En France, les Saisons 1 et 2 de Lilyhammer ont terminé leur contrat. (Cf. Notre présentation de Lilyhammer : Diffusée sur Arte et Canal+) L’occasion pour le Blog La Maison Musée de livrer quelques impressions à retardement sur la première saison de Lilyhammer. Pour Steven Van Zandt acteur – co-auteur du script – co-directeur de la bande-son de Lilyhammer, la série télévisée a le vent en poupe et a déjà vu sa 3e saison diffusée aux Etats-Unis.
Propulsés par Netflix, les huit épisodes qui composent la première Saison ont tout pour plaire. Tout, ou presque. Ce qui justifie une critique et un retour en arrière sur une idée prometteuse est un sentiment partagé à propos de la narration; de la mise en place d’un suspens et la diversité des situations. Quelques éléments qui, bout à bout, pourraient parfaire les 8 épisodes initiaux de Lillyhammer !
Un choc des cultures
Lilyhammer est un condensé réussi des clichés que l’on nourrit à l’égard de la Norvège.
Frank Tagliano a collaboré avec les hautes instances des Etats-Unis pour mettre la main sur une des têtes de la pègre du pays. Lui-même Mafieux, tout le monde se connait dans ses milieux. En échange d’un nom, le service de protection des témoins lui assure une nouvelle identité, une nouvelle vie. Le choix de Tagliano, pour le moins surprenant, ça sera la Norvège et précisément dans la ville de Lillehammer. Au détour d’une rediffusion télévisée, ce furent les Jeux Olympiques 1994 qui lui ont fait connaitre cette ville modeste, tranquille et hivernale. L’idée initiale de Lilyhammer est simple, elle fonctionne et surprend.
D’emblée, on sait qu’elle ne sera pas sérieuse. Surtout, le spectateur débute avec une ironique idée : par rapport aux citadins de Lillehammer, nous savons que sous le nom de Giovanni Henrikssen, Frank Tagliano n’a pas perdu ses habitudes de Mafieux. Pourtant, sa couverture doit rester intacte coûte que coûte au prix de quiproquos bien amenés.
Rapidement, Frank Tagliano désormais Giovanni Henrikksen (Incarné par Steven Van Zandt) s’entoure de connaissances et « fait sa place » en Norvège.
Lilyhammer dégage une forme de rareté dans la sphère de la série télévisée puisque la rédaction de son scénario, du script, la composition du casting est majoritairement … Norvégienne! Comme on pouvait l’attendre, l’humour révèle une certaine férocité du « choc des cultures ». Les Norvégiens sont présentés, malgré eux, dans leurs défauts et leurs travers vis-à-vis de l’étranger mais aussi dans leur mentalité. En Norvège, le trait est volontairement grossi, on roule en voitures électriques (Cf. Episode 1), on dort dans des maisons et des hôtels en bois, la neige devient un quotidien et l’on a peur de l’Autre, généralement l’étranger. Toujours bienveillante, la série télévisée de Lilyhammer met un coup de pied dans notre fourmilière des idées reçues à travers les thèmes de l’écologie, de cette nation a beaucoup d’aspects irréprochables avec un humour efficace. Le renversement est total (Episode 8) lorsque finalement, l’émigré a sa place dans la société. Plus encore, il dispose d’un travail; s’intègre à la société, peut fonder sa société et importer un morceau des Etats-Unis dans les terres gelées de Norvège.
Un schéma absurde qui reste dynamique jusqu’au quatrième épisode … mais qui semble s’essouffler à la grosse moitié de la Saison 1. L’un des soucis de la première Saison de Lilyhammer concerne son rythme de narration. On partage volontiers la progression de l’aventure en deux grosses phases : la surprise, la découverte et l’interaction toujours cocasse (Lorsque Giovanni annonçait être « cuisinier » : refroidir, distribuer, ne pas remuer le couteau … Il sait faire!) des résidents de Lillehammer et de Giovanni (Episodes 1 à 4) et l’installation d’une forme de routine (Episodes 5 à 8) : la Norvège s’américanise, Giovanni n’est à aucun instant découvert dans son imposture (Ou presque) et fonde une nouvelle Italie-Américaine en terrain inconnu. Il y a quelque chose de regrettable d’autant que le suspens est quasi absent. On irait même jusqu’à plaindre Giovanni du manque de rebondissements dans cette vie tranquille, à l’ombre des soucis et avec un final sans trop d’écorchements sur le plan de l’identité.
Steven Van Zandt : le fils spirituel d’Al-Pacino et de Robert de Niro
Les personnages sont, volontairement, poussés à l’extrême dans les clichés.
Du début à la fin Steven Van Zandt, (re)connu pour avoir endossé un rôle notable dans la série télévisée Les Sopranos, musicien dans une même vie auprès de Bruce Springsteen, assure le job. Être Italien et avoir fait partie de la Mafia est une première nature que l’on retrouve à juste titre dans des mimiques récurrentes; des gestes; des attitudes; des scènes qui nous rappelleront pêle-mêle de grosses productions populaires. Inévitablement, on sourit à mesure en prenant conscience que le but est de réaliser une comédie peu sérieuse – pourtant corrosive à certains égards sur les Norvégiens – et destinée à forcer le trait de tout.
