Trois ans de prison dont 18 mois avec sursis requis contre l’ex-responsable administratif de l’office de tourisme. La défense a plaidé la relaxe. Jugement en délibéré
Éric Cianciarullo assure la défense d’Olivier Jobit.
© Photo xavier léoty
Publié le 05/11/2014par Pierre-Marie Lemaire
La pagaille érigée en principe de gestion. Une désorganisation quasi structurelle. Et personne à la barre du navire en perdition. Ce « Costa Concordia » à la sauce associative, c'est l'office de tourisme de La Rochelle. Du clinquant, des lumières, tout le monde s'amuse sur le pont pendant que le navire coule. Le président Pierre Constant était présent hier à l'audience correctionnelle du tribunal de La Rochelle. Son prédécesseur, Jean-Luc Labour, aussi. Leurs oreilles ont dû siffler pendant les plus de sept heures qu'ont duré les débats. Salariés, administrateurs, collaborateurs…, les dépositions, que lit la présidente Estelle Lafond, décrivent toutes un univers opaque derrière les vitres transparentes du quai Simenon.
La comptabilité ? Connaît pas. Les archives ? Y en a pas. Les contrats de travail ? ça dépend. Les recrutements se font « par cooptation ». Des stagiaires touchent leur salaire en retard, d'autres sont payés deux fois plutôt qu'une. De toute façon, les feuilles de paye sont rarement conformes à la législation. Le président signe en confiance les documents qu'on lui tend. Les plus gentils parlent d'une « gestion à la papa » entre amis. Les autres, de foutoir généralisé.
« À l'office de tourisme, tout était possible ! », s'exclame la procureur, Dominique Chevalier. Tout, et surtout les faux grossiers et les détournements dont s'est rendu coupable à ses yeux Olivier Jobit. Avec un nouveau président, Pierre Constant, qui apprenait le boulot (et qui l'a appris vite) et un directeur, Christophe Marchais, plus efficace dans la communication que la gestion, le « responsable du pôle administratif » avait les coudées franches.
Pas de justificatifs
Olivier Jobit a changé de défenseur - Me Cianciarullo succède à Me Andouard - mais pas de défense. Il n'a rien fait, il n'est coupable de rien. Les 116 000 euros qu'il se serait mis dans la poche en trois ans, ce sont des notes de frais, des remboursements d'avances. « Pour 3 000 euros par mois ? Le double de votre salaire ? », s'étrangle Dominique Chevalier. « Avec vos fonctions, vous n'aviez pas de tels frais de mission ! » Malheureusement, factures, justificatifs, ordres de mission, les enquêteurs n'ont rien retrouvé.Quant aux faux bilans, faux budgets prévisionnels, faux état des comptes qu'Olivier Jobit a produits aux banques comme aux dirigeants de l'office pour masquer ses malversations supposées et la situation financière catastrophique de l'association, il n'y est pour rien. C'est une erreur matérielle. Ou de logiciel. C'est le président qui n'a rien compris. Ou le directeur. Voire la faute de l'aide-comptable, décédée en octobre 2013 d'un cocktail détonant alcool plus médicaments. La veille, elle s'était plainte auprès de Christophe Marchais d'une charge de travail de plus en plus insupportable pour son modeste temps partiel à 898 euros.
À 22 heures hier, l'audience n'était toujours pas terminée. Nous en rendrons compte dans notre prochaine édition. La procureur de la République a requis 3 ans de prison, dont dix-huit mois avec sursis, contre Olivier Jobit. Plus une interdiction de gérer ou de s'occuper d'une association.
Partie civile, l'office de tourisme a demandé le remboursement des sommes détournées, ainsi que 70 000 euros pour son préjudice moral.
Le jugement devrait être mis en délibéré.