La jeune « crypto-pousse » espagnole Coinffeine, qui s'était déjà fait remarquer au printemps en devenant la première entreprise du monde capitalisée en Bitcoins, fait une nouvelle fois les titres de l'actualité avec l'annonce d'un investissement de la part de la filiale de capital risque de Bankinter, via sa fondation pour l'innovation.
L'événement est notable car l'intérêt des institutions financières pour l'univers Bitcoin reste essentiellement de l'ordre de la curiosité et des prises de participation dans des entreprises actives du secteur sont encore rares. Il est vrai que la solution que concocte Coinffeine a potentiellement des usages qui dépassent le seul contexte de la cryptomonnaie puisqu'elle esquisse une méthode totalement sécurisée et sans intermédiaire financier pour réaliser des échanges entre pairs (« P2P »).
La clé de son fonctionnement est l'utilisation de mécanismes du protocole bitcoin permettant de gérer automatiquement un dépôt de garantie. Chacune des deux parties d'un échange va placer sous séquestre virtuel une somme donnée (en Bitcoins), puis les transferts effectifs vont être exécutés par tranches d'un montant inférieur à celui de cette « caution », chacun devant être validé avant de passer aux suivants. Si l'un des intervenants venait à faire défaut, il engagerait son dépôt de garantie, ce qui décourage donc les tentatives de fraude.
La technologie de Coinffeine sera d'abord mise en œuvre pour gérer des achats et ventes de Bitcoins, contre des monnaies fiduciaires. L'objectif est alors de remplacer les plates-formes de change centralisées (qui ne sont pas immunes aux abus, cf. le scandale MtGox) par un modèle de transactions directes entre personnes. Cependant, la beauté de l'approche est qu'elle est applicable à des transferts de toute nature. Bankinter évoque ainsi une déclinaison pour des mouvements de titres et autres produits financiers.
Un investissement en capital risque n'implique pas que la banque espagnole va (rapidement) lancer des services autour de bitcoin. Il n'en constitue pas moins le signal d'une prise de conscience de la réalité et de l'ancrage dans la durée d'un phénomène qui n'est désormais plus réservé à un petit club de « geeks » (parfois) activistes. De plus, le choix spécifique d'une solution telle que Coinffeine révèle un intérêt beaucoup plus marqué pour les concepts sous-jacents – dont le potentiel est à peine effleuré à ce jour – que pour la cryptomonnaie elle-même.