Thomas nous parle aujourd’hui du retour (déconcertant) des Pink Floyd, avec la sortie d’un nouvel album (surprenant), The Endless River.
Un nouvel album de Pink Floyd, voilà quelque chose d’inattendu, 20 ans après The Division Bell, et 6 ans après le décès de Richard Wright, le claviériste. Même que ce dernier joue sur l’album. Un producteur malhonnête qui aurait décidé de sortir sa pelle et s’amuserait à fouiller des tombes ? « Oh Richard Wright ! Oh Pink Floyd ! Oh la créativité de The XX ! ». Et bien non, c’est David Gilmour himself qui a décidé de finaliser des chutes de studio de The Division Bell, plus précisément The Big Spliff (ou du moins une partie), un album ambiant enregistré au même moment et qui n’a jamais vu le jour. Bon, si ces morceaux avaient été mis de côté, il y avait peut-être une raison, mais en tant qu’impie qui place The Division Bell presque au sommet de la discographie de Pink Floyd, ça commence à m’intéresser.
20 heures de bandes à sélectionner, réarranger, modifier, reprendre… Au final 18 morceaux réunis en 4 segments pour un total de 52 minutes, voici, The Endless River. Une rivière infinie, c’est un peu l’impression qu’on doit avoir lorsqu’on se retrouve à écouter 20h de jam de Pink Floyd. C’était aussi les dernières paroles du groupe puisque High Hopes concluait The Division Bell par « The Water Flowing / The Endless River / Forever and Ever ».
Premier morceau, Things Left Unsaid…. Une nappe de synthé (forcément, c’est un album hommage à Richard Wright), quelques intrusions de guitare, puis une transition amène sur It’s What We Do, enchaînement est parfait, le reste des instruments arrivent et le père Gilmour sort ses gimmicks habituels. Instru’ planante soulignée par une guitare qui s’envole pour un oui ou pour un non, vous avez demandé un album de Pink Floyd dernière période ? Ne bougez pas, vous allez être servis.
Après cette première partie servant de longue intro aérienne à base de « Hey, tu te souviens de nous ? », le second segment se montre plus rythmé avec un Nick Mason en grand forme (Sum), prenant même place au centre de la composition (Skins). Gilmour sort le grand jeu, laissant cette fois plus de place à ses riffs (Sum) et de son côté Wright a le champ libre sur Unsung. Voilà, tout le monde s’est présenté, les choses sérieuses peuvent commencer avec Anisina, un titre qui n’aurait pas fait tache sur The Division Bell s’il avait eu des paroles.
Car oui, à la moitié de l’album, toujours pas de chant. Bon, il y a bien eu quelques chœurs, mais c’est tout. On est en présence d’un album ambiant certes, mais aussi de vagues idées qui n’ont pas été développées, on trouve un riff, un thème, on fait tourner pendant deux minutes, et vingt ans plus tard on essaie de faire coller tout ça. Le troisième segment en est le parfait exemple, sur les 7 morceaux, seul le dernier dépasse les 2 minutes. Alors oui on peut le voir comme une seule pièce de 14 minutes qui aurait tendance à jouer aux montagnes russes, mais certains thèmes auraient mérité à être travaillés plus longuement. Surprise, Talkin’ Hawkin’, la fin du segment contient des paroles (un sample de Stephen Hawking), 3 minutes 25 qui s’envolent doucement vers un climax. Là encore il semble que le groupe ait laissé de la place pour le chant mais Gilmour reste muet. Peu importe, ce final m’a fait frissonner.
Quatrième et dernière partie, on commence à connaitre la recette, un morceau ambiant (Calling), un riff hypnotique répété pendant trois minutes (Eyes to Pearls), un tremplin (Surfacing) pour préparer à un titre avec un format chanson (Louder Than Words), et voilà, c’est fin… Attends, du chant ? Et là se pose un phénomène comique, après avoir attendu un morceau chanté pendant tout l’album, ma première réaction à l’écoute de ce dernier titre est « c’est totalement dispensable, ils avaient vraiment besoin d’un single pour passer en radio ? ». Bon, au fil des écoutes, il finit par trouver sa place dans l’album, mais il est marrant de voir que je m’étais si rapidement habitué à ces instrumentaux plus ou moins construits…
Alors, pourquoi écouter un nouvel album de Pink Floyd en 2014, alors que n’importe quel groupe peut brancher une guitare, sélectionner le preset David Gilmour, sortir trois notes en dix secondes et ainsi mimer du Pink Floyd ? Par nostalgie, forcément, écouter de nouveaux morceaux (et sans doute les derniers) du groupe provoque son petit lot d’émotions, mais aussi parce que notre gus avec sa guitare ne fait que mimer là où The Endless River possède ce feeling unique. L’album a beau être un rassemblement de démos parfois brutes de décoffrage, il n’en reste pas moins cohérent du début à la fin, tout semble facile, les morceaux s’écoulent de façon limpide et l’album passe en laissant un sourire béat. Les papys psyché savent parfaitement ce qu’ils font, jouent avec des bandes d’ils y a 20 ans, rajoutent des pistes par-dessus, et le résultat est exactement celui attendu : un album instrumental de Pink Floyd enregistré en 1993 avec le son d’un album de 2014. S’il sera difficile de le recommander à ceux qui ne sont pas fan du groupe (et encore moins à ceux qui n’aiment pas la période Gilmour) à cause de son côté bricolé, les autres doivent absolument y jeter une oreille.