François Hollande s'inflige un exercice télévisuel ridicule et douloureux. Marine Le Pen joue aux gauchistes. Sarkozy se voit en nouveau Berlusconi. Le cirque continue. L'épisode final n'est pas pour tout de suite.
Régalez-vous.
Le cirque de Sarkozy
Entre Bonaparte et Berlusconi, Nicolas Sarkozy continue son cirque. Il a voulu en faire une démonstration de force. Pari réussi. Vendredi, il a rassemblé quelque 4.000 militants Porte de Versailles à Paris, grâce aux fonds de son association d'Amis. Les fans étaient ravis, pas même rancuniers d'avoir du renflouer les caisses du parti pour le sauver de la faillite après la fraude au financement politique par l'équipe Sarkozy en 2012.
Depuis son licenciement de l'Elysée en mai 2012, Nicolas Sarkozy aurait gagné quelque 2 millions d'euros en conférences payées par des institutions financières ou des Etats étrangers.
Ce vendredi 7 novembre 2014 à Paris, quelques journalistes eurent la confirmation que le discours avait été rédigé par Henri Guaino, tout le monde le trouva du coup presque gaulliste. L'ancien président des riches voulait construire le "parti de la France", contre ce gouvernement contre qui "la colère monte".
Il se lâcha pourtant contre ceux qui "abandonnent la langue française". On aurait presque oublié comment cet ancien monarque maltraite la langue de Voltaire à longueur de discours. Sarkozy fustige cette tolérance gouvernementale pour des femmes voilées accompagnant des sorties scolaires; une anecdote maintes fois reprise sur les réseaux sociaux de la réacosphère. Il insista sur "la meilleure définition de ce qu'est un Français écrite par un de nos grands historiens du siècle dernier." Il multipliait les anecdotes et les "bonnes" formules devant une assemblée largement blanche et âgée. "Pour devenir un citoyen Français, il faut adopter un mode de vie français".
Sarkozy avait-il trop lu Eric Zemmour pour confondre le rassemblement national avec ces éructations identitaires ?
Pour faire bonne figure, au moment de la photo finale sur l'estrade, son épouse Carla Bruni s'empressa d'attirer un jeune Noir et une jeune beurette autour de son mari. Il faut montrer qu'on n'est pas raciste, n'est-ce-pas ?
Ce soir-là, Sarkozy se voulait rassembleur. "Laissons s'épanouir les talents dans notre famille politique !" La semaine, deux ouvrages sur lui-même sont à nouveau sortis en librairie. Le premier revenait sur ses casseroles judiciaires. Justement, son ancien conseiller élyséen François Pérol n'a pas terminé son circuit judiciaire. Le parquet de Paris recommande son renvoi devant les juges, à propos de son désignation à la tête des caisses d'épargne en 2010.
Le second ouvrage porte sur ses "off", ces fausses confidences que Sarkozy aime tant faire à des journalistes . La bonne presse publie quelques extraits savoureux. Toute la hiérarchie de l'UMP en prend pour son grade. "A l’UMP, tous des cons". Fillon est qualifié de "loser", un "sans-couille" que Sarko aurait "sorti du caniveau"; Le Maire un "Bac + 18" que "les gens zappent"; Bernard Debré un "emmerdeur"; Xavier Bertrand un "bon à rien" et un "petit assureur de province".
"À force de critiquer tout le monde, une question se pose: qui est-ce qu'il aime, à part lui?" s'interroge Xavier Bertrand.
Sarkozy peut être énervé Son ancien fidèle Fillon est allé quémander à l'Elysée que la justice accélère ses poursuites contre l'ancien monarque. La révélation émane de deux enquêteurs du Monde, samedi 8 novembre.
Les anciens responsables de Sarkofrance ont décidément de curieuses habitudes...
Le Koh-Lanta de François Hollande
François Hollande passe à la télévision, le jour même de son mi-mandat. Les éditocrates sont sévères. Pourquoi en serait-il autrement ? Ils attendent du spectacle, des annonces, du show. Or il n'y eut rien de cela. Ce fut une épreuve télévisuelle. Hollande devrait virer son trop jeune conseiller télévisuel.
"Vous avez vu la popularité qui est la mienne ?" Hollande, 6 novembre 2014A partir de l’année prochaine, "il n’y aura plus d’impôt supplémentaire pour qui que ce soit" jusqu'en 2017, a-t-il promis. Mais cela fait déjà deux fois qu'il fait pareille promesse. Hollande a tourné le dos à sa "majorité" initiale avec son pacte de responsabilité et de solidarité, qui vise l'allègement du "coût du travail" grâce à 41 milliards d'euros de baisse de cotisations sociales d'ici 2017. Le Medef trouve que c'est insuffisant. Il y a toujours un patron français pour témoigner sur les plateaux regretter que nos lois ne ressemblent pas à celles du Bangladesh.
