Après 20 vingt derrière les barreaux, Pierre Martino retrouve la liberté. Trompé par sa femme, il avait voulu l’assassiner avec son amant dans l’hôtel où ils avaient l’habitude de se retrouver. Mais il s’était trompé de chambre et avait tué un autre couple avant de blesser un des policiers venus l’interpeller. Libéré pour bonne conduite, le prisonnier modèle n’a rien oublié et il est bien décidé à terminer la mission qu’il n’avait pu achever deux décennies plus tôt. Et comme entre temps son ex s’est mariée avec l’amant, il imagine que la tâche n’en sera que plus facile. La vengeance est un plat qui se mange froid mais que l’on peut parfois avoir bien du mal à digérer…
Un récit tenant à la fois du polar rural, de la chronique sociale et de la comédie de mœurs. La nouvelle famille de l’ex-femme est beauf jusqu’au trognon, vivant de rapines dans une maison délabrée en pleine cambrousse. Père, mère, enfants et grands-parents dorment sous le même toit, vident les bouteilles à l’unisson et jurent comme des charretiers. Un quart monde décrit avec humanité et sans misérabilisme. C’est sordide mais jamais cynique, Rabaté n’étant pas du genre à se mettre au-dessus de ses personnages. Et c’est aussi très drôle, tant grâce aux dialogues plein de gouaille qu’aux péripéties pathétiques vécues par cette bande de pieds nickelés ingérable. Le cocu assassin est quant à lui un antihéros aigri et déterminé, tendant méticuleusement et patiemment la toile qui doit lui permettre de prendre sa revanche. Tellement déterminé qu’il en deviendrait presque sympathique et que l’on souhaiterait de tout cœur le voir mener à bien son entreprise.
Si ce linge sale est bien du Rabaté pur jus, je n’en ferais pas mon préféré. Dans la même veine, Crève saucisse et La marie en plastique m’avaient plu davantage. Ici, la fin, grinçante à souhait, est bien trouvée mais le reste est par moment poussif. Il faut dire aussi que j’ai eu beaucoup de mal avec le trait particulièrement naïf de Sébastien Gnaedig qui ne sert pas au mieux le scénario, c’est le moins que l’on puisse dire. Une lecture agréable, du bon Rabaté mais pas de l’excellent Rabaté.
Le linge sale de Rabaté et Gnaedig. Vents d’ouest, 2014. 126 pages. 19,50 euros.