Survivor’s remorse est une nouvelle « comédie » (le terme est exagéré) de six épisodes diffusée depuis le début octobre sur les ondes de Starz Aux États-Unis. Celle-ci commence alors que le personnage principal, Cam Calloway (Jessie T. Usher) vient de signer un lucratif avec l’équipe professionnelle de basketball l’Atlanta (NBA). Ayant grandi dans l’extrême pauvreté, il tente de garder les pieds sur terre après qu’on lui ait donné un chèque avec plusieurs zéros. En même temps, sa famille serra à ses côté dans cette nouvelle ère de sa vie. Mulaney est une nouvelle sitcom de 13 épisodes diffusée aussi depuis le début octobre cette fois sur les ondes de Fox aux États-Unis et Global au Canada. Le protagoniste du même nom (John Mulaney) vient tout juste d’être engagé en tant que scripteur pour Lou Cannon (Martin Short) un animateur vedette d’un quiz à la télévision. Dans son quotidien, John subit la constante pression d’être à la hauteur de son médiocre employeur, tout en partageant ses frustrations avec une bande d’amis. Les deux séries ont pour point commun de parler de la célébrité instantanée et du stress qui y est associé, mais se perdent au détour. Celle de Starz est vulgaire et peu crédible alors que celle de Fox n’est tout simplement pas drôle.
Survivor’s remorse : basketball??
La série commence et Cam est déjà en train de déménager, de même que toute sa famille qui le suit à Atlanta. Il y a sa mère Cassie (Tichina Arnold), sa sœur Mary Charles (Erica Ash), son oncle Julius (Mike Epps), son cousin Reggie (RonReaco Lee) qui est aussi son gérant et sa femme Missy (Teyonah Parris). Officiellement, ils continuent tous de partager le quotidien de la star « parce qu’ils sont une famille unie et afin qu’il n’oublie pas les vraies valeurs de la vie ». Ce qu’il y a de plus ironique est que seul Cam n’a pas la tête enflée et que tous les autres membres de son cirque familial n’hésitent pas à lui quêter de l’argent. Qu’on ne s’y trompe pas : ils ne profitent pas de lui et jamais Cam ne se voit obligé de subvenir à leurs besoins. Ils affrontent les joies et revers de la célébrité tous ensemble. Ainsi, dans l’épisode 1, un ancien ami du nouveau joueur étoile veut le faire chanter; ayant une vidéo compromettante de lui plus jeune fumant de la drogue et tenant des propos politiquement incorrects. Dans le second, Cassie affirme avoir usé de la manière forte pour corriger Cam lorsqu’il était enfant (fessée), ce qui crée la controverse sur les réseaux sociaux. Enfin, dans le troisième, la famille se rend au chevet d’un adolescent dans le coma afin d’officieusement montrer sous le meilleur des jours le nouveau joueur de l’équipe. Mais voilà que le garçon se réveille et qu’il s’avère être insupportable.
Le premier défaut de Survivor’s remorse est son manque de crédibilité puisqu’on omet dans le scénario les scènes de basketball : jamais on ne voit ses coéquipiers, la salle d’entraînement, un match ni même le personnage principal effectuer quelques dribles. C’est tout de même étonnant d’autant plus que l’un des producteurs exécutifs est LeBron James! On découvre assez tôt que la série n’est qu’une excuse pour nous montrer les revers (ou les aléas) de la célébrité… de façon plutôt maladroite. Au lieu d’y aller d’une réflexion profonde ou un tant soit peu sérieuse, on tombe vite dans les clichés habituels (les Calloway étaient si pauvres qu’ils mendiaient pour manger et la célébrité venant, ce sont les gros bijoux or massif, la voiture de sport, bref, tout ce qu’il y a de plus bling-bling). Mais on remarque aussi que Starz est en train de s’enliser dans un certain style peu reluisant qui pourrait bien devenir sa marque de commerce à court terme, comme l’écrit Pierre Langlais dans sa critique : « Starz oblige, le tout est assaisonné de pas mal de jurons et, figure de style obligatoire de la chaîne, une scène de sexe « graphique », comme on dit outre-Atlantique — et sans intérêt, juste pour qu’on voit une paire de seins. » Et parmi les expressions les plus crasses justifiant la signalétique : « He can suck my drawer full of vibrating dicks », une myriade de « fuck », « I don’t give a shit » et pour rester dans le même thème « Lick me where I shit ».
Mulaney : comédie d’une autre époque, moins le rire
John Mulaney partage un appartement avec deux amis : la lunatique/impulsive Jane (Nasim Pedrad) et le niais/narcissique Motif (Seaton Smith). Ils vivent dans le même immeuble qu’Oscar (Elliott Gould), un homosexuel d’un certain âge, toujours prêt à donner des conseils et Andre (Zack Pearlman), le voisin ringard qui ne cesse de les importuner. Comme c’est souvent le cas dans les sitcoms, on extirpe l’humour des scènes du quotidien. Ainsi, John hésite à s’engager dans l’épisode 2 avec une sage-femme qu’il fréquente parce que leurs discutions au quotidien sont trop… médicales. Dans l’épisode suivant, un voisin de leur immeuble décède et John s’approprie les blagues qu’il avait écrites afin d’impressionner Lou, tandis que Jane essaie de se faire passer pour la petite amie du défunt afin de vivre dans son appartement dont le loyer est peu cher.
Au début de chaque épisode, Mulaney y va d’un monologue devant public dans la même veine que Seinfield. Hommage? Inspiration? Désir de chausser la même pointure? Si cette dernière hypothèse qui prévaut, on se sent embarrassé pour l’acteur qui n’est pourtant pas dénué de talent. En effet, John Mulaney est un visage connu aux États-Unis pour ses numéros de stand-up et l’écriture de texte pour la très populaire Saturday night live. Mais un humoriste n’est pas nécessairement un acteur et c’est le cas du protagoniste qui joue au minimum. De plus, ses blagues tombent à plat et il est clair qu’une bande audio de rires en boîte a été rajoutée au montage. Quand on sait que la sitcom était d’abord destinée à NBC qui ne l’a finalement pas retenue, on se demande à quoi pensait Fox, surtout qu’elle a imposé la série dans la case horaire du dimanche soir en remplacement de American Dad. Mal lui en prit : alors que le dessin animé de Seth MacFarlane comptait environ 3,2 millions de téléspectateurs par épisodes, Mulaney n’en a réuni qu’une moyenne de 2,25 millions pour ses trois premières diffusions.
Bien que les deux séries soientt loin de répondre aux attentes, on est à même ici de constater la disparité entre le câble et une chaîne généraliste. Avec une moyenne de 192 000 téléspectateurs par épisodes, Survivor’s remorse a tôt fait d’obtenir le feu vert pour une deuxième saison alors qu’on doute que la Fox ne tolère encore longtemps une telle performance pour Mulaney. À ce sujet, on peut qualifier de pathétique la saison d’automne 2014 de Fox dont l’auditoire a chuté de 20% comparé à l’an dernier. Outre Gracepoint, Red Band Society et la coûteuse téléréalité Utopia qui affichent des audiences catastrophiques, seule Gotham s’en tire correctement, mais sans pour autant être le succès escompté. Dans les deux cas, pour rire, il faudra aller ailleurs.