Retour sur un résultat annoncé. Les hasards des sélections footballistiques ne sont pas toujours heureux. Le match prévu entre les deux pays ennemis depuis presque la nuit des temps ne pouvait se dérouler autrement. Peut-on dire haut et fort que les Serbes méprisent les Albanais? Je pense que oui car c'est une réalité. C'est aussi bien sûr une généralité, et je reste convaincue que des Serbes ont déjà dépassé ce complexe. Car il s'agit bien de cela d'un complexe, celui d'un peuple persuadé d'être supérieur à un autre. Si l'occasion se présente un jour, il faudrait faire la carte des complexes qui ravagent encore l'Europe centrale et orientale pour ne parler que de cet espace géographique que je connais bien. La même chose existe ailleurs, j'en suis bien consciente. Et ce n'est pas le cas de tout le monde, nombre de politiciens sont ignorants des réalités historiques qui lient dans l'amour ou dans la haine, les peuples entre eux.
Les Serbes ont provoqué les Albanais en refusant que les supporters de la Kombëtarja viennent soutenir leur équipe. De quel droit? Celui de leur sécurité? C'est tout à leur honneur. Cela veut-il dire que les supporters albanais auraient été en danger à Belgrade? Supputait-on que ceux-ci puissent être dangereux pour les Serbes? A contrario, les supporters albanais étaient-ils en danger à Belgrade?
Beaucoup de questions qui, si elles trouvaient réponse, apporteraient la lumière sur une situation bien complexe. Mais ce ne sera pas le cas. Il y a des choses que l'on ne peut dire en politique.
Car c'est bien de politique qu'il s'agit et non pas de sport qui n'est ici que prétexte.
Résultat, un gamin albanais sur une église perchée à lancé un objet télécommandé arborant les couleurs de la grande Albanie au-dessus du terrain de foot en plein match. C'était vraiment pas malin de venir provoquer les Serbes ainsi chez eux. Comme quoi la bêtise, ce n'est pas un scoop, est universelle. La poudre étant semée, il ne manquait plus que cette étincelle pour que tout explose et cela n'a pas manqué. Le propre frère du Premier ministre albanais, attendu en visite officielle à Belgrade dans quelques jours, a été accusé puis lavé des soupçons d'avoir télécommandé le fameux drone. Vous avez remarqué que tout ce qui vole aujourd'hui sous forme de miniature, est devenu drone. On est en droit de se demander comment va se passer cette visite officielle et surtout qu'elle est l'intérêt? Dans une telle situation de crise, quels résultats peut-ils en découler. Après avoir organisé un défilé à date décalée pour la visite du président russe Vladimir Poutine - le plus grand depuis très longtemps -, que vont pouvoir réserver comme accueil les Serbes, à Edi Rama?
Pourtant il le faut bien. Les Serbes sont pris au piège entre realpolitik, c'est-à-dire leur nécessaire adhésion à l'Union européenne et leur amour de toujours, la Russie. Il va falloir choisir entre le mariage de raison ou le mariage d'amour.
Les équipes adverses ne sont pas satisfaites du verdict de l'UEFA de donner la victoire aux Serbes, tout en les privant des points pour la sélection. Les Serbes se voient infliger deux matches à huis clos, ce qui semble a priori une bonne décision pour la sécurité des joueurs... Chacune des deux fédérations devra payer une amende de 100.000 euros. Les Albanais font appel de cette décision où personne ne sort vraiment victorieux et c'est tant mieux.
C'est tant mieux, car faut-il prendre au sérieux le comportement des uns et des autres lors de ce match? Cela veut-il dire que rien n'a été appris dans les Balkans et qu'il suffira encore d'un prétexte si minime soit-il pour que tout explose à nouveau? Il semble encore loin le temps où les uns et les autres s'accepteront et regarderont vers le futur plutôt que vers le passé. Cette histoire n'est pas de bonne augure.