Voici le récit de mon dernier ultra de l’année, il ne s’est pas passé comme je l’espérais, je ne regrette pas grand chose sur ma gestion de course, je regrette juste que les organisateurs est fait passer cet ultra pour une promenade de santé alors que c’est la course la plus dure et technique que j’ai pu faire, et oui l’ultra draille à coté c’est Oui Oui au pays de bisounours.
Avant course
Jeudi direction Argeles avec Stéphane, on a pris deux jours de congés pour la course histoire d’être au mieux. En arrivant près d’Argeles on mesure le chemin que l’on va avoir à parcourir pour cet ultra, je commence à bien avoir les chocottes. Nous avons rendez vous à 14h pour prendre le bus qui nous emmènera à Font Romeu, on se dépêche de manger pour ne pas rater le bus, ce qui nous vaudra de laisser les desserts et pour Steph la spécialité du restaurant la Dorade Royale pas cuite. On arrive pile à l’heure et l’orga nous indique que le bus ne sera la qu’à 15h, on en profite pour se reposer sur la pelouse, il fait bien chaud.
Le bus arrive et nous emmène sur Font Romeu, je dors pendant une très grande partie du trajet. Sur place nous procédons au contrôle des sacs, ça ne rigole, tout est vérifié.
Nous filons ensuite à notre hôtel, Steph nous a trouvé un super truc à deux pas du départ. On commence à préparer nos sacs pour le lendemain, il faut vraiment bien réfléchir, on se prend la tête pour remplir les 3 sacs de base de vie avec des questions du type “où est ce que je mets ma paire de chaussure de rechange, au 90ème ou au 130 .”. Une fois les sacs préparés on file au briefing de course, la c’est la déconvenue, le directeur de course n’est pas la et le briefing se résume à “Vous avez des questions ?” On savez qu’on allait essuyer les plâtres vu qu’il s’agissait de la première édition mais on commence à avoir peur pour la course car ça commence à sentir l’amateurisme, j’ai en souvenir les récits des amis sur l’échappée belle et j’ai pas envie de vivre ça.
Après ce briefing inutile (désolé pour les gars qui ont fait la présentation, vous ferez mieux l’an prochain), on part manger, on nous a parlé de menu spécial coureur à base de pâte, mais nous ce qui nous fait envie c’est un plat de montagne. On s’enfile donc une grosse assiette de charcuterie et une tartiflette ainsi qu’une bonne bouteille de vin, le départ est à 15h le lendemain on ne le portera plus sur le bide. Des gens nous demandent quand même si on court le lendemain, ils n’en reviennent pas que l’on mange ça.
Une bonne nuit, pas de soucis pour dormir, je file acheter une 3ème flasque de 500mL pour remplacer la poche à eau qui ne me plaisait pas dans le sac.
La matinée et l’attente jusqu’au départ semble interminable.
Départ jusqu’à la nuit
15h c’est le grand départ, on est un peu moins de 400 à s’élancer sur les sentiers de Font Romeu puis du Pyrénées 2000. ça fait deux semaines que je n’ai pas couru, la raison est que je me suis blessé, une bonne tendinite à la cheville gauche, par sécurité je cours avec une chevillière Zamst qui compense mon déséquilibre, je dois aller avoir l’osthéo pour corriger cela.
Bref je surveille la cheville pendant ces premiers kilomètres, la douleur s’estompe avec la chaleur me voila rassuré. L’ambiance est bonne et le sentier est agréable, ça part vite tout de même pour un ultra, on est à 10km/h et assez loin de la tête, dans les 150 premiers.
On passe Bolquère puis on arrive au fort de Mont Louis, truc super cool on passe dans le fort, c’est du Vauban et les dimensions sont très impressionnantes. Les militaires nous encouragent, tout va bien pour le moment.
Steph commence à préparer ses bâtons mais il y a un hic, l’un de ses bâtons refuse de se bloquer, je regarde, impossible de le bloquer. Je le désosse, je vois qu’il y a une vis et que le système est bloqué, avec un tournevis ça devrait repartir. On cherche donc un tournevis tout en courant, c’est au prochain ravitot que Steph en dégotera un auprès d’un militaire. On arrive à réparer le bâton, ça tombe bien car la vrai grîmpette commence. Je ne sortirai mes bâtons que quelques kilomètre plus loin.
On commence à bien rentrer dans la montagne et le paysage est très beau, c’est ultra sauvage avec zéro constructions humaine à perte de vue. Steph pour le moment a du mal à profiter, je ne m’en fait pas pour lui, il va encore me faire le coup du diesel. Moi ça roule pour moi, je suis très content de mon nouveau sac Salomon Hydro 12L, c’est la première fois que je cours avec, j’aurai bien aimé le tester avant mais ma blessure en a décidé autrement.
