De même que dans « Cat & The Dog Trap », de son dernier album « Tell’Em I’m Gone », Yusuf Islam a.k.a. Cat Stevensraconte un peu de sa vie, sous l’angle des rapports entre l’opinion, la presse, et la vérité : De la sagacité de comptoir et la philosophie de bistrot (« The Johnny Walker wisdom » selon Léonard Cohen) qu’il put observer dans son enfance jusqu’aux assautsmédiatiques que subit l’artiste devenu « star » (et la première interruption de sa carrière musicale en raison de problèmes de santé), puis, à la suite de sa conversion à l’Islam dans une période où montaient les extrémismes de toutes sortes, lorsque les média rapportèrent à tort qu’il soutenait la Fatwa contre l’écrivain Salman Rushdie. Se comparant à Socrate choisissant la mort (par empoisonnement à la ciguë) plutôt que de renoncer à sa recherche de la vérité, il explique ainsi son retrait de la scène (de 1978 à 2001) et son long silence.Son retour sur scène et la publication, depuis, de ses trois nouveaux albums (An Other Cup, Roadsinger, et Tell’Em I’m Gone), pour le plus grand bonheur de ses fans, sont aussi pour lui l’occasion de s’expliquer, et d’apparaître sous un autre jour : celui d’un homme serein, apaisé, plein d’humour, toujours passionné par la musique mais ayant manifestement pris du recul, tant vis-à-vis de son propre cheminement que des extrémismes de tous bords. Est-ce là le résultat de sa recherche spirituelle ou le simple effet de l’âge ? Les plus grands chanteurs ont suivi le même parcours, et leur répertoire en témoigne (Like a Soldier, et Song For The Life, par Johnny Cash, Going Home, et Show Me The Place, pour Léonard Cohen). Le temps est un artisan patient qui peut adoucir les tempéraments comme il polit les galets.Pourtant, si le génie musical des années 1960 et 1970 dont les chansons révélaient une âme tumultueuse et enflammée porte aujourd’hui une longue barbe blanche et s’exprime avec le calme et la sérénité d’un sage, sa voix n’a pas changé : Yusuf Islam et Cat Stevens ne font qu’un !ALN
Le Blues de la Rédaction
Je suis né dans le West-EndDe Londres à l’été quarante-huitAu dessus d’un caféOù certains aimaient venir pour la soiréePour moi, c’était la journéeOh ! Les chiens grognent désormaisDevant ma porteEt, de la rédaction, hurlait la Vérité
Passent les annéesLes Quarrymen triomphentLe p’tit gars devient une starPuis il tombe, mais il se relèveAvec une guitare EverlySur la route, il part en quêteDe la bonne chanson dont il rêveEt, dans la rédaction, chantait la Vérité
Big Brother se renditAvec téméritéEn ces lieux, dit-onOù jadis les prophètes marchaientAu dessus de ce bas mondePuis vint la ParoleEt le petit frère put voirComment la rédaction masquait la Vérité
Un jour, les journaux demandèrentSi j’avais dit çaJ’ai dit « Oh non,Certainement pas ! »Et, au fond des choses, nous sommes allésIls ne l’ont pas publié !Tout comme, en Grèce, Socrate priait,Tombant à genoux« Mon Dieu, pardonnez-leur »Et ne parla plusEt, dans la rédaction, s’épandait la ciguë.
(Traduction – Adaptation : Polyphrène)* The Quarrymen : nom de scène de ceux qui deviendront ensuite "The Beatles"** Black Everly guitar : le modèle de guitare acoustique noire Gibson rendue populaire par "The Everly Brother"