Dans Paradise Lost, il semblerait que personne n’échappe à Pablo Escobar. Et pourtant le film a bien du mal à simposer car derrière certains aspects passionnants se cache une histoire sans grand intérêt et c’est bien dommage. Une déception.
Le jeune Nick débarque en Colombie avec son frère et rêve d’y devenir prof de surf. Il tombe rapidement sous le charme de Maria et il deviennent vite inséparables. Mais la jeune femme est également la nièce du patron de cartel le plus intelligent, mégalo, violent, du pays, Pablo Escobar. Rapidement, il va arriver à se faire une place dans cette nouvelle famille … mais à quel prix ? et est-il vraiment accepté par son oncle ? Voilà l’histoire de Paradise Lost, mêlant à la fois des éléments de fiction et de réalité pour offrir un film qui réfléchit sur la folie d’un homme de pouvoir, à l’instar du Dernier Roi d’Ecosse.
On sent d’ailleurs bien qu’Andrea Di Stefano (dont c’est le premier film en tant que scénariste et réalisateur) s’est bien documenté sur Pablo Escobar, ressortant régulièrement de véritables faits sur sa vie privée, sa résidence et son mode de pensée. Il se montre particulièrement audacieux en ne montrant jamais frontalement le trafic de drogue (car partant du point de vue de Nick), mais va constamment se pencher sur la personnalité de ce patron de cartel se prenant pour Dieu et régnant sur la Colombie. Le portrait qui est fait de cet homme, qui peut se montrer adorable avec a famille et en même temps impitoyable dès que l’univers qu’il a construit est menacé, est très intéressant.
Il faut dire que le réalisateur a l’occasion de diriger l’une des seules personnes qui étaient capables de jouer Pablo Escobar, à savoir Benicio Del Toro. L’acteur est, comme à son habitude, impressionnant et imprévisible. Il apporte à son personnage autant d’humanité que d’inhumanité, et montre ainsi plusieurs facettes fascinantes qui nous donnent bien envie de plonger plus amplement dans la psyché et l’histoire d’Escobar.
Malheureusement, malgré tout l’intérêt du personnage et la découverte progressive de sa personnalité effroyable, le film est plombé dès le début par les cinq premières minutes qui évoquent déjà en flash forward tout ce qu’il va se passer à la fin. L’intention de l’auteur était d’évoquer les tragédies grecques montrant un élément clé et nous interrogeant alors sur la manière dont on va y arriver. Mais ici, ça ne fonctionne pas et savoir ce qui va arriver ne nous fait qu’attendre sagement ce moment fatidique, car en attendant, il n’y a rien de surprenant. Aucun événement ne va nous dévier de l’histoire, aucune surprise n’est là pour apporter un peu de tension ou de suspense. En plus de cela, ces scènes nous décrivent déjà la manière de penser d’Escobar et notre découverte progressive du personnage, de sa lumière à son ombre, n’a donc plus aucun intérêt. Ce choix maladroit pour débuter le film va donc nous porter préjudice tout le long, attendant que les séquences clés se déroulent sans grand mystère.
Par ailleurs, si on s’identifie facilement au personnage de Nick qui est un peu passe-partout et si quelques scènes avec Benicio Del Toro sont bien écrites (celle de la chambre est un excellent moment d’échange entre les 2 personnages), jamais on ne sent d’ampleur dans le film qui est très resserré sur certain moments de ces 2 protagonistes. En effet, beaucoup d’éléments sont survolés. Le point de vue de Maria qui aurait pu apporter plus d’émotion et de choc (car faisant partie de la famille proche d’Escobar) est purement ignoré (et on ne parle même pas de la rapidité de l’histoire d’amour), et le frère pourtant joué par Brady Cobert est presque ignoré alors qu’il aurait pu faire naître plus de moments de tension. La galerie de personnages secondaires n’est jamais exploitée alors qu’il y avait pourtant de la matière à créer une grande fresque.
Cela dit, malgré ses défauts, il faut se rappeler que Paradise Lost est un premier film et à ce niveau c’est tout de même déjà louable d’arriver à livrer un film tout de même assez osé (on verra des morts et il n’y aura peut-être pas de happy end) avec de belles scènes d’échanges entre les personnages et un troisième tiers centré sur l’action un peu plus efficace. Mais vu le sujet prometteur, c’est tout de même une déception.