Prendre le temps, c'est mon quotidien depuis mes longues années de retraite, depuis que je vois le jour se lever doucement sur ce ciel d'automne, les gens courir vers leurs voitures ou leurs bureaux, et que je prends mon thé derrière ma fenêtre.
Sagement, dans la vapeur de ma tasse, je feuillette un album de photos, moi, des rares clichés en noir et blanc d'une époque où les sentiments ne devaient pas être montrés sur les images. Je suis là pensive, prise dans mes pensées par mon frère qui essayait son nouvel instamatic. Après tant d'années, je me revois, avec cette jeunesse oubliée depuis si longtemps, cette beauté évaporée.
Quelques pages, des souvenirs, des personnes, des proches, de la famille, des étincelles éteintes, des rappels pour cet évènement, des paroles, des images nettes. Que sont-ils devenus ? ont-ils eu des enfants, je ne les ai jamais revus ? où sont-ils maintenant , elle ma meilleure amie, lui cet ami d'enfance, si élégant ?
Je n'ai pas les réponses, je tourne les pages, un mariage, des enfants, mes enfants, des couleurs apparaissent, des moments, des repas, des coins de nostalgie. Lui, il est là, si amoureux de moi, son regard le dit sur chaque cliché, je le revois, je ressens ses bras sur moi, ses mains pour tenir les enfants, pour jouer avec eux.
Là, je suis sur un banc, il m'avait dit des mots d'amour, j'étais si heureuse.
Tant d'autres pages, un deuxième, un troisième album, des personnes qui ne sont plus là, les anciens, les divorcés, les nouvelles femmes de mes frères, les enfants, les petits-enfants, tant de monde, tant de photos. Je suis un peu perdu, je bois du thé, pour une pause dans une vie qui défile.
Des dizaines d'années entre les premiers et les derniers clichés, des décénnies, je suislà, ah non, ce n'est pas moi, mais ma petit fille, lors d'un shooting pour son travail. Une pose magnifique, elle porte une petite robe noire, vintage, sortie de mes armoires, elle brille de beauté. Elle est superbe.
Le temps passe, transmet notre féminité.
Nylonement