On avait dit pas les vêtements et pas le physique mais là c’est pas possible.
Voici Jean-Pierre Minella, maire d’Homécourt (54310), MA ville, celle de mes langes lessivables et de mes plus beaux buts dans la cour de l’école Henri Barbusse. Avant de partir étudier, travailler, proche puis loin, Metz, Nancy, Pont-à-Mousson, Poitiers, Bordeaux et Houilles. Mon père me disait toujours, «quand tu seras grand tu devras changer plusieurs fois de boulot et de ville » et il ajoutait péremptoire « fonctionnaire c’est idéal, la paie à la fin du mois et pas de fatigue le soir, le rêve».
Liberté, hérédité, j’écris vos noms.
Jean-Pierre Minella. C’est pas par moquerie que je vous tire son portrait, enfin si mais pas seulement. Cette teinture capillaire, le double anneau annulaire, le téléphone portable made in 2000, la cravate bleue rideau, de travers, le col de chemise déboutonné, cette couperose, cet air de ne pas être là tout en étant ailleurs, valent mieux qu’un long discours sur la fracture sociale qui a englouti Homécourt à la fin des années 70.
Ville à présent hors du temps économique, comme tout un tas de villages photographiés par Depardon.
J’aime les photos de Depardon et les unes du magazine LUI de mon adolescence.
Le camarade Jean-Pierre Minella est élu maire d’Homécourt depuis 1987, exactement l’année de mon départ à un an près. Depuis j’ai couru la France, j’ai découvert la ruralité du Poitou et le tourisme du FUTUROSCOPE, pratiqué la convivialité du sud-ouest et l’héritage des rives de Garonne, je me suis acclimaté du jour au lendemain à la vie parisienne en pavillon de banlieue.
Jean-Pierre Minella est resté, il a fait carrière sans vivre nulle part ailleurs. Naître et mourir au pays. Comme avant. Ancien sidérurgiste et actuel cumulard, le camarade gagne plutôt bien sa vie, 8 163€ mensuel (clic). Un salaire de cadre supérieur pour cet élu du peuple. Grâce à lui, à l’inertie collective dont il est la photographie, pour le prix d’un studio sur le Champs de Mars à Paris, vous achetez 400 m2 et une piscine à Homécourt (clic).
Que connait-il d’aujourd’hui, du management participatif, d’Internet, de la téléréalité ou des exoplanètes, cet homme d’appareil autrefois communiste? A qui parle-t-elle vraiment cette image kitchissime?
En 27 ans de mandat et sans que Jean-Pierre M. n’y soit pour rien, c’est dire s’il justifie sa rémunération, la ville a perdu beaucoup d’habitants, l’essentiel de ses commerces et de ses forces vives que j’incarne à merveille. Un bon bilan. Ce qui a valu à Jean-Pierre Minella d’être réélu en 2014 avec 100% des suffrages exprimés dès le 1er tour, sans opposition aucune. Avec une abstention de 60% (clic).
La ville est morte économiquement. Socialement. Politiquement aussi. A quoi servent les élus. Jusqu’au site Internet de la ville, défraîchi, démodé, daté, qui n’en finit pas de montrer que la ville telle qu’elle est (clic) depuis la capitale.
Arrivé à ce stade je réalise être écrasé par le poids historique de ce billet, je ne sais pas où je veux en venir ni pourquoi j’en suis là. Trop d’émotions, trop de distance, trop d’incompréhension. Homécourt comme Capri, c’est fini, même les trains ne sifflent plus trois dans la gare abandonnée. Alors à quoi rêvent les jeunes homécourtois ? Les vieux d’usine et de crassier, mais les jeunes ? Que peut leur promettre François Hollande depuis Florange et la vallée de la Fensch ?
Encore que. Si ça se trouve vous êtes heureux, jeunes homécourtois, et je surinterprète une photo ringarde et un site Internet pourri.
Jeunes homécourtois je vous lance un cri du cœur, virez votre maire ou relookez le dedansdehors, pétitionnez pour une refonte du site web, promouvez votre ville, y a un coup à jouer avec le slow time, vous êtes tellement en dehors de la wave que c’est jouable. Inspirez-vous de la réussite de l’illustre fils du pharmacien Fabien Pénone, aujourd’hui conseiller diplomatique de François Hollande, Russie, Balkans, ex-CEI, Amériques, politiques extérieure de l’Union européenne (clic).
Oubliez la sidérurgie et mon départ en 1986.
Je ne reviendrai pas, tenez-vous le pour dit, alors il faut tourner la page même si un mec à double bagouse est lourdement collé dessus.