Je commence à attendre le prochain ravitôt en eau, mes flasques commencent à bien se vider, encore une déconvenue le militaire n’a déjà presque plus d’eau pourtant il y a encore 200 personnes au moins derrière nous….
Une femme à coté de nous ne semble pas au mieux, Steph lui demande si ça va mais elle répond avec un regard dédaigneux “j’ai l’air de bien aller ?”, on lui dit que ça va passer que sur l’ultra y a des hauts et des bas, elle nous dit qu’elle vient de Belledonne, je pouffe de rire, apparemment c’était sensé nous faire quelque chose. Bref la demoiselle n’a pas l’air de se prendre pour de la merde, on la laisse à son sort et on accélère, il parait que c’était une des favorites sur le course. C’est la première fois que je croise ce genre de personne en ultra …
La montée est longue mais on avance correctement, la pente est de plus en plus raide et l’on voit au loin les nuages se rapprocher, on va avoir le droit à la pluie. C’est à 100m du sommet que nous devons sortir les vestes de pluie. On passe le col et c’est partie pour une grosse descente.
Début de la galère
La pluie s’intensifie, il faut que l’on sorte les frontales, j’ai mis mon sac sous ma veste et je dois donc l’enlever ce qui me vaudra d’être bien mouillé. On envoie pas trop mal dans la descente mais je commence à ne plus rien voir avec mes lunettes et la buée. On ne fait que doubler dans la descente, Steph a l’air d’aller de mieux en mieux. Je fais très attention, avec mes lunettes je ne vois plus rien, du coup elles sont au bout de mon nez, le halo de ma frontale avec la pluie est très désagréable.
On voit et on sent un feu au loin, ça sent le ravitôt ! Des militaires nous attendent dans une petite cabane, il pleut toujours à torrent, on rentre à l’intérieur avec Stéph pour faire le plein d’eau. Je range mes lunettes dans mon sac qui ne me servent plus à rien avec cette pluie. Il fait froid maintenant, je remet une couche, la veste waa ultra est vraiment bien pour le coup, très fine, près du corps mais chaude.
On repart, je prends une pomme dans ma poche après avoir englouti, banane, jambon et tuc. Cette pomme jouera un grand rôle plus tard.
On traverse un torrent, puis un deuxième, impossible de courir ça glisse trop. Il faut alors monter vers le col de Pal, la pluie cesse enfin, le ciel se dégage et on devine ce qui nous attend, ça va sacrément piquer. C’est de la mono trace impossible de doubler, je prends une lampée d’eau, elle est glacée, instantanément je choppe une crampe au ventre.
Oh la la, ça ne passe pas, je garde le rythme dans la montée mais j’ai du mal. J’essaie de comprendre ce qui m’arrive, la douleur passe un peu je retente de prendre de l’eau et la douleur est encore plus grande. Je me dis que ça va être compliqué si je ne peux rien manger ni rien boire. La base de vie de Pi se trouve 12km après le col, il va falloir tenir jusque la, je sais qu’un bouillon chaud règlera le problème.
On arrive en haut du col, je dessers ma ceinture et laisse Steph partir, j’envoie un texto à ma chérie pour la rassurer, c’est la première fois que l’on a du réseau depuis de nombreuses heures. Je clopine ensuite pour rejoindre Steph, j’ai du mal à me détendre le ventre me tire beaucoup.
A un moment on voit des coureurs revenir de la gauche en contre bas, ils ont du se perdre. Steph envoie du lourd dans la descente, je ne peux pas suivre, j’ai trop mal au ventre. Je me cale derrière une coureuse en hocka, elle n’arrête pas de glisser et de tomber. Elle me dit quelque chose, on s’est croisé sur Steevenson. La descente est loin d’être évidente, impossible de courir, on essaie juste de ne pas tomber en s’accrochant à ce que l’on peut. J’ai toujours mal au ventre mais je me concentre, j’ai pas le droit à l’erreur sinon c’est game over la. On double un coureur à terre, on s’arrête on lui demande si ça va, il nous dit qu’il est sonné par une chute mais que ça va aller. Ca fait 20 bonnes minutes que je n’ai pas vu Steph.
La pomme d’eden ou pas
Je sens la pomme dans ma poche et je me souviens avoir entendu que les pommes pouvaient calmer les douleurs au ventre. J’entends crier au loin mon prénom, c’est Steph. Ouf il est la, j’avais peur qu’il pense que je sois devant. Je lui parle de mon mal de bide et de ma pomme, il me dit de la manger, dans ces cas la j’écoute toujours Steph, y a pas à dire faire une course à deux ça a du bon. J’appréhende la première bouchée, mais ça passe, pas de crampe au ventre. J’engloutie la pomme tout en courant. Je peux boire un peu à nouveau, je réchauffe l’eau dans ma bouche avant qu’elle ne passe dans l’œsophage.
