Les législatives en Ukraine : quelles conséquences ?

Publié le 02 novembre 2014 par Vindex @BloggActualite

Bonjour à tous
Dans notre feuilleton Ukrainien une nouvelle étape s'est jouée le 26 octobre 2014 : il s'agit des élections législatives pour renouveler la Rada dans un contexte de tensions au sein de l'Ukraine entre les pro-européens et les séparatistes Russes qui ont occupent une partie Est du pays suite à l'annexion de la Crimée par la Russie.Il est donc intéressant de se pencher sur les conséquences possibles de ces événements sur la suite de la crise Ukrainienne, tant au niveau national qu'international.

Les élections

Les élections auxquelles nous avons affaires sont très particulières puisqu'elles se déroulent dans les faits en deux étapes... 
Le 26 octobre
Le 26 octobre avaient lieu les élections officielles, celles organisées par l'Etat Ukrainien et censées se dérouler sur tout le territoire ukrainien. D'après les observateurs internationaux, et notamment ceux de l'OSCE, celles-ci ont satisfait les exigences démocratiques à part quelques incidents isolés. Ces élections sont reconnues par la Russie, qui par le biais de Sergueï Lavrov, ministre des Affaires Etrangères, a exprimé sa satisfaction. Néanmoins, malgré ces apparences, les élections ne sont pas complètement satisfaisantes. En effet, elles ont recueilli un faible taux de participation : 52,42 pour cent. De plus, elles n'ont pas pu avoir lieu dans tout le pays. Les parties orientales de l'Ukraine n'ont pas pu voter du fait de l'occupation pro-Russe qui a d'ailleurs de sa propre initiative fixé des élections le 2 novembre. 
Les résultats de ces élections furent sans appel : les partis pro-occidentaux sont sortis larges vainqueurs : Le Front Populaire (du premier ministre Arseni Iatseniouk) a obtenu 22,17 pour cent des suffrages exprimés tandis que le Bloc Porochenko (du nom de l'actuel président) a obtenu 21,81 pour cent. Le Bloc d'Opposition, mené par les anciens du Parti des Régions (donc favorables à l'ancien président Ianoukovicth) n'a obtenu que 9,37 pour cent. Ces résultats furent malgré tout accueillis favorablement par la Russie qui s'est réjouie de la victoire des partis modérés mais a pointé l'entrée à la Rada du parti Radical (des nationalistes). 
Le 2 novembre
La deuxième étapes des élections ukrainiennes se joue à présent dans la partie orientale du pays. En effet, ce dimanche est le jour choisi par les pro-Russes pour organiser les élections dans les Républiques de Donetsk et de Lougansk. Elles ont pour enjeu l'élection des présidents de ces régions. Comme pour l'ouest ukrainien, il n'y a pas de suspens quant à l'issue du scrutin. En revanche, des problématiques se posent quant à l'organisation et à la réception des résultats au niveau international et pour l'avenir de la crise ukrainienne. 
Dans un contexte de guerre entre l'Etat Ukrainien et les pro-Russes il semble que ces élections se soient faites sans réelle campagne et avec des candidats peu connus face aux candidats proposés par les rebelles. Ainsi, la futur président de la République de Donetsk devrait être Alexandre Zakhartchenko, homme d'affaires de 38 ans, et celui de la République de Lougansk devrait être Igor Plotnitski, ancien militaire de 50 ans. De même, la Russie est la seule à reconnaître la validité de ces élections, rejetée par le gouvernement ukrainien et ses alliés occidentaux. Selon eux, ces élections ne respectent pas les accords de Minsk du 5 septembre 2014 qui devaient servir de base pour le processus de paix. 
Des élections particulières sans surprise ont eu lieu. Mais elles pourraient bien avoir un impact important sur la suite des événements déclenchés par les événements de Maïdan en 2013. 

