Plus de 130 pays ont déjà reconnu unilatéralement la Palestine comme État, depuis sa proclamation en 1988 par Yasser Arafat. Le 28 novembre, les députés français devront se déterminer clairement.
Tous les commentateurs médiacratiques devraient aujourd’hui lire l’Humanité et bien choisir, dans le ronflement sournois de l’actualité, entre l’écume des choses et l’imagination du monde qui ne renonce pas. Il n’est pas si fréquent d’avoir à tutoyer l’histoire, pour prendre date, cela va de soi, mais aussi et surtout pour la convoquer. Dans nos colonnes, cinq grandes voix israéliennes, parmi 660 autres, dont Élie Barnavi en personne, l’ex-ambassadeur d’Israël en France, exhortent l’Europe, et singulièrement notre pays, à se prononcer «pour» la reconnaissance d’un État palestinien. Il n’y a pas de hasard et nous voulons croire que le moment porte en lui quelque chose d’inédit pouvant arracher aux ténèbres la lumière attendue par tout un peuple. Une lumière capable de nous sortir de cette guerre de Cent Ans, qui n’en est qu’à mi-course et qui a ensanglanté des générations et mis plusieurs fois en péril la paix de toute la région.
Parce qu’il a labouré nos consciences depuis toujours, nous savons que ce conflit-là ne se réglera pas demain matin. Cette fois pourtant, l’espoir pourrait ne pas être un vain mot: et si l’État palestinien n’était plus un rêve?
Plus de 130 pays ont déjà reconnu unilatéralement la Palestine comme État, depuis sa proclamation en 1988 par Yasser Arafat. Jusqu’à il y a peu, l’Europe, cette ombre molle souvent insignifiante, brillait par son manque de courage. Mais depuis que la Suède a pris ses responsabilités, relayée par le Parlement de Grande-Bretagne, un tournant politique majeur a émergé. Il n’est pas que symbolique. Car maintenant c’est aux parlementaires français de passer aux actes et de ne pas rester au pied du mur ! Dans moins de quinze jours, le 28 novembre, ils devront se déterminer clairement. Bien que tardif, ce vote de la France, membre du Conseil de sécurité et porteuse de valeurs qui la dépassent, pourrait modifier structurellement le rapport de forces, à l’ONU, pour que la Palestine devienne – enfin – le 194e État permanent, membre de plein droit. Les Palestiniens ont tant à créer encore : ils n’ont hérité que du néant, des restrictions, de la destruction et de la colonisation. L’événement-matrice est là, à portée de main. Ils nous regardent.
[EDITORIAL publié dans l'Humanité du 17 novembre 2014.]