Robert de Niro a du confier une partie de son faciès à l’acteur Steven Van Zandt. Il n’y a pas d’autres explications à cette mauvaise humeur régulière, une forme de mécontentement constant face à ce qu’il se produit, bonheur comme joie, rage et violence incluses. Ainsi, dès le début, Giovanni prend un peu trop son rôle à coeur quitte à en faire trop dans le cliché. Rédigé de cette sorte, cela parait paradoxal. Pourtant, on se demande encore comment Giovanni Henrikksen n’est pas découvert au moment de son arrivée lorsqu’il passe à tabac la jeunesse insouciante de Lillehammer dans un train. (En y repensant, la scène est juste impossible … Dès les premières minutes de l’épisode 1.)
Petit à petit Giovanni recrée son « chez-lui » en Norvège.
A d’autres moments, la fusion avec Al-Pacino nous fera sourire dans un autre registre. Aux affaires, à la corruption, dans son bureau et avec insouciance, Giovanni recrée une société dans la société. Non pas que la corruption n’existe pas à Lillehammer (Autre défaut souligner par la série télévisée) mais « à la manière Américano-Italienne », probablement pas. On se plait à repenser aux règlements de compte bon-enfant et clichés en se servant des installations Olympiques de 1994; la capture de suspects bâillonnés et ligotés (Episode 7) ou multiples pressions dont est capable l’ancien Frank Tagliano.
La vie dans une Norvège presque calme
Rares sont les moments où Frank Tagliano n’adopte pas une expression négative …
Un défaut majeur de Lilyhammer Saison 1 réside dans son manque de consistance dans sa progression. Avant l’entrée en scène de Giovanni Henrikksen, Lillehammer est loin d’être une petite bourgade sans histoires. Elles restent plaisantes à suivre et constituent justement ce que l’on pourrait voir comme la « première partie » de la Saison 1. Une histoire de photos gênantes (Dès l’épisode 1. Fait repris dans le dernier épisode), une fausse maladie qui sert de prétexte pour un arrangement … Nous voilà plongés dans la vie à peu près réglée des membres de la communauté de Lillehammer.
En dehors de cela, en dehors du titre de la série télévisée par ailleurs, Lilyhammer bascule dans la vie de la nouvelle vie calme de Giovanni : les courses, gérer son entreprise, s’occuper des individus qui lui sont chers et faire partie de leur quotidien. Sur ce point, il est difficile d’entrevoir quelque chose qui amène du suspens, une attention de chaque instant. En outre, ce que nous appelons la « deuxième partie » ne permet définitivement pas de comparer Lilyhammer à des productions comme Les Sopranos ou Fargo … où la trame scénaristique s’avère plus étoffée et plus complète à apprécier. Si, à sa charge, la Saison 1 a un rôle de grosse introduction, cette fonction d’entrée en matière dure malheureusement sur la durée. On perçoit autant la fonction, certes utile, mais que l’on pourrait (Ou que l’on regrette dans notre cas) regretter à l’écran.
Giovanni saisit dans son quotidien Norvégien « italianise » à son tour la société de Lillehammer.
Etant donné que l’identité de Lilyhammer repose sur une tonalité de comédie, il est difficile de lui reprocher sa faculté à imposer des paradoxes. Ce qui, à nos yeux, est un défaut, se révélera peut-être une autre source de rires. Petit à petit, Giovanni recentre la ville autour de sa personne. Il y a quelque chose d’indéniablement plaisant à observer avec les spécificités posées en introduction : des clichés, ici et là, un manque de sérieux évident, de l’exagération et une morale qui remet en quelque sorte les pendules à l’heure … Sans pour autant installer une attente insatiable, ce que nous reprochons à Lilyhammer.
Lilyhammer tire assez peu profit de son concept d’épisodes à cause, justement, de l’ironie et des clefs de lecture fournies immédiatement au spectateur. Au fond, il y a cette sensation malheureuse que la série télévisée norvégienne aurait pu se clore sur l’épisode 8 et être une morale pour notre anti-héros en l’absence de suspens. Au reste, Lilyhammer constitue une « bonne » comédie qui se laisse suivre dans un but de pur divertissement. Ce qui, en soi, relève d’une qualité perdue depuis longtemps en France dans notre cinéma !On aimé :
+ L’acteur Steven Van Zandt pour certains aspects. (Mimiques, manière d’incarner « son » personnage …)
+ La Norvège : ses défauts et qualités tournés à la comédie.
+ Quatre premiers épisodes intéressants.
+ Une série télévisée norvégienne d’assez bonne qualité !
+ Du cliché en veux-tu en voilà, avec une certaine bienveillance.
+ Un divertissement assez agréable.
On a détesté :
- Le personnage de Giovanni, énervé et sanguin dès le début.
- Quatre épisodes moins intéressants, plus longs et moins captivants.
- Une série télévisée qui n’exploite pas assez son format : pour le récit et le suspens.