Les conséquences de ces élections

Selon Petro Porochenko, grand vainqueur des élections avec son premier ministre, les élections du 26 octobre sont très importantes non seulement pour la reprise du rapprochement avec les occidentaux (et notamment l'Union Européenne), mais aussi pour la résolution de la crise nationale. Les occidentaux ont exprimé tout autant de satisfaction le lendemain du 26. Si on ne peut nier les conséquences sur la politique extérieure de l'Etat actuel d'Ukraine, on peut toutefois être plus réservé sur la suite des événements en Ukraine. En effet, le fait d'organiser des élections distinctes dans les deux parties de l'Ukraine entérine un peu plus la situation actuelle de partage entre un est pro-russe et un ouest pro-occidental. Et même si de jure l'Ukraine ne reconnaît pas les élections, elle n'est pas de facto en mesure de les empêcher, de la même manière qu'elle n'a pas pu empêché l'annexion de la Crimée par référendum. La partition du pays pourrait être une alternative de plus en plus crédible si l'on veut éviter un enlisement du pays dans la misère... Si la Russie semblait avoir gagné plusieurs "batailles" dans l'affaire Ukrainienne, les résultats de ces élections sont toutefois mitigés pour elle. Certes, elle a réussi à maintenir son influence sur la partie orientale de l'Ukraine mais à perdu gros à l'ouest, de plus en plus tournés vers les alliés occidentaux. Et cela, elle le reconnaît d'elle-même sans pour autant réussir à convaincre que les élections de l'est sont valides. Pour la paix, les élections n'ont pas été un élément très important puisque dès le 27 octobre, les combats ont repris à l'est. Cela reflète le manque d'influence de l'Etat ukrainien sur la partie orientale de son territoire. Il faut aussi rappeler que même si les européistes l'emportent, ils ne partagent pas les mêmes idées dans tous les domaines : le gouvernement ukrainien devra être une coalition de plusieurs partis. 
Finalement, les élections les importantes seront peut-être celles qui se jouent en ce moment même et qui devraient voir la victoire des pro-russes à l'est. Et sur ces élections, Jacques Sapir pense que les occidentaux (et notamment la France) se sont mise en position de faiblesse. En effet, ceux-ci ont décidé de réfuté la légitimité de ces élections et de ne pas envoyer d'observateurs. Ils seront donc dans l'incapacité de réfuter leur validité, alors que la Russie a elle été plus ouverte en acceptant les résultats du 26 octobre. Jacques Sapir ajoute que les dirigeants occidentaux manquent de réalisme sur la réalité même du pouvoir pro-russe dans l'est ukrainien. Il relativise également le succès des pro-occidentaux qui sont très concentrés à l'ouest du pays et qui fut moins tranchant dans les régions de l'est qui ont voté. De même, face à un taux de participation de seulement 52 pour cent le 26 octobre, il affirme que le taux de participation des élections aujourd'hui se situera aux alentours de 70 pour cent selon des observateurs. L'avenir très proche nous le diras mais cela pourrait bien renforcer le poids de l'est pro-russe dans une Ukraine encore très partagée. 
Il faudra attendre la fin de la soirée et les jours suivants pour en savoir plus. Mais pas plus que les accords de Minsk ces élections ne devraient pas être la clef de voûte d'une résolution du conflit Ukrainien. Le plus inquiétant est que malgré une Russie qui reconnaît les élections à l'ouest, les occidentaux et leur gouvernement en Ukraine n'ont pas voulu reconnaître les élections d'aujourd'hui. Comment dès lors pouvoir espérer garder entier ce pays qui de jour en jour s'enterre dans une guerre civile bien réelle qui ne fait qu'accentuer la division du pays. Face à la réalité, les occidentaux sont trop gourmands et voudraient toute l'Ukraine sans toutefois intervenir militairement contre la Russie, seule option qui pourraient permettre à Kiev de contrôler toute l'Ukraine. A défaut d'avoir toute l'Ukraine, les occidentaux n'auront que la partition de l'Ukraine alors que la solution d'un état fédéral neutre pourrait apporter tellement plus à l'Ukraine qui est en train de tout perdre : sa cohésion nationale et une crise économique toujours plus grande. 
Sources :
Le Monde
RFI
I24 news
Huffington Post
Le Blog de Jacques Sapir
Wikipedia
Vin DEX