« Art is everywhere » aime à penser Péron. Dans Faust “l’art est partout” et l’art devient plus vrai que la réalité.
Tête d’affiche du festival atypique BBMix, vendredi dernier, les allemands de Faust ont régalé le public de leur rock expérimental, délaissant l’allure pompeuse et glaciale trop souvent empruntée par ce style de musique. Oubliant le concept ultra léché et l’entorse de cervelle, la performance est spontanée, les échanges avec le public, naturels. La préparation des musiciens, leurs hésitations, les outils qui tombent, les interférences des téléphones et même les chuchotements des spectateurs forment un délicieux ramdam qui « fait intégralement partie du spectacle », nous révèle le chef de file Jean-Hervé Péron, quelques heures avant de monter sur scène. Trois tricoteuses et une imposante bouilloire à infusion finissent d’habiller la scène, comme pour molletonner un peu plus l’atmosphère. La salle revêt alors l’allure du hangar confortablement aménagé du cousin musicos surdoué qui fait profiter à toute la famille de ces dernières trouvailles.
Quarante-cinq années d’expérimentation de Jean-Hervé Péron et Werner « Zappi » Diermaier, deux membres originels du groupe allemand Faust, n’ont pas chassé la candeur musicale, maintenant intact le désir de faire vibrer chaque outils à disposition en s’appuyant sur la moindre situation à portée. Ils se délectent des sonorités acoustiques et industrielles qu’ils manipulent de façon artisanale, délaissant l’électro à leurs héritiers. « Ce nouveau son n’est pas pour nous » avouent-ils, mais reconnaissent volontiers l’utilité des nouvelles technologies dans le processus de production.
Sur scène, les prestations reposent sur la structure simple de leurs productions studio, alimentées par les improvisations d’amis musiciens et ornées d’expérimentations sonores variées où la tôle peut rencontrer la bonbonne de gaz et le bidon usagé. « La musique est un jeu » que Péron et Zappi aiment pratiquer au sein de « la grande famille Faust ». Une bulle qui semble se suffire à elle-même. Ils n’évoquent pas ou très brièvement leurs influences musicales et il est encore moins pertinent d’évoquer le fameux « Krautrock », mouvement musical dans lequel on les classe aux côtés des brillants Kraftwerk, Can et autres pionniers du rock made in Germany, depuis les années 70. Ce sont simplement les petits instants constituant l’essence même de la vie qui inspirent Faust et Faust en fait tout un art !