Gerontophilia // De Bruce LaBruce. Avec Pier-Gabriel Lajoie et Walter Borden.
Parler de l’amour d’un jeune garçon de 18 ans pour des personnes âgées, ce n’est pas quelque chose de simpliste. Notamment d’un point de vue purement moral. Si j’aurais pu apprécié que Gerontophilia mette en avant cet aspect là de son histoire, il s’agit probablement ici du meilleur film de Bruce LaBruce, un metteur en scène à qui l’on doit entre autre L.A. Zombie ou encore The Raspberry Reich. Car au delà de ce que j’aurais aimé voir dans ce film, le film en lui-même fait réfléchir et il semble que cela soit ce qu’il y a de plus important pour Bruce LaBruce. C’est donc sur fond de comédie romantique étrange et fascinante à la fois que l’on nous sert une belle histoire d’amour qui permet aussi de changer un peu des films que l’on a pour habitude de voir dans le cinéma LGBT. Effectivement, tout n’est pas parfait dans ce film, mais disons qu’il associe pas mal de choses qui sont suffisamment intelligentes pour que l’on ait envie d’en voir beaucoup plus. Une fois que le film s’est achevé, je me suis demandé pourquoi il était terminé tant il y avait encore de choses à raconter autour de Lake et de son « fétichisme » comme il le dit si bien.
Lake, 18 ans, un garçon plutôt ordinaire, vit avec une mère névrosée et sort avec une fille de son âge, un peu excentrique. Mais il se découvre un penchant de plus en plus fort pour... les vieux messieurs. Embauché dans une maison de retraite pour l’été, il tombe sous le charme de M. Peabody, un séduisant patient de 82 ans.
Bruce LaBruce fait attention à ne pas transformer Gerontophilia en un film pervers. Il y a des scènes chocs mais le sexe est très aseptisés. Le réalisateur ne cherche pas à trop en montrer mais juste ce qu’il faut pour comprendre qu’il y a une relation entre Lake et M. Peabody. Au début, c’est un flash qui va permettre à Lake de se rendre compte de son attirance et puis tout d’un coup, c’est une vraie histoire qui va se construire et le visage de Lake, autrefois morne, va petit à petit s’illuminé. Car au fond ce n’est pas vraiment un histoire de gérontophilie mais plutôt celle d’un jeune homme qui découvre sa sexualité et ses fantasmes. La première partie du film joue un rôle assez important là dedans. Puis la seconde partie se présente sous la forme d’un road-movie où Lake et M. Peabody vont pouvoir passer de bons moments ensemble, comme deux amoureux transits vont faire un dernier voyage. C’est une façon de rompre avec le film et ce qu’il mettait en scène au départ. Je trouve ça intelligent mais c’est aussi à ce moment là que Gerontophilia devient un peu moins efficace.
La relation entre Lake et cet homme s’étiole alors et pourtant, la jalousie de Lake (assez cocasse d’ailleurs), l’amour, le sexe, etc. tout y passe avec un regard assez lumineux. Bruce LaBruce nous offre un film choc mais plein de désir, animé tout simplement. Le film tente donc de mettre en boîte la vie de façon assez simpliste où le chaos ne semble pas vraiment exister (notamment du point de vue de la mère qui ne sert jamais le récit et semble jouer au rôle de la mère complètement cruche, ou alors de ce jeune garçon qui découvre le secret de Lake mais cela ne semble pas l’atteindre alors qu’au fond on sait pertinemment que quelque chose se joue derrière, etc.). Finalement, Gerontophilia est un film ambitieux qui n’a pas toujours réussi à associer ses ambitions à son histoire mais cela reste un regard aussi étrange que nouveau sur la sexualité qu’il était intéressant de traité. Car c’est la première fois que j’ai vent d’un film parlant de gérontophilie. Rien que pour ça, le film en vaut clairement la chandelle. Enfin, Pier Gabriel-Lajoie, sans être parfait, a un visage si expressif et lumineux que l’on ne peut pas passer à côté. On est captivé.
Note : 6.5/10. En bref, un film ambitieux qui n’est pas toujours réussi mais qui tente malgré tout de parler d’un sujet assez tabou avec une légèreté étonnante.
Date de sortie : 26 mars 2014