Enfin c’est la renaissance, ça fait plus de deux heures que j’avais mal au ventre et la solution était dans ma poche. On arrive à un petit ravitot avant de remonter un petit col et après c’est Pi. On ne traine pas sur ce ravito bien que je me sois posé 2 minutes.
Je me sens revigoré, le mal de ventre n’est presque plus et j’envoie dans la montée, j’attends même Steph sur un des lacets. Arrivé en haut nous accrochons un groupe, un trailer plus agé que nous est au commande et grâce à lui ça envoie dans la descente, on s’accroche et au final ces 8km passent vraiment tout seul.
On arrive à notre première délivrance la base de vie de Pi. Les coureurs sont démontés, je n’ai jamais vu ça et pourtant on en est qu’au quart de la course, on se dit de suite qu’il y a un problème.
Il y a déjà quelques kilomètres au compteur en plus que ce qui est annoncé par l’organisation. On se change, je remets du sec en haut. On file ensuite se ravitailler, je prendrai 2 bouillons de pâtes et une assiette de pâte. Plus des fruits, du coca, de l’eau, bref je fais le plein.
On ne traine pas plus que ça, la motivation est encore la.
10 km de montée à non 16 en fait
Direction le refuge de Marialles, l’organisateur nous dit qu’on a fait une des parties les plus dur et que la ça devrait aller maintenant, je lui en veux pour ça car on attaque en fait la pire partie du parcours. On quitte PI par une petite route, ça roule pendant un kilomètre puis ça grimpe, on croise un coureur qui s’est blessé au genoux et qui repars en sens inverse, ça annonce la couleur …
Steph est au taquet et on monte à bon rythme, on fera un top 10 sur Strava sur cette portion, on reprend beaucoup de coureur, ça monte fort, 800m d’avalé. Mais au bout de 10km on se dit qu’on arrive presque au refuge mais en regardant le relief on est loin d’être arrivé.
Ces kilomètres supplémentaires ça commence à nous souler, mais on continue, on a pas le choix. Cette longue piste n’en finit pas, on garde notre rythme infernal. Et enfin au bout de 16km on aperçoit des gendarmes puis le refuge.
ça sent le feu de bois, il y a pas mal de cadavre de trailer et de bouteille dans le refuge, au moins il fait chaud. Je me change moi aussi en cadavre en allant me caler sous l’escalier. Je ferme les yeux 5 minutes, mais je me réveille à cause du froid de l’humidité de ma veste. Je prends un bouillon histoire de me réchauffer et je me colle à la cheminée. On repars, cette fois vers la galère …
On ne joue plus
Au début le sentier est praticable, la montée passe bien même si je lutte contre le sommeil. Je suis déjà heureux que mes maux de ventre aient totalement disparus. Arrivé en haut on aperçoit le Canigou qui scellera notre sort. Le chemin est de moins en moins agréable, on ne peut plus du tout courir, il faut sauter de pierre en pierre.
On passe de pierrier en pierrier, on traverse un torrent, je me dis que ça ne va pas durer, on est habitué à avoir ce genre de passage. La fatigue me gagne et on profite d’un pin pour se poser sur un doux lit d’épine chaud. Je mange une grosse barre au chocolat noisette. On repart pour ne pas avoir froid. Les pierriers continuent de s'enchainer, je manque plusieurs fois la chute dans le ravin, les pierres sont très instables, heureusement elles sont sèches. Ça ne m’amuse plus du tout, je pense à mon petit bonhomme et à ma femme qui m'a fait promettre de revenir entier, je commence à avoir peur. Faire de l'ultra OK mais se mettre en danger hors de question, on prend notre temps, la progression est très lente et je maudis le Canigou, ça doit être très beau de jour mais la c'est complètement inutile.
Après avoir descendu un énième pierrier on se pose à nouveau, on a déjà fait 16km depuis le précédent ravito, normalement c'était 12 km, merci les orga d'avoir menti sur les distances qui sont pourtant clairement indiquée sur les panneaux des sentiers, la prochaine fois je vérifie en plus du dénivelé la distance annoncée histoire de ne pas avoir le moral plombée pendant la course.
J'en veux vraiment aux organisateur sur le moment, car la course était annoncée comme roulante, sans grande difficulté technique, c’est pour ça qu’on l’avait choisie, c'est tout le contraire. On fait de la rando depuis des erreurs ça devient plus qu’ennuyeux.
Un coureur s’arrête à notre niveau, il nous dit qu’il y a un petit ravitot plus loin, on repart donc. Arrivé au ravitaillement on est accueilli une fois de plus par les militaires, il ne nous reste qu’une bonne grosse montée pour aller jusqu’au Cortalets, le jour va se lever dans pas longtemps ça nous remonte le moral.
