Peut-être avez-vous lu mon billet nommé Hyma la Hyène, où j’évoquais la chronique littéraire mensuelle du magazine Actuel qui au début des années 70 m’ouvrit les portes vers d’extraordinaires lectures. A cette même époque, je fréquentais aussi la librairie Parallèles, fondée en 1972 et implantée au 47 Rue Saint Honoré, dans le premier arrondissement de Paris, tout près des Halles.
Ici dans un gentil capharnaüm de livres, fanzines et magazines, chacun pouvait y trouver ce qu’on qualifiait alors de littérature underground. Des romans bien entendu, d’écrivains américains le plus souvent mais aussi des essais en tous genres, sociologiques, psychanalytiques, politiques ; ou bien des textes antimilitaristes, écologistes évoquant le retour à la terre et les luttes du Larzac, antinucléaires avec les fameux badges jaunes No Nuke… Toute une littérature contestataire, tirant déjà en son temps des sonnettes d’alarmes jamais entendues et qui reviennent aujourd’hui, comme des nouveautés pour certains, mais comme un triste rabâchage pour moi.
Le sérieux savait aussi laisser une place au ludique, les comics américains s’empilaient, les bandes dessinées de Crumb, les exemplaires du magazine Mad, rien ne manquait pour élargir ma culture, loin des poncifs du culturellement correct de l’époque.
Et comme la librairie avait aussi un rayon dédié aux disques - vinyles alors - et cassettes, officiels ou non, le samedi c’était un peu comme jour de marché au village, chevelus, babas cools et faune diverse hantaient les murs de la petite boutique où posters et affiches révolutionnaires servaient de papiers peints.
Aujourd’hui, la librairie est toujours fidèle au poste, je ne la fréquente plus et son côté avant-gardiste s’est envolé. D’un lieu unique à Paris en son temps, où l’on pouvait dénicher du peu connu ou du rare, internet et l’évolution de la société en ont fait une librairie - toujours indépendante à ma connaissance - mais moins unique en son genre.