L’agglomération de Saint-Etienne relève le défi des pratiques collaboratives à travers le design. Par Emmanuelle Gallot Delamaizière.
Design participatif paru dans Traits d’agence
Transport, consommation, travail, projets urbains, NTIC… Les pratiques collaboratives impactent l’ensemble de la société. Elles apparaissent comme des alternatives aux systèmes productif, politique et décisionnel traditionnels ébranlés par la crise. Elles amènent à réinterpréter le lien social, le rapport à l’usager, les modalités de diffusion de l’information et de l’expérimentation. Elles inspirent désormais les collectivités locales, àl’image de Saint-Etienne et de la mise en œuvrede sa stratégie de développement positionnantle design comme levier écono- mique, mais aussi territorial et social, dans le cadre de démarches pilotes mettant au cœur des process la co-conception, l’innovation et le partage d’expériences.L'écosystème
La mise en œuvre de cette stratégie semble s’être construite par étapes autour de plusieurs phases successives ou concomitantes : amorce de la dynamique fortement portée politiquement et marquage du territoire par la construction d’objets architecturaux singuliers; acculturation du milieu local – politique, technique, économique – par le projet ; quête de visibilité extérieure et démarche de marketing territorial… Elle a de plus bénéficié de la concordance de plusieurs éléments moteurs : la présence historique d’une école supérieure d’Art et de Design ; la création
d’un centre d’innovation et de recherche, la Cité du Design, avec ses dispositifs d’accompagnement spécifiques Living Lab ou Laboratoire des usages et pratiques innovantes ; une source de financement des projets permise dans le cadre d’un Grand Projet Rhône-Alpes ; une reconnaissance et une ouverture aux réseaux extérieurs acquises à travers la Biennale, l’adhésion au réseau Unesco « villes créatives » ; l’intégration par la collectivité d’une fonction de design management dans la conception et le déploiement des politiques publiques.
La création d’un véritable écosystème autour du design
L’ensemble de ces paramètres permet de construire un véritable écosystème local autour du design, susceptible d’être source d’attractivité. Un des défis à surmonter aujourd’hui est sans doute l’appropriation de cette dynamique par les habitants. Depuis cinq ans, des expériences innovantes de col-laboration collectivité/habitants usagers sontmises en place, réinterrogeant les manières de concevoir le projet et la prise en compte de la participation citoyenne. Elles s’articulent autour du design de service public et du design participatif et visent à positionner le territoire stéphanois comme un laboratoire d’expérimentation dans la prise en compte de l’innovation par les usages.
Les collectivités locales dans la boucle
Depuis 2013, les collectivités locales se sont saisies du design pour réinterroger la place de l’innovation dans leur fonctionnement interne. La démarche s’est focalisée sur la prise en compte de l’usager, à la fois raison d’être des services et élément suffisamment fédérateur et consensuel pour impulser le changement. Elle s’est déclinée en projets prenant en compte la notion d’expertise d’usages pour améliorer la fonction d’accueil d’un lieu public, avec le projet « Hôtel de ville de demain » et en actions de réflexion collective autour du design d’action public comme les « Managériales », « Ré-enchantez l’action publique» ou « la Manufacture d’action publique ».
Démocratisation culturelle
Depuis 2010, plusieurs projets participatifs à l’initiative des institutions locales ont vu le jour. Ils visent notamment la création d’espaces publics éphémères comme la « Cartonnerie » co-construite par et pour les habitants, ou pérennes comme l’aire de jeux du Parc François Mitterrand réalisée en collaboration avec le Conseil municipal des enfants.
Ils contribuent à la rénovation par étapes d’écoles stéphanoises en faisant travailler côte à côte équipes pédagogiques, enfants, designers et services techniques municipaux dans le cadre de « Je participe à la rénovation de mon école ». Ils investissent les quartiers « en creux », ne bénéficiant pas de l’éclairage de grands projets urbains, en associant les compétences design à l’élaboration de projets co-conçus avec les habitants dans le cadre des conseils de quartiers (Design dans les quartiers). Des projets qui permettent également une démocratisation culturelle du design auprès des Stéphanois.