Ambassadeur de France aux États-Unis à l’époque de l’affaire Dreyfus, l’académicien Jules Cambon confirme le bien-fondé d’une formule célèbre présentant la diplomatie comme « l’art de se taire en plusieurs langues. » Devoir de réserve oblige, Cambon refuse en effet de prendre parti dans une alternative épineuse, en éludant la question « Êtes-vous dreyfusard ou anti-dreyfusard ? » par cette réponse singulière, dans un cocktail mondain : « Merci, ni thé ni chocolat ! » Il pourrait aussi répliquer : « Je ne vous ferai pas de réponse dilatoire, on verra plus tard ! » Situation analogue en février 2014, lors de la visite d’état de François Hollande aux États-Unis: à la question de savoir quel allié européen il préfère, la France ou la Grande-Bretagne, Barack Obama ne peut évidemment pas choisir entre Paris et Londres, et il s’en tire par la même pirouette élégante que Jules Cambon, autrefois : “J’ai deux filles, chacune est merveilleuse, et je ne pourrai jamais choisir entre elles. C’est pareil pour mes extraordinaires partenaires européens!”