Je recule chaque jour à écrire sur ce sujet, au fur et à mesure que ce sentiment étrange décline, ce qui est une bonne chose finalement, mais comme j’avais promis un article, je choisis de me lancer… Alors qui a eu son petit baby blues ? J’avais vu le coup venir, d’autant que j’en ai déjà essuyé un. Mais il avait été assez anodin, séquence fleuve sans raison apparente à la maternité juste avant d’en partir, sentiment de vide, vite rempli par de nombreuses visites lors du retour à la maison. Je vois toutefois encore les regards choqués quand je disais que mon quotidien manquait de conversations d’adultes. Qu’est ce qu’elle vient se plaindre celle-là avec son joli bébé sage de ses journées à pouponner ! Malaise, gros blanc. Mais je n’en ai pas honte, je ne me sens pas une mauvaise mère parce qu’une journée avec un nourrisson peut être réellement ennuyeuse, surtout quand ce dernier est très sage : il dormait 20 heures sur 24, se réveillait pour téter, me regardait faire l’imbécile pendant quelques minutes et dormait de nouveau. Oui d’accord il était (et est toujours) magnifique, mais la contemplation ça va cinq minutes (bon allez une heure maxi…) ! Oui mais quand tu dis ça et qu’on te regarde de travers, tu culpabilises. Et tu te sens encore plus mal. C’est le cercle vicieux du baby blues.
@ Rick Kirkman & Jeremy Scott http://babyblues.com/
Alors quand quatre ans plus tard tu remets ça, en te disant que c’est sûrement la dernière fois de ta vie, c’est comme je le présageais assez violent. Dernière grossesse, déjà. Il faut déjà en faire le deuil, même quand comme moi on n’a pas aimé ça, être enceinte. Fini le gros ventre avec quelqu’un qui bouge dedans. Finis les trois mois de congés pour profiter de soi et de ses gosses. Finies les séances cocooning en piscine pour se préparer à l’accouchement. Finies les projections du « quand bébé sera là », surtout quand on ne veut pas connaître le sexe, ce qui amène aussi à faire le deuil de l’hypothétique enfant de l’autre sexe. Finies les attentions de tout le monde sur ta santé (quand t’es plus enceinte, les gens s’en tapent que tu sois crevée à longueur de journée !). Finie la sensation d’être bien dans ses fringues, sans avoir à rentrer le ventre, pouvoir mettre des robes moulantes, etc… Cette semaine j’ai rangé mes fringues de grossesse. Le retour des larmes n’était pas loin. Renoncer à son gros ventre ne passe pas forcément par la case poubelle (et j’avoue que je suis tellement bien dans ce jean que même si il est lâche je le mets encore…) ! J’ai aussi déjà dû remiser certains de ses pyjamas. Derniers pyjamas en taille naissance. Se dire que toutes ses premières fois seront aussi nos dernières en tant que jeunes parents…
Dernier accouchement ensuite. Aussi étrange que ça paraisse, cette étape atroce de la fin de grossesse a malgré tout dans son intégralité une grande importance dans le cycle du bonheur. Elle marque la rencontre avec bébé mais aussi un moment intense qui restera à tout jamais entre toi, le bébé, et le papa si il y assiste. Pour ma part, ce moment est allé tellement vite que je peine déjà à me rappeler certains détails. Mauvaise mère. Derniers moment où tu n’as que ça à penser que de prendre bébé dans tes bras puisqu’on s’occupe de toi à la maternité.
Et puis quand c’est le deuxième, force est de constater que c’est tout de suite moins l’événement. Alors que c’est autant de chamboulements dans ta vie que le premier enfant, voire plus car il faut aussi apprendre à vivre à quatre, les gens, encore eux, y accordent mois d’importance. Il savent que tu connais déjà, donc je ne sais pas s’imaginent sûrement que comme tu as déjà vécu le truc c’est un événement moindre. Sans compter ceux qui adorent les bébés, mais qui depuis ton premier ont eu les leurs, et donc s’en foutent un peu que toi tu aies mis au monde une nouvelle merveille. Moins de visites donc (bien sûr les plus proches sont là, comme toujours et heureusement), à la maternité et au retour à la maison. Parce que toute seule toute la journée dans une chambre de maternité, ça aide pas à prévenir les larmes. Et ce malgré ce bébé si parfait. Ce bébé si parfait : Alors pourquoi tu pleures ? C’est vrai ça pourquoi je pleure ? J’ai mis au monde la huitième merveille du monde, et je pleure. Mauvaise mère. Tu commences bien. Donc tu culpabilises. Donc tu re-pleures. Encore ce cercle vicieux.
La sage-femme m’a dit lors de sa visite dans le cadre du PRADO (programme de retour à domicile, une initiative qui aide vraiment pour le coup sur ce genre de sujet), d’être vigilante au fait que ça ne dure pas, quelques jours ça va, mais attention si ça continue. C’est passé, je pense, même si je sens encore des risques de rechute. Ceci dit les hormones doivent avec l’allaitement être encore un peu déréglées…
Il faut dire qu’un bébé qui pleure beaucoup ça n’aide pas. Les coliques, à mon avis. Les pleurs inconsolables / inexpliqués, qu’ils disent. Rien n’a faire paraît-il. Calmosine, eau de chaux, ostéo, tisanes au fenouil, j’en passe. Autant d’espoirs qui se traduisent finalement par des hasards. Et Mini Monsieur qui se tortille, semble souffrir, et moi qui ne peux rien faire. Mauvaise mère. « Ça c’est parce-que tu l’allaites », « C’est bizarre, moi les miens me l’ont jamais fait, ça », « Je te l’avais dit, au deuxième c’est plus dur ». Les gens, encore et toujours. Les sons de cloche et autres commentaires divers et variés auxquels après deux grossesses , deux accouchements et deux enfants je ne me fais toujours pas. Et tout ça pourquoi à l’arrivée ? Pour que mon petit bonhomme continue à me donner l’impression qu’il a mal, même si c’est entre deux sourires, même si il est en excellente santé. Et pour rajouter une bonne dose de culpabilité à ce sentiment d’impuissance qui se greffe déjà sur le baby blues.
Tout ça pour dire qu’on n’en parle pas vraiment. Non ce n’est pas grave, non il ne faut pas culpabiliser. Mais si les gens, encore eux, étaient plus vigilants, je suis sûre que pas mal de dépressions post-partum pourraient être évitées. Car de l’un à l’autre il n’y a qu’un pas. Fort heureusement je ne l’aurai pas franchi. Et maintenant j’ai plutôt la pêche, malgré la fatigue, malgré un certain désemparement face à ses pleurs. Je sais que ça finira par déteindre sur lui si je ne culpabilise pas, si je ne stresse pas, si je ne déprime pas. Mais non ce n’était pas rien. C’était difficile.
Et toi alors, tu l’as surmonté comment ?