Rattrapé par la police et enfermé à double tour, un criquet parlant l’avertit : “Malheurs aux enfants qui désobéissent à leurs parents. Tôt ou tard, ils s’en repentiront”…
Un Classique !
Qui ne connaît pas l’histoire de Pinocchio ? Personne ! Des générations d’enfants ont été “nourris” au classique des Studios Disney (1940, second long-métrage) et certains au texte original de Carlo Collodi.
J’ai donc abordé cette adaptation de “Pinocchio” avec les images (impressionnantes et poétiques) de mon enfance en tête. C’est dire si j’y suis venu avec des a priori.
Pour l’occasion, David Chauvel, vieux routard et touche-à-tout des éditions Delcourt (polars avec “Black Mary”, “Rails”, “Les Enragés” et “Nuit noire”; contes avec “Arthur”; BDs jeunesse avec “Popotka”, “Octave” et mêmes aux séries-concepts avec “7”, “Le Casse”, “La grande évasion”), s’attaque ici à une adaptation des plus périlleuses. Il a embarqué dans l’aventure Tim McBurnie, le jeune dessinateur australien repéré sur “7 pirates”.
Ce que j’en pense
La surprise est de taille. Le travail collégial de ces deux auteurs a la fraîcheur et la drôlerie d’un conte au premier degré.
Misant sur la modernité des thèmes (la paternité, les envies enfantines), Chauvel et McBurnie revisitent avec talent et éclat ce grand classique, avec un vrai respect de l’oeuvre originale (réduite aux dimensions d’une peau de chagrin entre les mains des studios Disney).
Moderne, dynamique, drôle, cette adaptation de “Pinocchio” n’a rien à envier à l’icône Disney. Certes, l’animation n’est pas là, mais les cadrages et la mise en scène modernes y suppléent largement.
Les dialogues, dépoussiérés eux-aussi, prennent un ton contemporain que les jeunes lecteurs apprécieront, mais qui ne choquera pas la “vielle école”.
Très proche de l’esprit du conte, cette version joue sur les contrastes. Tendre, poétique, mais aussi cruelle et moralisatrice, David Chauvel et Tim McBurnie nous offrent une nouvelle version qui vaut son pesant d’écus d’or.
Le dessin
Pour être honnête, le dessin de Tim McBurnie fut ma première raison de lire cet album. Et je ne fus pas déçu. Tout au long du récit, j’ai été envoûté par les riches couleurs (numériques) posés sur un trait léger et caricatural.
Jouant souvent sur des camaïeux (bleus froids, rouge brûlant, en vert pvégétal…) Tim McBurnie pose des ambiances qui inondent les pages… magique !
Son dessin est un enchantement qui mérite, à lui tout seul, de découvrir l’album.
Pour résumer
Ca vous dit de lire une adaptation d’un grand classique ? Alors autant plonger dans le “Pinocchio” de Chauvel et McBurnie.
Flamboyant, drôle et cruel à la fois, ce conte (pris au premier degré), est radicalement dépoussiéré et modernisé. Il pourrait même vous faire oublier l’icône des studios Disney…