Comme
prévu depuis plusieurs semaines, Estela de Carlotto a été reçue
hier, au Vatican, par le Pape François, dans son bureau où trône une reproduction de la Vierge de Luján. La Présidente de Abuelas était accompagnée de son petit-fils Ignacio Guido Montoya Carlotto, de ses trois enfants, de ses autres petits-enfants, ainsi que d'une délégation de personnes adoptées
frauduleusement sous la dictature et qui ont récemment, à l'âge adulte, retrouvé
leur identité de naissance.
On
voit que la guidomania qui avait saisi toute la presse argentine en
août, lorsque l'identification de cet homme avait été rendue
publique, a bien régressé. Seul un quotidien national met
l'information à sa une et étonnamment, il s'agit de La Prensa.
Clarín ne parle pas de l'événement. Página/12 (longuement) et
La Nación (plus brièvement) en rendent compte dans leurs pages
intérieures.
Or
l'audience d'hier arrive en soutien de la campagne lancée
conjointement par Abuelas de Plaza de Mayo et la Conférence
Episcopale Argentine pour inviter les chrétiens à parler de ce
qu'ils savent sur ce qui a pu advenir des enfants volés à leurs
parents sous la Dictature de 1976-1983. C'est l'aboutissement d'un long travail de réflexion à la CEA sur l'attitude à adopter par rapport à cette tragédie nationale. En 2012, peu avant l'élection du Pape François, l'assemblée avait déjà voté une initiative pour demander à tous les curés du pays de regarder dans les archives paroissiales s'il n'y avait pas des faits bizarres qui pouvaient être des indices de pratiques clandestines et de fausses déclarations de naissance.
Il est donc étrange que l'information rencontre si peu d'échos dans la presse du jour.
L'Osservatore Romano daté du 7 novembre 2014 a relayé brièvement l'information (en italien).
Dans la manchette de gauche, l'annonce du décès de Alicia Oliveira
Certes il y a aujourd'hui deux autres événements qui croisent la route de François : le décès de la juriste Alicia Oliveira, grande amie personnelle du Pape et courageuse militante des droits de l'homme, qui avait même été révoquée de la magistrature par la Junte militaire qui la trouvait malhonnête et subversive, et la réduction à l'état laïc d'un prêtre criminel argentin (1), condamné à une peine de prison pour des abus sexuels contre des enfants et qui a pu obtenir que sa peine soit commuée en prison à domicile (en Argentine, c'est une forme de liberté à peine et très mal surveillée). Sur ces deux dernières infos, les articles sont plus nombreux : Página/12 et La Prensa parlent des deux, La Nación rend hommage, en une, à Alicia Oliveira et publie quelques commentaires de Elisabetta Piqué sur des nouvelles dispositions canoniques concernant les charges épiscopales (un sujet que n'aborde pas les autres quotidiens). Je n'ai rien trouvé sur Clarín.
Par ailleurs, en français, Radio Vatican a publié un entrefilet. Les médias du Vatican ne sont pas plus loquaces en espagnol.
Le 1er septembre dernier, les médias pontificaux parlaient en espagnol de Alicia Oliveira, dans un article sur les relations du Pape avec trois Alicia argentines, une journaliste à la chaîne télévisée de l'archidiocèse de Buenos Aires (Alicia Barros, auteur d'une biographie du Pape sortie en septembre 2013, une cartonera des bidonvilles et la juge qui vient de passer.(1) C'est le résultat d'un procès canonique qui aboutit à la même décision que celle prise à l'encontre d'un nonce en poste en République Dominicaine, qui a été convaincu de crimes similaires. Il y a quelques semaines, il a lui aussi été réduit à l'état laïc. Sa condamnation pénale, qui dépend entièrement de la justice du Vatican, à cause de l'immunité diplomatique dont bénéficient les nonces, n'a pas encore été prononcée, du moins à ma connaissance.