De fil en aiguille, j’ai découvert Lou Andreas-Salomé grâce aux correspondances du poète Rainer Maria Rilke. Les lettres qu’il lui a écrites tout au long de sa vie sont magnifiques et donnent une belle vision de l’évolution spirituelle du poète. Après quelques rapides recherches, j’ai appris que Lou Andreas-Salomé avait également été très proches de deux autres hommes non moins célèbres : Sigmund Freud et Friedrich Nietzsche. J’ai déjà lu il y a plusieurs mois Eros de Lou Andreas-Salomé. Cet ouvrage traitait déjà de psychanalyse, discipline de prédilection de cette grande dame. Par le passé, je me suis parfois intéressée au personnage de Freud (cf. cet article datant de 2010).
Cette Lettre ouverte à Freud est l’occasion d’en apprendre d’avantage sur une femme fascinante et sur sa relation avec le précurseur de la psychanalyse. Je ne vous cache pas qu’en achetant ce livre, j’espérais surtout une correspondance amoureuse passionnée et croustillante. Loin s’en faut ! Si les lettres de R . M. Rilke ont largement comblé mon côté romantico-midinette – et ma soif de belle littérature ! -, celle de L. Andreas-Salomé en hommage à S. Freud pour son soixante-quinzième anniversaire est écrite dans un tout autre registre : strictement scientifique et… psychanalytique. Pour tout vous dire, j’ai, dans un premier temps, abandonné la lecture au bout de trente pages. Étant assez têtue, j’ai tout de même décidé, quelques mois plus tard, de l’inclure dans ma liste pour le Challenge ABC de Babelio : 150 pages à lire, ce n’est pas énorme, je devrais pouvoir le faire !
Et je l’ai fait ! En neuf chapitres, Lou Andreas-Salomé aborde les grandes questions de la psychanalyse freudienne : sexualité, rapport homme-femme, religion, processus de création, etc. Je suis malheureusement bien incapable de vous en faire un résumé. Les passages sur la foi et la religion sont, à mes yeux, les plus intéressants. Sur ces points, Lou Andreas-Salomé s’opposait à Sigmund Freud et elle tente ici d’exprimer son point de vue tout en restant cohérente avec la psychanalyse freudienne. Tout un art…
J’ai tout de même envie de vous retranscrire un extrait qui a retenu mon attention :
« […] Nous sommes lancés, inéluctablement, dans le tourbillon de toute réalité, avec pour seul choix d’y consentir. Si sans aucun doute, cela veut dire : traverser un océan sur un frêle esquif, telle est bien notre condition humaine – et il ne serait d’aucun secours de s’imaginer qu’on navigue à la remorque du plus puissant des bateaux à vapeur, vers des destinations inexistantes : notre attention au vent et au temps ne pourraient que s’en trouver diminuée. Plus nous nous plongeons, sans en rien retrancher, dans l’ « exigence du moment », dans l’instant tel qu’il se présente, dans des conditions variables d’un cas à l’autre, au lieu de suivre le fil conducteur de prescriptions, de directives (écrites par l’homme ! ), plus nous sommes, dans nos actes, justement en relation avec le tout, poussés par la force vivante qui relie tout avec tout, et nous aussi. Qu’importe alors si les tâtonnements de notre conscience sont entachés de toutes les erreurs possibles. Si quelqu’un taxe ce comportement d’immoralité, d’arbitraire et de présomption, nous serions à plus forte raison autorisés à taxer de confortable incurie morale l’esclavage infantile de celui qui s’en tient au respect des prescriptions ! »
Si ce n’était le Challenge ABC, je n’aurais probablement pas chroniqué ce texte. Toutefois, je ne reste pas indifférente au personnage de Lou Andreas-Salomé, et si je ne peux pas comprendre dans le détail son raisonnement, je reste fascinée par sa très grande liberté. En espérant que le style soit plus digeste, j’aimerais beaucoup lire son autobiographie Ma vie : esquisse de quelques souvenirs , ou, pourquoi pas et si elles sont plus facile d’accès, l’une des nombreuses biographies écrites sur elle. Sauriez-vous m’en conseiller une en particulier ?