La montée passe bien, on est pressé d’arriver au refuge. Le soleil se lève enfin :
Aux Cortalets on est accueilli chaleureusement par les bénévoles, je n’ai qu’une envie c’est de me poser dans un lit. C’est ce que je vais faire, 45min de sieste salvatrice. Stéphane me raconte un truc hallucinant pendant ma sieste, un coureur qui était au plus mal a reçu une perfusion, on lui a donc retiré son dossard mais ce coureur a fait tout un cirque pour repartir … Les abandons sont nombreux sur ce refuge, nous on souhaite retrouver nos chéries, il faut donc faire 30km pour les retrouvées à Arles sur Tech. Pour la suite dans ma tête c’est presque déjà plié, tout dépend de comment va se passer cette descente. On repart, les coureurs autour de nous sont déprimés, ça n’aide pas …
Descente vers la délivrance
Le début de la descente nous permet de courir, Steph connait cette partie, on va passer sur des balcons où normalement ça sera un peu roulant. Je vais mieux mais la nuit a sérieusement entamé mon moral, je veux être avec mon fils et ma femme point barre.
On profite enfin des décors, mais la descente est longue très longue, on avance pas. Stéph semble être au même point que moi et râle beaucoup. Sur un point d’eau on discute avec un bénévole, il est d’accord avec nous le descriptif de la course était très loin de la réalité, on est loin de Heidi dans les champs. On repart et on attaque une nouvelle montée, les montée ça passe toujours tout seul et dans ces cas la on est bien.
Puis on attaque la dernière descente, il ne fait pas chaud en haut, et des vagues de brouillards nous empêchent de trainer. On prévient les filles que l’on devrait être la dans 2h mais on en sait trop rien. On arrive pas à courir, pourtant c’est courable sur cette partie, je pense que le problème est plus mental que physique.
Au ravitaillement suivant, je retrouve des coureurs de Saint Martin De Londres, ils essaient de me motiver à terminer avec eux, mais 80km à notre allure ça veut dire encore plus de 24h de course ce qui veut dire qu’on va terminer hors délais, je ne vois pas l’intérêt de continuer à subir le calvaire si c’est pour ne pas finir. Je décline donc la proposition et les encourages, mentalement et physiquement ils ont l’air bien.
On repart, c’est interminable, on se force à courir le plus possible mais je pense que l’on peut se faire doubler par des tortues. Je pousse Steph pour qu’on termine le plus vite possible, j’en ai marre.
On discute, même analyse tous les deux, l’an prochain ça sera des courses qui durent max une journée car c’est dur d’imposer ça à la famille, je pense déjà au Templiers.
On traverse des sentiers parcourus par de gros cables, il s’agit de câbles de téléphériques qui devaient servir à transporter du minerai.
On aperçoit enfin Arles sur Tech, ça fait plus de 6 heures qu’on a quitté les Cortalets, dans ma tête c’est définitivement plié. On prévient les filles, dans 10 minutes on est la.
On arrive à la base de vie, main dans la main avec nos chéries, j’annonce au bénévole que je veux arrêter la, il me dit d’attendre, il a l’air un peu déçu. Je peux comprendre sa déception, on est nombreux à avoir stoppé ici, c’est de l’investissement pour eux également alors voir autant de coureur ne pas aller au bout c’est triste.
Moi je suis bien dans mes baskets je sais que c’est la bonne décision, je ne veux pas me dégouter de l’ultra.
On termine le week end en famille avec un bon bain dans la méditerranée le lendemain comme prévu initialement.
Merci à nos chérie d’être venu nous récupérer et de nous avoir soutenu, désolé de ne pas avoir terminé mais c’était trop dur pour nous.
Désolé c’est un peu le récit de ouin ouin fait de l’ultra mais c’est ce qui ressort de cette course
Chose à améliorer sur cet ultra
En premier point la communication : ne pas dire que c’est roulant alors que le parcours est très technique, la CCC c’est roulant pas ça.
Faire partir les coureurs à 9h du matin et augmenter la barrière horaire, faire finir la moitié des arrivants en bus c’est pas top. (1/4 des partants)
Si les ravitaillements en eau ne sont pas capables de fournir de l’eau à tous les coureurs ( j’étais dans les 150 premiers et il n’y avait plus d’eau), ne pas les marquer comme ravitaillement mais juste indiquer poste de secours.
Ne pas faire un briefing la veille si vous n’êtes pas capable de fournir des informations de course au coureur, car donner une seule information pendant le briefing puis faire un jeu de question réponse c’est pas un briefing
Annoncer un kilométrage fiable aux coureurs, le dénivelé était bon mais pas les kilomètres, 4 à 5km d’écart sur 12km c’est pas possible, surtout quand les panneaux sur les sentiers annoncent clairement les distances.