Le 13 juin 2012 décédait le philosophe français Roger Garaudy. L’événement fut relativement peu couvert par les médias, le défunt étant accusé d’avoir « dérivé vers l’antisémitisme » vers la fin de sa vie.
Mais qui fut Roger Garaudy ? Né en 1913 à Marseille, agrégé de philosophie en 1936, Roger Garaudy a d’abord été un pilier intellectuel du Parti communiste français (PCF). Élu député au lendemain de la Guerre, il se lie d’amitié avec l’abbé Pierre, également député (MRP, parti démocrate chrétien). Sa critique de l’URSS contribue à le fait exclure du PCF en 1970. Mais c’est sa participation aux mouvements de Mai 68 qui motive principalement son exclusion du parti. Le philosophe français voit dans les événements de Mai un soulèvement social sans précédent représentant l’espoir de donner « un autre sens à la vie qu’une augmentation quantitative de la production et de la consommation ».
Soutenant le mouvement social sans se douter que Mai 68 portait également les germes d’un matérialisme libéral propice à la mutation du capitalisme, Roger Garaudy se rapproche ensuite de la religion. D’abord par un retour au catholicisme puis par une conversion à l’islam en 1982. Ainsi, sans renoncer à la grille de lecture marxiste, il voit en la spiritualité une alternative au « monothéisme du marché ». Très critique à l’égard du culte de la croissance et de l’hégémonie américaine, Roger Garaudy accuse le libéralisme non seulement d’être à l’origine de la décadence de l’Occident mais également d’être l’élément perturbateur ayant annihilé les possibilités de développement alternatif dans les autres régions du monde.
Penseur marxiste et religieux, acteur de Mai 1968 sans avoir évolué vers l’idéologie libérale-libertaire, Roger Garaudy a développé une pensée complexe à la croisée des chemins entre plusieurs courants a priori antagonistes. Cependant, en publiant en 1995 Les Mythes fondateurs de la politique israélienne, l’agrégé de philosophie s’est attiré les foudres des médias. Il y dénonce l’instrumentalisation contemporaine de la persécution des juifs sous le régime nazi à des fins politiques. Défendu par Jacques Vergès, Roger Garaudy est condamné le 27 février 1998 pour contestation de crimes contre l’humanité. Il reçoit alors le soutien de son ami l’abbé Pierre qui vante son « éclatante érudition ». Celui-ci est alors exclu de la LICRA et se retrouve la cible d’un dénigrement public qui le pousse à prendre une retraite médiatique temporaire.
C’est donc ce dernier épisode de sa vie qui valut à Roger Garaudy son excommunication médiatique et la réduction de son parcours au péché suprême de notre époque, censé jeter l’opprobre sur l’ensemble de son œuvre.
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