En peu de temps, il est devenu le chouchou des sondages, l'homme politique préféré des sondés, de gauche comme de droite. Nul besoin d'être un militant UMP ni un fin expert politique pour comprendre qu'Alain Juppé a peu de chances de gagner sa qualification à la candidature pour la prochaine élection présidentielle.
A moins qu'il ne change, et vite, de comportement et de tactique.
1. Alain Juppé concourt sur un positionnement politique encombré, le centre-droit. Sa modeste couleur gaulliste n'y change pas grand chose. Il fait clairement campagne au centre, y compris sur des sujets sociétaux. Sa récente prise de position en faveur de l'adoption par les couples homosexuels en est l'une des dernières illustrations.
2. Alain Juppé laisse Nicolas Sarkozy s'emparer de l'UMP, qui n'est qu'une machine électorale. Vous rappelez-vous quand un candidat a remporté une élection nationale sans le contrôle de son parti ? Juppé devrait méditer les exemples ratés des candidatures de Balladur en 1995, ou Royal en 2007.
3. Alain Juppé ne laboure pas les terres militantes de la droite. Comme Fillon en 2012, il s'épargne de trop nombreuses rencontres de terrain. Il préfère des interviews "bobo-isées" qui l'éloignent chaque jour davantage du coeur politique de son camp. Il est peut-être le chouchou des sondages, les mêmes enquêtes donnent encore Sarkozy largement en tête auprès des sympathisants de droite.
– Bon, admettons qu’elle ait bien lieu, cette fameuse primaire UMP, admettons que Sarkozy ne parvienne pas à l’empêcher, tu n’es pas sérieusement en train de me dire que tu irais pour voter Juppé ?
– Sérieux, j’irai et je voterai Juppé. Et sans me cacher !
– Juppé ? On parle bien du même, là ? Celui de “droit dans mes bottes”, celui des grandes grèves de 95, celui qui nous a fait traverser Paris à pied pendant un mois et qui a provoqué la rencontre de Pierre Bourdieu et des cheminots en grève, ce Juppé-là ?
Frédéric Bonnaud, Les Inrocks
4. Alain Juppé a rarement gagné une élection difficile. En 2007, il n'a pas réussi à recouvrer son mandat de député à Bordeaux. En 1995, son court mandat de premier ministre s'est achevé dans la dissolution de 1997.
5. Alain Juppé est trop gentil. La compétition à droite n'épargne que les fauves. Sarkozy ou Chirac ont fait le ménage, chacun en leur temps, à coups de déstabilisations individuelles, de scandales et de pressions inouïes.