Au risque de me répéter car j'ai l'impression de vous l'avoir dit souvent, je préfère généralement largement, au cinéma, lorsque le fond prime sur la forme, et non pas l'inverse, au contraire de pas mal de blogueurs ciné plus passionnés par la manière de raconter l'histoire que l'histoire proprement dite. Je reconnais que depuis que je blogue, j''ai tendance à vous le sortir souvent, ce gimmick, mais en même temps, il est logique de se raccrocher à quelques balises récurrentes dans les chroniques cinéma,pas vrai?....
En tout cas, deux longs métrages sortis récemment ont parfaitement illustré ce principe, avec deux ( même trois avec un autre vu avant hier) films, largement encensés par la critique institutionnelle, et qui dégage effectivement de très belle qualités formelles et visuelles évidentes, mais au détriment d'un vrai scénario et de vrais personnages auxquels j'ai pu m'attacher.
Je vous parlerai rapidement (je l'espère,du moins) des autres de cette série, mais commençons d'emblée par un long métrage sorti il y a presque un mois et demi et qui faisait partie de mes 10 films les plus attendus de cette année 2014, je veux parler du Saint Laurent de Bertrand Bonello, assurément une de mes plus grandes déceptions ciné de cette année :
Certes YSL était un biopic classique suivant de manière assez traditionnelle le déroulé de la vie d'YSL, il le faisait avec clareté et élégance, et j'avais bien été séduit par le parti pris choisi par Jalil Lespert, celui de tisser un drame sentimental autour de deux hommes, Pierre Bergé et YSL.
Avec le Saint Laurent de Bonello, on s'éloigne totalement du classique et du sentimental : alors que le cinéaste choisit de se concentrer sur une dizaine d'années de la vie de l’artiste, une décade glorieuse et décadente, à la charnière des années 60 et 70, en tente d'approcher les démons intimes du personnage, des démons intimes qui ne constituaient qu'une infime partie du film de Lespert.
La narration se concentre ici davantage sur les écarts, la débauche, la souffrance intérieure du couturier que sur son oeuvre, contrairement à Cloclo par exemple qui arrivait à trouver un bel équilibre entre l'oeuvre et la carrière du chanteur et ses zones d'ombre moins avouables.
Le problème de ce nouveau biopic (qui n'en est du reste pas vraiment un) sur Saint Laurent est que le point de vue singulier sur un homme submergé à la fois par les fulgurances de la création et les démons de l'autodestruction ne convainc jamais vraiment et surtout ennuie bien vite.
Si Bertrand Bonello nous offre un voyage mental visuellement souvent somptueux, car stylisé à l'extrême (offrant quelques 2-3 magnifiques scènes, notamment deux scènes de rencontres en voite de nuit) le récit de Bonello s'attarde trop sur la face la plus sombre d'Yves Saint Laurent sans vraiment réussir à rendre tangible le génie créatif qui habitait YSL.
La longueur excessive du film pourrait rendre l'oeuvre hypnotique et profondément addictive, c'est le but avoué de Bonnelo, mais, à mes yeux, c'est l'effet inverse qui se produit : Saint Laurent version Bonnelo se perd dans les séquences inutiles et incongrues dans lesquelles des personnages pour qui nous n'avons aucune empathie agissent et dialoguent sans que l'on en comprenne le sens.Adaptée
Le long métrage de Bonnelo souffre de bien trop de longueurs, de personnages secondaires absolument sans aucne épaisseur (on regrettra notamment beaucoup que le rôle de l'excellent Jérémie Rénier en Pierre Bergé ne soit pas plus étoffé alors que la Loulou de la Falaise jouée par Léa Seydoux fait plutot peine à voir), et également et surtout d'un choix de montage ambiteux sur le papier mais qui ne fonctionne jamais vraiment : de trop nombreux allers-retours perdent le spectateur qui ne sait jamais trop le contexte et l'époque de la scène qui se joue devant lui, otant ainsi à la scène en question toute intensité émotionnelle.
On se retrouve ainsi avec un certain nombre de scènes interminables qui abusent d'une mise en scène trop systématique (long travelling d'un côté puis de l'autre pendant plusieurs minutes), sans que cela soit n'apporte une plus value à l'histoire.
Tous ces effets de style qui ne s'imposent pas desservent considérablement ce "Saint Laurent", et ce, en dépit de l'incroyable performance de l'écran par Gaspard Ulliel, encore plus étonnant certainement que le Pierre Niney du film de Lespert.
Et pour cloturer ce billet en revnant à la comparaison forcément incontournable avec la biographie de Lespert, si celui ci possédait quelques défauts, j'aimais son côté grand spectacle et finalement assez émouvant, alors que ce Saint Laurent, bien plus conceptuel et cérébral ennuie rapidement bien plus qu'il ne captive et n'émeuve.
"Saint Laurent" de Bertrand Bonello - C'est quoi ce film?