L’expérience client est le nouveau dogme des équipes marketing. Wided Batat et Isabelle Frochot décrivent dans leur ouvrage Marketing expérientiel (Dunod, 2014), ce qu’est l’expérience client, comment répondre aux attentes tacites et explicites du consommateur, à leur évolution, comment intégrer cette dimension expérientielle à tous les niveaux – produit, service, communication digitale. Cet ouvrage est le premier en France à traiter de ce sujet en apportant une traduction opérationnelle et marketing de l’approche théorique de l’expérience de consommation.
Marketing Community : Qu’est-ce que le marketing expérientiel ?
Wided Batat & Isabelle Frochot : Le marketing expérientiel s’est développé en s’appuyant sur l’idée de l’économie de l’expérience initiée par les deux chercheurs américains, Pine et Gilmore, en 1999. Il propose de répondre aux désirs du consommateur qui est perçu comme un être émotionnel à la recherche d’expériences sensibles et émotionnellement chargées. Le marketing expérientiel va au-delà des besoins fonctionnels et tangibles du consommateur ; il met l’accent sur la quête croissante de la part des consommateurs contemporains d’immersion dans des expériences variées, afin d’explorer une multiplicité de nouveaux sens à donner à leurs vies et d’échapper à leur quotidien oppressant. Dans la perspective expérientielle, le consommateur n’est pas un acteur passif qui réagit à des stimuli, mais un acteur et un producteur de ses propres expériences de consommation même « hyper-réelles ».
« Les consommateurs ne consomment pas les produits, mais au contraire, consomment le sens de ces produits »
À partir de quand cette évolution du marketing s’est-elle développée ?
Depuis les années 1960, la consommation s’est progressivement désengagée d’une conception essentiellement utilitariste, basée sur la valeur d’usage. Tout d’abord, Baudrillard en 1970 a mis en évidence le fait que la consommation est devenue, dès les années 70, une activité de production de significations et un champ d’échanges symboliques : les consommateurs ne consomment pas les produits, mais au contraire, consomment le sens de ces produits, l’image qu’ils véhiculent. C’est en ce sens que l’expérience de consommation a été théorisée en marketing par les deux chercheurs américains Holbrook et Hirschman en 1982, comme un vécu personnel et subjectif, souvent chargé émotionnellement dont l’évaluation se traduit en plaisirs et souvenirs.
Comment l’entreprise mène-t-elle l’expérience clients ?
Pour le marketing expérientiel, une expérience constitue une quatrième catégorie d’offre adaptée aux besoins du consommateur qui vient s’ajouter aux marchandises, aux produits et aux services. Ainsi, l’expérience de consommation représente une valeur commune partagée entre le producteur et le consommateur. Les entreprises doivent chercher à aider leurs clients dans la production et la réalisation de leurs expériences. Réintégrant l’idée d’immersion, le marketing expérientiel propose de faire de la consommation une suite d’immersions extraordinaires pour le consommateur qui peut se traduire à travers plusieurs éléments en allant de la communication à l’atmosphère sur le site de vente et l’interaction avec les acteurs du marché.
Quels outils permettent d’évaluer cette expérience ?
Sur le plan méthodologique et empirique, des approches interprétativistes et des méthodologies telles que l’observation participante et non participante, les entretiens phénoménologiques, les récits de vie, l’introspection subjective, l’ethnographie, etc. peuvent être mobilisées pour évaluer l’expérience du consommateur. Ces méthodologies permettent d’étudier en profondeur les sous-cultures de marché, les stratégies interprétatives des consommateurs et les dimensions socio-culturelles de la consommation dans des contextes empiriques ordinaires et expérientiels tels que le tourisme, l’art et la culture, les loisirs, le sport, les spectacles, etc.