Quel changement signifie le « numérique » pour la
communication du dirigeant ? me demande-t-on. Trois questions pour cerner le problème :
Le numérique et la
communication : quel changement ?
Deux attitudes s’affrontent. Le déni d’un côté, l’annonce de
l’inéluctabilité d’un tout Internet de l’autre (vision « smart city »,
ou plutôt « smart world »).
Faux. Internet est une innovation. Et une innovation n’est
que ce que l’on en fait. Et Internet n’échappe pas au sort d’autres innovations
comme la poudre, le nucléaire ou les options financières. On s’en sert pour
détruire l’humanité d’abord. Aujourd’hui, tout ce que touche Internet, presse,
médias, sondages, etc. fait l’objet d’un nettoyage ethnique. Pour que le désert
reverdisse, il faut que l’humanité reprenne en main son invention.
Première conséquence, le dirigeant doit être inquiet. Qu’on
le veuille ou non, son pouvoir, ses revenus qui ont colossalement enflé ses
derniers temps… suscitent jalousie et haine. Il est donc logique qu’Internet
soit utilisé contre lui.
Le dirigeant, aujourd’hui
Quelles sont les caractéristiques du dirigeant moderne ?
Alors que, comme la société de l’époque, le dirigeant d’après guerre était un
féru de progrès technique, le dirigeant moderne est un gestionnaire. Il
ressemble à la haute société anglaise. Elle a révolutionné le monde, mais elle
demeure, depuis des siècles, ultraconservatrice.
Regardez les publicités d’un journal comme The Economist,
vous y verrez la vie du dirigeant. Il aime les montres mécaniques, l’artisanat
ancien, les belles maisons, la nature vierge. Sa femme est au foyer. Son fils
est son héritier.
S’il existe une « rupture numérique » elle est
ici. Alors qu’il se voit homme d’innovation entouré par l’obscurantisme. Le
contraire est vrai. La « révolution numérique » a transformé le monde
en quelques îlots victoriens entourés de hordes barbares numérisées. Ceux qui
veulent se faire une place au soleil y côtoient la masse des déclassés.
Seconde conséquence. Pour communiquer correctement, le
dirigeant doit changer sa perception du monde. Sinon, il subira le sort de ceux
furent incapables de ce faire, Louis XVI et Gorbatchev, notamment.
Quelle attitude
adopter ?
Face à une innovation, il faut être pragmatique. Pragmatique
s’entend au sens de Pierce, James et Dewey. Il faut procéder comme un
scientifique, par enquête et expérimentation.
Sloan et du Pont de Nemours montrent comment faire. Lorsque,
dans les années 20, ils ont repris GM, en faillite, ils n’ont pas eu les
réflexes que l’on aurait attendus d’hommes confrontés à une bérézina financière.
Ils ont voulu comprendre ce qu’était un fabricant automobile. Ils ont donc
passé beaucoup de temps avec le marché, les concessionnaires, leur personnel… C’est
de cette réflexion qu’a émergé tout ce qui fait l’industrie automobile moderne, du contrôle
de gestion au prêt automobile, en passant par les gammes… Accessoirement, GM
est devenu un monstre qui a fait l’admiration de la planète pendant un demi
siècle.
Troisième conséquence. Le dirigeant doit en revenir aux
fondamentaux de la communication, et se demander en quoi le numérique peut l’aider
dans son travail de communicant.
Quels sont les fondamentaux de la communication ? D’abord,
écouter pour comprendre la logique de ceux qui comptent pour l’entreprise. Cette
écoute demande un dialogue. Ensuite, il faut « émettre le bon message ».
Ce message doit convaincre les dites « personnes qui comptent », en
parlant le langage de leurs préoccupations, que le dirigeant est honnête et
compétent. Honnête et compétent sont les deux mots clés de toute communication managériale.
Comment utiliser le numérique pour ce faire ? La question
est laissée au lecteur à titre d’exercice.
"Alfred P. Sloan on the cover of TIME Magazine, December 27, 1926" by Artist: S. J. Woolf (Samuel Johnson Woolf, 1880-1948) - http://www.time.com/time/covers/0,16641,19261227,00.html. Licensed under Public domain via Wikimedia Commons
(J'espère qu'Hervé Kabla ne sera pas fâché que j'ai emprunté le titre de la collection qu'il dirige...)