#Mistral #Russie
Publié par http://paul.quiles.over-blog.com/2014/11/mistral-le-bal-des-hypocrites.html
Il y a quelques mois, David Cameron enjoignait à la France de ne pas livrer les navires Mistral à la Russie. Laurent Fabius, notre ministre des Affaires étrangères, lui rappela alors que la Grande-Bretagne continuait à livrer des armes beaucoup plus sophistiquées à Vladimir Poutine, que Londres était la capitale d’adoption des oligarques russes et il lui conseilla donc de balayer devant sa porte, avant de nous faire la leçon.
De l’autre côté de l’Atlantique, on n’a pas été avare non plus de "fermes recommandations" à la France, sommée de revoir sa coopération avec la Russie par le gouvernement américain, celui-ci n’hésitant pas à manifester ouvertement à plusieurs reprises son opposition à la vente des deux bâtiments. Par contre, ce même gouvernement se garde bien de nous dire que les moteurs russes RD-180 destinés à équiper les lanceurs américains Atlas V, qui envoient dans l’espace leurs satellites militaires, continuent à leur être livrés ! Touchante discrétion. La règle est bien : "Faites comme je dis, mais pas comme je fais"
Brève chronique des annonces et contre annonces
1- Il y a quatre ans, Nicolas Sarkozy annonçait que les chantiers STX de Saint-Nazaire allaient construire pour la Russie deux bâtiments BPC (bâtiment de projection et de commandement) de classe Mistral*.
2- En juillet dernier, malgré la tension entre Occidentaux et Russes, Laurent Fabius assure qu’il n’est pas question de revenir sur la vente des Mistral à la Russie. Pour lui, « il y a une règle que les contrats signés sont payés et honorés ».
3- Quelques semaines plus tard, devant la montée de la crise ukrainienne, les Européens se mettent d'accord sur des sanctions économiques à l'encontre de Moscou, notamment une interdiction de vendre du matériel de défense.
4- En septembre, le gouvernement français annonce que les conditions pour autoriser la livraison du premier navire Mistral à la Russie "ne sont pas à ce jour réunies". Le contrat est alors suspendu jusqu'en novembre. La raison invoquée est "la situation en Ukraine" jugée "grave", parce que les actions menées par la Russie "contreviennent aux fondements de la sécurité en Europe".
5- Le 25 novembre, François Hollande "considère que la situation actuelle dans l'est de l'Ukraine ne permet toujours pas" la livraison des Mistral. Il estime qu'il convient "de surseoir, jusqu'à nouvel ordre" à son autorisation.
6- Aujourd’hui, le premier navire, le Vladivostok** est prêt à être livré et, dans le contexte de tension forte créé par la crise ukrainienne, il n’y a que 2 solutions, aussi mauvaises l’une que l’autre : - soit on respecte le contrat, mais on donne le sentiment de ne pas être solidaire de la politique actuelle de fermeté des pays européens à l’égard de la Russie ;
- soit on ne livre pas le bâtiment, mais on court le risque de conséquences économiques coûteuses et d’une perte d’image dans les contrats internationaux.
Au-delà de ces contradictions et ces va-et-vient, on voit bien que la résolution du problème passe par l’instauration d’une relation nouvelle avec la Russie. Il faut s’efforcer de sortir des problématiques confuses et trop souvent traitées de façon irresponsable, comme en témoigne l’utilisation abusive de l’expression "nouvelle guerre froide". Il faut trouver les voies d’un dialogue, ni naïf, ni agressif, posant clairement les questions les plus délicates : les intérêts de chaque partie, les conséquences d’un conflit durable, les erreurs commises, les compromis possibles de part et d’autre.….
Le sujet mérite d’être abordé en profondeur. J’y reviendrai prochainement.
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* Le BPC est long de 199 mètres et capable d'embarquer 16 hélicoptères, 13 chars et 450 soldats. Le contrat se monte à 1,2 milliard d'euros et génère plus de 500 emplois pendant quatre ans.
** Le second navire, baptisé Sébastopol, doit être livré en 2015.