Ce matin sur ma terrasse, en totale vacuité, je regarde dormir mes deux félins, apaisés après une nuit ponctuée de
folles poursuites. La tête de Lily lovée dans les replis du ventre de Tommy. Antagonistes dans le jeu, séparés par dix bonnes années, dix années voyageuses pour le vieux Tom, que je ramenais
d’Israël avec Jerry, un autre matou errant, disparu depuis. Tommy, attaché à ce semblable si fortement qu’une réelle tristesse a perduré dans son
comportement pendant de longs mois. Capable cependant d’être bon compagnon avec un autre semblable à lui imposé. .
Fixant les nuages nombreux, essayant d’arrêter leur course,
je songe à mes propres semblables, parents, compagnons, amis, abstraits de ma quotidienne vision. Les toucher, me serrer dans leurs bras, un instant,
par la pensée. Cela, cette sensation là, me comble d’un doux sentiment. Chassant la mélancolie de ce gris dimanche. Notre mémoire émotionnelle est vive et forte. Rien ni personne ne disparaît vraiment. Si l'on a semé des petites pierres
de lune pour tracer le chemin.
Un extrait d’un texte bouddhiste me revient alors « Dans le cycle de nos existences, au cours de nombreuses renaissances et parfois en une seule vie, tout change continuellement. Il ne
peut y avoir aucune certitude. Même notre bonheur ne fait que passer. Tout ce qui est nôtre est livré à l'impermanence. Rien de ce que nous considérons être réel n'est
permanent. ».
C’est pourquoi nous nous devons à nous-mêmes d’être des infatigables créateurs de liens. Des liens qui nouent délicatement les êtres, mais ne les entravent pas. Pour qu’ils composent une
symphonie mémorielle douce et belle que l’absence même n’effacera pas.