Magazine

Charles Baudelaire – Théophile Gautier

Publié le 11 octobre 2014 par Moglug @Moglug

Charles Baudelaire – Théophile GautierCeux et celles qui me connaissent savent – parfois – combien j’aime Charles Baudelaire. C’est pourquoi, j’ai reçu en cadeau à Noël dernier ce portrait du grand poète rédigé par Théophile Gautier. Plus qu’une occasion de me plonger dans l’univers de Baudelaire, ce petit livre me permet surtout de redécouvrir Th. Gautier que je ne connaissais qu’à travers Le roman de la momie lu il y a bien longtemps déjà.

Dans un style particulièrement fluide et sur un ton d’époque – très XIXème siècle, tout ce que j’aime – Th. Gautier me fait traverser toute la vie de Baudelaire du jour de leur rencontre en 1843 jusqu’à cette mort, qui sans être anonyme fût bien discrête pour un si grand homme : une centaine de personnes pour l’enterrement en 1867, là où, moins de vingt ans plus tard, le non moins célèbre Victor Hugo rassemblait les foules autour du Panthéon.

Théophile Gautier débute son récit par une description physique de son ami, lorsqu’il l’a vu pour la première fois. En quelques lignes, je suis transportée en 1843, à l’hôtel Pimodan, et je vois ce singulier personnage apparaître devant moi :

« Son aspect nous frappa : il avait les cheveux coupés très ras et du plus beau noir ; ces cheveux, faisant des pointes régulières sur le front d’une éclatante blancheur, le coiffaient comme une espèce de casque sarrasin ; les yeux, couleur de tabac d’Espagne, avaient un regard spirituel, profond, et d’une pénétration peut-être un peu trop insistante ; quant à la bouche, meublée de dents très blanches, elle abritait, sous une légère et soyeuse moustache ombrageant son contour, des sinuosités mobiles, voluptueuses et ironiques comme les lèvres de figures peintes par Léonard de Vinci ; le nez, fin et délicat, un peu arrondi, aux narines palpitantes, semblait subodorer de vagues parfums lointains ; une fossette vigoureuse accentuait le menton comme le coup de pouce final du statuaire ; les joues, soigneusement rasées, contrastaient, par leur fleur bleuâtre que veloutait la poudre de riz, avec les nuances vermeilles des pommettes ; le cou, d’une élégance et d’une blancheur féminine, apparaissait dégagé, partant d’un col de chemise rabattu et d’une étroite cravate en madras des Indes et à carreaux.

Son vêtement consistait en un paletot d’une étoffe noire lustrée et brillante, un pantalon noisette, des bas blancs et des escarpins vernis, le tout méticuleusement propre et correct, avec un cachet voulu de simplicité anglaise et comme à l’intention de se séparer du genre artiste, à chapeaux de feutre mou, à vestes de velours, à vareuses rouges, à barbe prolixe et à crinière échevelée. Rien de trop frais ni de trop voyant dans cette tenue rigoureuse. Charles Baudelaire appartenait à ce dandysme sobre qui râpe ses habits avec du papier de verre pour leur ôter l’éclat endimanché et tout battant neuf si cher au philistin et si désagréable pour le vrai gentleman. »

Sur le même ton, Th. Gautier nous propose un véritable voyage dans le siècle baudelairien, il nous présente les œuvres du poète – bien évidemment – mais également ses influences – Edgar Allan Poe – ses amours si discrètes, l ‘époque du Club des Hashischins auquel il appartenait aussi, où je découvre un Baudelaire moins enclin que je ne l’imaginais à la consommation de drogues douces. C’est en ami que Th. Gautier nous fais revivre les dernières semaines de Baudelaire, paralysé, ramené de Bruxelles à Paris par sa famille, ne pouvant plus écrire, l’esprit et l’intelligence toujours en alerte et prêts à créer.

Il va sans dire que j’ai passé un très beau moment en lisant les lignes de Théophile Gautier. Il a ravivé encore une fois mon envie de relire Baudelaire, Les Fleurs du Mal, Les petits poèmes en prose, mais aussi ses traduction d’Edgar Poe. Cette lecture est aussi l’occasion pour moi de me pencher à nouveau – ou plus justement de lever le nez – vers Théophile Gautier. Je note pour la suite de mes lectures son Histoire du romantisme et deux autres références proposées par le préfacier, Philippe Galanopoulos, et déjà remarquées dans la bibliographie d’Emmanuel Godo : Paul Bénichou, Le sacre de l’écrivain, 1750-1830, et Les voix de la liberté : les écrivains engagés au XIXème siècle de Michel Winock.

Ce livre est chroniqué dans le cadre du Challenge Babelio ABC Critiques 2014/2015 et du Challenge romantique.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Moglug 307 partages Voir son profil
Voir son blog