Le bois humide de la zone du Testet, un soutien naturel à l’étiage, drainé par la rivière Tescou. C’est là que devrait être construit le barrage de Sivens. / Ph. © Collectif Testet
A Sivens, dans le Tarn, la contestation autour d’un projet de barrage est à son comble. Des affrontements violents ont eu lieu le weekend dernier entre manifestants et forces de l’ordre, provoquant la mort d’un jeune opposant. Aujourd’hui, un rapport d’experts présenté à la préfecture du Tarn juge « de qualité très moyenne » l’étude d’impact qui a précédé le projet de barrage de Sivens. Commandé par le Ministère de l’Environnement et réalisé par deux ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts, le rapport préconise d’apporter d’importantes modifications au projet, dont les travaux ont commencé en septembre.
Destiné à créer un réservoir d’1,5 million de mètres cubes d’eau pour irriguer les terres cultivées avoisinantes, le barrage sera construit sur le Tescou (un affluent de la rivière Tarn). Le but du Conseil général du Tarn, qui porte le projet, est de sécuriser les besoins en eau des activités agricoles dans le secteur, principalement des cultures maraîchères. Or, les auteurs de l’analyse présentée aujourd’hui estiment que ce barrage-réservoir ne bénéficiera qu’à 40 exploitations : c’est la moitié de ce qui était initialement annoncé.
Sur place, 34 hectares ont déjà été défrichés. Les opposants, organisés autour du Collectif pour la sauvegarde de la zone humide du Testet, ont multiplié les manifestations pour défendre les 13 hectares de zone humide menacés par le projet de barrage. Située entre la forêt de Sivens et les prairies naturelles permanentes sur lesquelles sont installés les champs agricoles, la zone humide du Testet est baignée par des eaux très pures qui alimentent un écosystème riche en biodiversité. Elle est l’habitat de plus de 90 espèces protégées dans le département.
L’agrion de Mercure (Coenagrion mercuriale), l’une des espèces protégées habitant la zone humide du Testet. / Ph. Gilles San Martin via Wikimedia Commons – CC BY SA 2.0
En France, l’agriculture consomme 48 % de l’eau disponible
D’après Eaufrance, le service public français d’information sur l’eau, le secteur de l’agriculture consomme 48 % de l’eau disponible dans le milieu naturel, le reste étant partagé entre les collectivités (24 %), la production d’énergie (22 %) et l’industrie (6%). Les besoins de l’agriculture pour l’irrigation des champs varient selon la météo de l’année, se situant en moyenne autour de 2 880 millions de mètres cubes pour l’ensemble des terres agricoles hexagonales.Sur les centaines de barrages présents sur le sol français, environ la moitié sont destinés à l’irrigation. Une cartographie détaillée de tous les ouvrages présents sur les cours d’eaux est disponible sur le site du Ministère de l’environnement.
Les hommes construisent des barrages depuis des millénaires, les premières traces de telles infrastructures remontant à la civilisation égyptienne (3000 ans avant J.-C.). Outre les dégâts écologiques et humains qu’entraîne souvent leur construction – destruction et pollution des écosystèmes, inondation de zones habitées, voire de sites archéologiques (à l’instar de l’imposant barrage des Trois-Gorges, sur le fleuve Yangzi en Chine), ils peuvent aller jusqu’à provoquer des tremblements de terre dans des régions auparavant non sismiques. Cela a été le cas à Monteynard (Ysère) en 1963 (magnitude 4,9) ou à Konya (Inde) en 1967, lorsqu’un séisme de magnitude 6,3 a entraîné la mort de 200 personnes.
publié le 27/10/2014
F.G.http://www.science-et-vie.com/2014/10/contestation-du-barrage-sivens-combien-deau-consomme-lagriculture-francaise/