Cette étude de l’Ecole de médecine de l’Université Washington qui a séquencé et analysé le génome du chat afin de mieux comprendre pourquoi il n’est domestiqué qu’à moitié, révèle des signatures génétiques de la survie de compétences uniques, depuis l’état sauvage. Ces données, présentées dans les Actes de l’Académie des Sciences américaine (PNAS)révèlent, néanmoins, de petites preuves, anecdotiques, de sa domestication.
« A moitié domestiqué », c’est la conclusion du Dr Wes Warren, professeur associé de génétique à l’Institut de génomique de l’Université de Washington et auteur principal de l’étude. Selon l’auteur en effet, le chat domestique moderne ne s’est que récemment distingué ou séparé du chat sauvage. Cependant, il existe, dans son ADN, des preuves de sa domestication.
La recherche de ces preuves prend place dans le programme de recherche plus large des National Institutes of Health (NIH), le cat genome sequencing project, dont l’objectif est d’étudier les maladies héréditaires chez les chats domestiques, similaires ou proches dans certains cas, de celles qui peuvent toucher les humains, dont certains troubles neurologiques et quelques maladies infectieuses et métaboliques. Si de précédentes études ont déjà suggéré des changements dans des gènes impliqués dans la mémoire, la peur et la recherche de récompense, les scientifiques ont regardé ici précisément quelles parties du génome sont modifiées en réponse à la vie domestique en compagnie des humains, en comparant les génomes de chats domestiques et les chats sauvages.
Pour obtenir un génome de référence de haute qualité, l’équipe a séquencé le génome d’un chat abyssin femelle domestique dont la lignée était documentée sur plusieurs générations. Ils ont également séquencé les génomes d’autres certains chats domestiques de race pure. Enfin, l’équipe a également comparé le génome de ces chats avec ceux d’autres mammifères dont un tigre, une vache, un chien et le génome humain.
Les spécificités constatées avec cette analyse génomique convergent autour du caractère carnivore de l’animal, avec, en particulier, des caractéristiques génétiques spécifiques liées à la vision et au sens de l’odorat, bien particulières au chat.
· Ainsi, pour digérer leur régime riche en graisses saturées, les chats ont besoin de gènes spécifiques adaptés à ces contraintes métaboliques. Des gènes qui pour certains sont retrouvés également chez le tigre. Certains de ces gènes vont évoluer avec la domestication et l’ouverture à d’autres types d’aliments, mais globalement, la signature carnivore est bien là.
· Les chats ont moins d’odorat que les chiens, donc moins de gènes liés à l’odorat sauf lorsqu’il s’agit de substances chimiques appelées phéromones, qui permettent aux chats de surveiller leur environnement social (et sexuel). Une capacité bien spécifique au chat, plus solitaire, moins facilement enclin à trouver un partenaire, qui là encore se retrouve associée à une signature génétique rémanente.
· Sur la vision également, exceptionnelle à faible luminosité et l’audition qui couvre jusqu’aux ultrasons.
Finalement, la domestication apparait caractérisée par certains traits « secondaires » comme la couleur et la texture du poil, la forme de la tête et certains comportements, comme la docilité, toutes ces caractéristiques pouvant être retracées à travers des signatures génétiques.
En conclusion, les génomes des chats, même domestiques, ont peu changé depuis leur séparation des chats sauvages, même s’il existe quelques preuves génétiques de leur domestication. Le chat domestique reste au fin fond de son génome, un carnivore, solitaire, qui vit plus à l’aube et au crépuscule. Il conserve donc bien ses compétences uniques qui en font un animal difficilement ou jamais domesticable. Ce qui fait d’ailleurs son charme.
Source: PNAS November 10, 2014, doi: 10.1073/pnas.1410083111 Comparative analysis of the domestic cat genome reveals genetic signatures underlying feline biology and domestication (Visuel @ Wikimedia Commons)