Au hasard de mes recherches sur le net j’ai découvert la Parabole des talents. Une parabole évangélique qui dépeint un maître qui gratifie ses serviteurs méritants, et qui en punit un autre pour sa paresse. J’ai ainsi appris que le terme « talent » provenait de ce récit. Talent et singularité ; ces mots ont résonné durant des heures dans ma tête pour finalement m’amener à en parler ici. Parce qu’au final, c’est quoi le talent ?
Je ne fais pas allusion à l’unité de monnaie de l’Antiquité, ni à la rivière du Canton de Vaud en Suisse, encore moins au bâtiment de la classe Trafalgar de la Royal Navy britannique. Je parle du talent en tant qu’ « aptitude singulière ».
Au fil des mes recherches, je suis tombée sur l’exposé de Fatym Layachi, -actrice et réalisatrice que j’aime beaucoup- qui globalement, dit qu’elle ne croit pas au talent ; et je la rejoins dans sa réflexion.
J’entends souvent les gens me dire « ah tu dois avoir un sacré talent pour travailler dans la communication ». Je pense que ces gens confondent créativité et talent. Franchement, comme Fatym, j’ai du mal à me dire que telle personne est géniale parce qu’elle a du talent et que telle personne est moins bien (pour ne pas dire nulle) parce qu’elle n’a pas de talent. Nous avons toutes les deux du mal à accepter l’idée de cette injustice à la base. Je dis à la base en référence au mythe du talent « inné ». Je trouve que c’est une chose assez cruelle et extrêmement injuste. On a tous des facultés, des capacités, des facilités dans nos domaines de prédilections. Bien entendu, j’ai forcément des choses que la personne en face de moi n’a pas MAIS cette personne a aussi des choses que je n’ai pas. Toujours est-il que je ne pense pas que tout cela soit soit dû au talent ; tout le mérite revient au travail !
J’entends souvent -les rares fois où je regarde la télé- dans les émissions de danse et de chant, les membres du jury dire : « quelle voix ! quelle gueule ! quel talent ! » Cela dit, nous avons tous une voix et une gueule ! Alors c’est vrai, certains artistes ont de superbes voix certes, mais ils n’y sont pour rien, c’est leurs parents qu’il faut remercier ! Ce que je veux dire, c’est que ces chanteurs n’ont pas choisi leur voix. Après tout, ils sont nés comme ça, donc dès le départ ils partaient avec ce +. Pour ce qui est du talent, je pense qu’ils l’ont acquis en travaillant. De même pour nous autres, mortels. Nous n’avons choisi ni nos voix, ni nos gueules. Fatym explique que, le fait que ça vienne de nos parents nous rend extrêmement unique. L’ADN de tout être humain est composé à moitié de l’ADN de la mère et à moitié de l’ADN du père ; et même la transmission de cette moitié est faite de manière totalement aléatoire, donc au final, notre code génétique est absolument unique. Sauf le cas des vrais jumeaux -bien que leurs empreintes digitales ne soient pas les mêmes- ; donc physiologiquement, faits de ce hasard, nous sommes totalement uniques et singuliers. Nous ne absolument pas conformes.
Quand on regarde l’histoire du monde ou de la création, c’est ce genre d’aspérités qui ont fait avancé les choses. C’est la singularité de Copernic qui nous a appris que la terre n’était pas plate, c’est la singularité de Mozart qui a produit d’aussi belles symphonies, c’est la singularité de Scorsese qui a fait de lui un géant du cinéma contemporain, c’est la singularité d’Apollinaire qui a écrit d’aussi merveilleux vers. La singularité pourrait s’opposer au concept d’être quelconque : adjectif indéfini qui signifie n’importe lequel. Mais aucun de nous ne peut être n’importe lequel. Chaque être est irremplaçable parce que l’être quelconque ne peut pas exister. Tout être humain est cette espèce d’entité singulière et extrêmement insondable, explique Fatym. Elle cite cette jolie phrase de Julia Kristeva qui dit que « nous sommes des êtres magiques de singularités parce qu’on est nés au hasard de l’histoire et du désir » et c’est vrai. Cette magie fait qu’on existe en tant qu’être absolument unique. Evidemment, on ressemble à notre entourage, mais il faut qu’on assume ce qui nous caractérise. Qu’on construise un espèce de patchwork qui, à première vue, peut paraître incohérent étant donné que l’ont porte en nous des choses de nos parents, de notre école, de nos voyages, de nos blessures, d’une chanson qu’on a aimé. Mais accepter de porter tout ce bagage, de se dire qu’on est fait de ça, est très important voir salutaire. « L’étrangeté est le condiment nécessaire à tout beauté » chantait Baudelaire.
Comme Fatym, j’ai l’intime conviction que la singularité et le talent ne sont pas une finalité en soit. La finalité de tout un chacun est le bonheur. On aspire tous à être heureux, et nous sommes toutes les deux convaincues que le bonheur est quelque chose qui ne se construit pas tout seul.
Et toi, le concept de talent te parle ? Qu’en penses-tu ?