C'est la question que pose Stephen Greer, analyste du cabinet Celent, dans un billet de blog, en notant que les grandes institutions financières prêtent grande attention à la popularité des nouvelles entrantes, même si beaucoup d'entre elles ne les considèrent pas comme une réelle menace. En guise de réponse, il propose 3 scénarios principaux pour les néo-banques, reléguant la possibilité qu'elles deviennent une alternative viable aux acteurs traditionnels au rang de la plus grande improbabilité. Or, il me semble que cette vision est partielle (et, indirectement, partiale).
L'une des hypothèses formulées est, il est vrai, incontestable : les approches originales adoptées par les startups du secteur vont nécessairement influencer la manière dont les entreprises historiques considèrent leur métier à l'ère numérique. En particulier, l'obsession de l'expérience client est en passe de devenir une caractéristique indispensable pour survivre dans les années qui viennent. Et, en théorie, grâce à l'étendue de leurs offres, les « vieilles » banques devraient même être en meilleure position dans la course à l'excellence.
Hélas, la réalité est bien différente. Leurs lourdeurs internes limitent autant leur capacité à rattraper leur retard en matière de relation client numérique que leur faculté à intégrer leurs services dans un ensemble homogène. Dès lors, le deuxième scénario qui consiste à imaginer que les institutions financières créeront leurs propres banques « digitales » est totalement illusoire. Ainsi, les initiatives en ce sens ne sont souvent que de pathétiques ré-habillages des services existants, loin des attentes réelles de la clientèle.
Dernière option évoquée, suivant l'exemple du rachat de Simple par BBVA, les néo-banques seraient acquises par leurs « ancêtres », offrant à ces dernières un raccourci dans la mise en place d'une vision plus disruptive, en parallèle de leurs établissements classiques. Une telle stratégie fait beaucoup plus de sens que celle d'une création de nouveaux modèles en interne mais il est peu vraisemblable qu'elle se généralise tant elle est éloignée de la culture du secteur (relativement à l'innovation, au repli sur soi…).
Conséquence directe de l'immobilisme de leurs aînées, les petites agitatrices ont donc encore le temps d'affuter leurs armes et d'affiner leurs approches avant de les voir se transformer en concurrentes sérieuses sur le terrain de la banque « digitale ». L'une des voies qu'elles exploreront afin de surmonter les difficultés qu'elles doivent affronter est celle des partenariats, que ce soit entre « pairs » (pour enrichir leur spectre de services) ou, peut-être, avec des acteurs d'autres domaines (la grande distribution ?).
Naturellement, il serait beaucoup plus confortable pour les institutions financières de croire que les néo-banques ne sont qu'un phénomène passager et qu'elles auront tôt fait d'en absorber les impacts, via une acquisition ou grâce à leurs propres stratégies numériques. Ce serait pourtant une erreur tragique, qui les rendrait encore plus vulnérable face à l'évolution des usages…