Râler, pester, réclamer, gueuler, se plaindre, se lamenter, broyer du noir, l’étaler sur des pages, rien ne va plus, la France non plus, l’économie, la politique, les étrangers, les pas comme moi, ceux que je n’aime pas, les profiteurs, les arnaqueurs, les riches, les trop de chance, les pas assez, les je-sais-tout, les je-cache-tout, le verre vide, le frigo aussi, les ruptures, les jalousies, les maladies, la fatigue, la nausée.
Je n’en peux plus de tout ce noir, partout, le matin quand je réveille les enfants, le soir quand je quitte le bureau, sur les pages des journaux, sur les écrans, dans le coeur des gens.
Alors je me terre, chocolat chaud et chamallows, plaid et tricot. Alors je me repais de leur odeur, de leurs visages dans le sommeil, si loin dans leurs rêves, je me concentre sur leurs joies, leurs exubérances. Alors je me remplis de l’or des forêts quand le gris m’envahit, je me bouche les oreilles et je fredonne, je cours et je respire pour oublier la nuit, les petits soucis et les cailloux dans mes poches.
Plus que jamais m’accrocher à mes lunettes roses. Tout va bien et je vais y arriver. Au printemps, après le gris.