Je n’ai pas porté plainte et je vous emmerde

Publié le 05 novembre 2014 par Juval @valerieCG

Lorsque j'ai lu ce texte dans sa version originale, je l'ai trouvé extraordinairement puissant, extraordinairement vrai. Je me suis dit qu'il était essentiel qu'il soit traduit en français. FlashSteelers a donc demandé l'autorisation et l'auteure et l'a traduit. CaCtus a fait la relecture de la traduction. Merci encore à l'auteure de nous avoir donné son accord pour la traduction et la publication et surtout merci pour ses mots ; on espère tous trois que la traduction ne les trahira pas.

Voici donc le texte.

J'ai pas que ça à foutre. Je travaille à plein temps pour un boulot exigeant. J'ai deux gosses. Leur père ne les voit jamais et ne paie pas de pension. J'ai un salaire décent, équivalent à ce que deux parents travaillant chez McDonalds pourraient gagner. Rendez-vous chez le dentiste, entrainements de foot, match tous les samedi (c'est à mon tour d'apporter les oranges cette semaine), réparations sur la voiture, ma propre santé (hernie discale), je suis à cours d'arrêts maladie, journée de recyclage, la santé émotionnelle des enfants, les aider avec les devoirs le soir, plus de crédit sur mon portable, un des enfants a besoin d'un appareil dentaire, trouver un moyen de rembourser le prêt étudiant, sans oublier les tickets de bus, je devrais faire plus de sport, garder la maison propre, il est grand temps de faire un vide-grenier, l'assurance auto, déposer un des enfants à l'école à 7h30 deux fois par semaine, s'assurer d'avoir de quoi faire à déjeuner, tickets de bus, épicerie, planifier les diners, payer les factures, ratisser les feuilles, rentrer du bois pour le feu, bon sang j'ai encore oublié d'acheter des ampoules, les réunions parents-profs, Noël qui approche...

Donc, je suis allée à un rendez-vous et ce putain de connard de dragueur vulgaire m'a violée. Je l'ajouterai à la liste des misogynes violents que j'ai rencontrés. Je l'ajouterai à la liste des hommes qui m'ont agressée et ont abusé de moi depuis mon plus jeune âge. Le premier, j'avais 5 ans - il était babysitter. Par où je commence si je vais au commissariat porter plainte ? Je leur dis, quand j'avais 12 ans et que je devais passer devant le site de construction chaque jour pendant 4 mois, que j'étais malade de peur et de dégout à cause des hommes qui me dévisageaient et me provoquaient ? Je leur raconte, la fois où, à 18 ans, ce mec plus vieux dont j'étais amoureuse a soudainement décidé que ce serait excitant de me gifler quand on "faisait l'amour" ? Est ce que je leur parle des viols que j'ai subis à l'Université de Carleton en 1991 ? Putain j'ai quarante ans. Où ça commence ? Où ça s'arrête ?

Je n'ai pas "peur" d'aller voir la police. Je n'ai pas peur de "revivre le traumatisme" - je le vis tous les jours. Je n'ai pas peur qu'ils ne me croient pas, ou qu'il me jugent et me scrutent. Je sais que c'est différent pour chaque femme et je comprend que beaucoup se méfient à juste titre de la police.Mais moi ? J'ai pas que ça à foutre. Bordel, des trous du cul se la coulent douce en étant des connards flippants, et c'est moi qui devrais changer ma vie ? Et donner mon NOM à vous tous, les sacs à merde d'internet et autres apologistes du viol ? Non merci. Qui je suis n'est pas le putain de problème des connards fouineurs que vous êtes. Ce n'est pas de ma responsabilité de répondre aux agressions d'une manière qui va satisfaire toutes les bouses dans votre genre. C'est à vous - à nous tous - de vivre comme des êtres humains décents, putain, et d'arrêter d'être des tas de merde les uns pour les autres.
Je vous emmerde.

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