Pour son deuxième film derrière la caméra, Mélanie Laurent (Les Adoptés) adapte le roman éponyme d’Anne-Sophie Brasme et s’attaque à un double sujet de société : le harcèlement moral chez les ados, et les pervers narcissiques.
Charlie est une jeune fille sérieuse et timide, bien intégrée et bien entourée. Elle voit de loin sa mère se faire manipuler par son père, sans oser réagir. Un jour, une nouvelle arrive au lycée : elle s’appelle Sarah, elle dit revenir du Nigeria où sa mère travaille comme humanitaire. Une amitié se forme vite entre les deux jeunes filles, qui devient vite fusionnelle, au point que Charlie en délaisse ses amis de longue date. Jusqu’au moment où la vraie personnalité de Sarah se dévoile peu à peu …
Avec son sujet, Mélanie Laurent était bien partie. Psychologie de comptoir pour certains, fait de société pour les autres, les pervers narcissiques, malgré la masse d’articles qui en parle, est peu présent au cinéma. Quant au harcèlement moral, il est devenu l’une des préoccupations majeures de l’Education nationale, et il est souvent présent en filigrane dans les fictions adolescentes. Dans tous les cas, le scénario était ambitieux, et avec deux jeunes actrices aussi talentueuses que Joséphine Jappy et Lou de Laâge, on pouvait attendre un très bon long-métrage.
Mais le film manque de subtilité. Et la subtilité, dans une histoire comme celle-ci, est essentielle. La perversion de Sarah est visible si vite, et de façon si évidente, qu’on ne peut que se demander pourquoi Charlie se laisse embrouiller. On passe trop rapidement d’un état de leur relation à un autre, et cela empêche de se laisser bouleverser.
Respire est certes intense, et met parfois mal à l’aise. Certaines scènes sont d’ailleurs bien vues, comme quand Charlie comprend que l’on parle d’elle : la paranoia monte, comme dans beaucoup de situations de harcèlement moral. Mais il manque l’élément subtil qui provoquerait une véritable gêne. Au lycée, l’escalade est trop rapide et perd en crédibilité. On pourrait s’étonner de l’absence du corps professoral. mais là, le film est plutôt bien vu : les adultes réagissent rarement dans des situations de harcèlement. Pourtant, Charlie n’est pas seule, sa famille et ses amis la soutiennent. Son comportement est alors d’autant plus étonnant.
Les défauts de la réalisation sont en partie compensés par le talent des jeunes actrices. Mélanie Laurent a écrit son scénario avec les photos des deux jeunes femmes devant elle. Les rôles leur vont comme un gant. Lou de Laâge interprète parfaitement ce type de personne vénéneuses et fascinantes comme on en a tous connu, surtout au lycée. Joséphine Jappy est irréprochable dans le rôle de Charlie, et permet de s’identifier en partie au personnage.
Mais le film reste trop sage, par rapport au drame bouleversant que l’on aurait pu attendre. La réalisatrice connaît-elle trop son sujet ? On croirait presque lire des articles sur les sujets dont il est question. Respire partait d’une bonne intention. Il aurait mérité plus de subtilité et de relief.
Respire. De Mélanie Laurent. Avec Joséphine Jappy, Lou de Laâge, Isabelle Carré, Claire Keim, Carole Franck, Thomas Soliveres, Roxanne Duran, …
Sortie le 12 novembre.