Sur le plateau de TF1, Hollande ne reconnaît rien de tout cela, il est hors sol. Sinistre coïncidence, la Commission européenne table justement, dans ses dernières prévisions publiées cette semaine, sur une réduction de l'écart entre France et Allemagne en matière de coût du travail.
A quand la même comparaison avec la Chine ou le Bangladesh ?
Sur TF1, Hollande promet un coup de pouce pour les chômeurs approchant de la retraite, c'est-à-dire une revalorisation de l'Allocation de Solidarité Spécifique que l'équipe Sarkozy avait supprimée en 2011. Mais on a oublié le rétablissement de retraite à 60 ans à taux plein de juillet 2012, puisque le même Hollande a fait rallonger la durée de cotisations jusqu'à 43 ans, à l'instar de son prédécesseur.
On nous rappelle le mariage pour tous adopté mai 2013, mais il n'excite plus que quelques milliers de réacs obnubilés par les quelque 7.000 mariages homosexuels célébrés en un an.
La mise en scène télévisuelle était totalement improbable: Hollande face à un journaliste, puis quatre Français prétendument "représentatifs" du pays, c'était un face-à-face paraît-il"sans précédent depuis son élection à l'Elysée". On se souvient des Sarko-shows de l'ancien règne: les mêmes qui encensaient Sarkozy lors ces manipulations ridicules fustigent aujourd'hui l'exercice sacrificiel. Sur TF1, Hollande encaisse, rame et subit, sans broncher. L'homme a du courage, mais il reste incompréhensible.
Le cirque médiatique n'a pas changé.
Hollande "n’a pas pris la mesure de la crise démocratique qui frappe le pays" s'inquiètent les écologistes d'EELV dans un communiqué sitôt la fin du show. Mélenchon dénonce "une soirée Medef et monarchique".
Hollande a prévenu qu'il ne se représenterait pas si le chômage progressait jusqu'en 2017. Faut-il qu'il soit optimiste sur son action pour oser faire pareille promesse...
"Si je n'y parviens pas à la fin de mon mandat, vous pensez que j'irai devant les Français?" Hollande.A mi-mandat, quelques journaux s'interrogent sur ces "13% de Français satisfaits" de l'action de Hollande. Commenter les sondages est un virus sans vaccin ni remède. Les sondeurs se préoccupent "spontanément" de l'enfer de François Hollande, ou du retour raté/réussi/raté de Nicolas Sarkozy. Et pour cause, il leur faut vendre de l'enquête, et donc du feuilleton. Préférer la facilité du sondage politique à l'explication des évolutions structurelles du pays, voici le cirque médiatique qui continue, dégoûte et décourage.
Ses participants auront mérité Marine Le Pen à l'Elysée.
Si Hollande triangule sans succès la droite et le centre à coup/coût de pacte irresponsable et d'ode compétitive, Marine Le Pen poursuit son OPA sur les "marqueurs de la gauche". Cette semaine, elle se félicite de "certains" constats de l'extrême gauche.
La démarche ressemble à celle des fascistes italiens des années trente, quand ils célébraient la famille, le travail et la solidarité, à coups d'intimidation des chemises noires et d'éructations identitaires. Marine Le Pen est un fantasme politique: on fantasme sur son efficacité, sa reconversion, sa normalisation. Mais le mal est profond, durable. La blonde présidente va écrire aux Français après son congrès de novembre.
Marine Le Pen n'avait pas lu cette étude d'une université britannique. Au Royaume Uni, l'immigration européenne - y compris d'Europe de l'Est - a rapporté plus de 25 milliards d’euros aux caisses britanniques entre 2001 et 2011.
Un Français djihadiste est tué en Syrie par un drone américain. Le garçon, artificier, faisait merveille, paraît-il, au service du Califat islamique local. Sa mère apparaît en fin de semaine sur les chaînes d'information, totalement voilée, pour expliquer qu'elle n'a pas "éduqué" son fils comme cela.
Combien d'électeurs cette anecdote télévisuelle aura-t-elle rapporté à Marine Le Pen ?
La nouvelle Commission européenne connaît sa première crise. Le consortium des journalistes d'ICIJ publie une jolie bombe, 548 accords secrets, 28.000 pages qui révèlent comment 340 multinationales ont pratiqué une gigantesque évasion fiscale dans ce paradis logé au coeur de l'Europe, le Luxembourg. Le nouveau président de la Commission européenne, désigné le 27 juin dernier, s'appelle Jean-Claude Juncker, il a été premier ministre du Luxembourg pendant deux décennies.
Sans commentaire.
Ami(e) citoyen(ne), tiens bon.
Crédit illustration: DoZone Parody