"Je voudrais vous parler d’un personnage omniprésent dans la littérature. Un personnage discret et remarquable, connu de tous et mystérieux ; arriviste peut-être, il sait aussi séduire et fasciner. Le chat est ce personnage aux formes multiples, infiniment flexible.Et quand Stéphanie explore un sujet elle le fait avec détermination, rappelant l'intérêt premier de l'animal, plus propre, plus intelligent et plus efficace que la belette ou la fouine pour protéger les récoltes des rongeurs (p. 18). Voilà ce qui fit le succès de ce tigre en réduction qui se trouve être "pseudo domestique" au final.
Comment se douter qu’un être si petit, si familier, avait investi les listes des dramatis personae ? Son animalité, les masques variés avec lesquels il se déplace dans les œuvres ne le rendent pas moins prépondérant dans les romans que dans la poésie ou le cinéma. Prépondérant, mais si délicat à cerner qu’il me fallait en faire un livre. Je n’étais pas au bout de mes découvertes. Se pouvait-il, pour paraphraser Rilke, que je prétendisse connaître les chats avant d’avoir écrit sur eux ? "
Tous les propriétaires de chat souriront à cette évocation : on ne sait pas qui est le maître de qui ... allant jusqu'à avoir l'impression d'habiter chez son chat, lequel est toujours du mauvais coté de la porte qu'il ne supporte pas de voir fermée.
Il aurait servi aux orientaux pour inventer les arts martiaux (p. 35). Rabelais s'inspire de lui comme modèle du juge gras et sadique. Ce sont les Chats Fourrés, Grippeminaud puis Raminagrobis que La Fontaine reprendra à son compte.
Je ne peux pas citer tous les auteurs et personnes célèbres auxquels Stéphanie Hochet se réfère. La liste exhaustive est page 103. Vous y trouverez avec les indications des oeuvres correspondantes, par exemple les noms de Picasso, Rossini, Marcel Aymé, Tennessee Williams, Charles Baudelaire, Colette, Edgar Poe, Natsume Sôseki, Rilke, Balthus ... Léautaud qui en eut 300, sans oublier Garfield créé par Jim David en 1978 et le chat immense de Philippe Geluck.
Les hommes politiques ne sont pas oubliés. A commencer par Richelieu et Mazarin. Mais toutes les personnes citées ne le sont pas pour leur amour des chats. Ainsi Winston Churchill leur préférait les cochons pour leur bonhomie.
Elle ne manque pas de comparer la félinité avec la féminité. Et d'explorer toutes les facettes de la personnalité de l'animal. On rencontre donc le sadique chat de Cendrillon qui retarde l'arrivée au bal de la jeune fille. Et bien entendu le chat du Cheshire de Lewis Caroll et son énigmatique sourire (p. 86).
Il y en a aussi un qui traverse un roman d'Amélie Nothomb, le Fait du prince, comme je m'y attendais après avoir lu Pétronille. On peut se demander si elles vont poursuivre à se citer respectivement dans chacun de leurs ouvrages.
Cet essai, qui est le premier de Stéphanie Hochet, fort réussi aurait tout de même pu nous emmener plus loin. Disons qu'il se termine ... en queue de chat.
A cet égard je signale la reprise de la pièce de Feydeau, Chat en poche, aux Artistic Athévains du 4 novembre au 31 décembre 2014.
Eloge du chat de Stéphanie Hochet chez Léo Scheer