Pierre-Auguste RENOIR (Limoges, 1841 – Cagnes-sur-Mer, 1919)
Paul Durand-Ruel
1910
Huile sur toile. H. 65 ; l. 54 cm
Collection particulière
« Sans Durand, nous serions morts de faim, nous tous les impressionnistes. Nous lui devons tout » : au soir de sa vie, le peintre Claude Monet rendait ainsi hommage à celui qui fut son principal marchand au XIXe siècle.
découvrez la vidéo de présentation présentée par Sylvie Patry, commissaire de l'expositionPaul Durand-Ruel (1831-1922) a le premier fait le pari de l’impressionnisme au début des années 1870, à l’heure où la « Nouvelle Peinture » de la vie moderne, vibrante et colorée, de Manet, Monet, Renoir, Degas, Sisley, Pissarro, Cassatt et Morisot, rencontrait l’incompréhension.
Paul Durand-Ruel naît à Paris, le 31 octobre 1831. Ses parents dirigent alors un magasin qui est à la fois une papeterie et un commerce de fournitures pour artiste. Progressivement ils se consacrent à une autre activité : le commerce de tableaux. Ils exposent alors les oeuvres d’artistes comme par exemple Eugène Delacroix. Leur boutique devient rapidement un point de rencontre pour les artistes et les collectionneurs. Leur succès est tel qu’en 1856, ils s’installent dans un des plus luxueux quartiers du nouveau Paris au 1, rue de la Paix. Bourgeois typiques du Second Empire, les Durand-Ruel offrent à leur fils de solides études. Paul souhaite s’orienter vers une carrière militaire ou religieuse. Mais pour des raisons de santé, il ne peut poursuivre ses études à l’école de Saint-Cyr dont il avait pourtant réussi le concours d’entrée. Il travaille alors auprès de ses parents. Là, il fait la connaissance de nombreux artistes et collectionneurs qui viennent du monde entier et passent par la galerie au moment des Salons, ces expositions officielles.
C'est la vue de la toile de Delacroix, "l'Assassinat de l'Evèque de Liège" exposée lors de l'exposition universelle de 1855, qui lui ouvrit définitivement les yeux et où il découvre sa vocation pour l'art vivant. Sa passion pour cet artiste l'amène à s'intéresser aux "peintres de la Belle Ecole de 1830 » (Delacroix, Rousseau , Corot,
Courbet, Daumier, Millet).
Paul Durand comprend le potentiel de ces peintres en rupture avec les tenants de l’académisme et prend des initiatives en signant avec certains d’entre eux des contrats d’exclusivité, se réservant la vente de l’intégralité de leur production.
Pour soutenir les artistes dont il vend les oeuvres, il crée la
« Revue internationale de l’art et de la Curiosité ». Les affaires marchent bien.
En juillet 1870, la France déclare la guerre à la Prusse et Durand-Ruel décide alors, de mettre son stock de tableaux à l’abri à Bruxelles et à Londres. Il y poursuit son commerce, les collectionneurs anglais trouvent rapidement le chemin de sa galerie.
Là, le marchand organise des expositions dédiées à l’art français dans lesquelles il mélange habilement tradition et nouveauté et le succès est au rendez-vous. La période de guerre tant redoutée aura finalement eu des effets positifs importants sur le développement international des galeries Durand-Ruel et sur les peintres qui y seront exposés.
Il y rencontre en effet deux figures majeures de la peinture impressionniste :
Camille Pissarro (vidéo) et Claude Monet (vidéo). Grâce à eux, de retour en France, il fera la connaissance de deux autres futurs grands noms du mouvement :
Alfred Sisley (vidéo) et Pierre-Auguste Renoir (vidéo). Ce dernier deviendra d’ailleurs l'un de ses amis les plus proches.
« Durand-Ruel était un missionnaire. C’est une chance pour nous que sa religion ait été la peinture. »
Pierre-Auguste Renoir
Renoir, Danse à Bougival, 1883
Convaincu par le talent de ces artistes, Paul Durand-Ruel achète rapidement une partie de leur ancienne production. C’est un peu plus tard qu’il fera la rencontre de Manet (vidéo) et Degas (vidéo).
Ainsi en quelques années, Durand-Ruel est-il devenu le principal défenseur de l’Impressionnisme naissant. Il fallait bien du courage à ce marchand alors que, pratiquement toute la société ne voyait que du barbouillage dans ce nouveau mouvement artistique !
« Hormis ceux de ses artistes, il n’est pas un nom qui soit davantage lié à l’histoire de l’impressionnisme que celui de Paul Durand-Ruel », déclarait en 1943 l’éminent historien de l’art John Rewald. À ses yeux, Durand-Ruel était bien plus qu’un marchand d’art, un ami loyal, un défenseur enthousiaste et le « patron » courageux des impressionnistes, qui acheta quelque mille cinq cents Renoir, plus de mille Monet, huit cents Pissarro, plus de quatre cents Degas, près de quatre cents Sisley, autant de Cassatt, ainsi que deux cents Manet. Une exposition consacrée à Durand-Ruel et à ses relations avec Monet, Renoir, Pissarro, Sisley, Manet, Degas, Morisot, Cassatt et Cézanne invite donc à une véritable plongée dans l’impressionnisme et offre la chance d’étudier de façon concrète la contribution d’un marchand d’exception à ce mouvement.
Berthe Morisot Femme à sa toilette 1875-80 et Mary Cassatt Le bain de l’enfant 1893
Cette exposition est la première consacrée au grand marchand des impressionnistes, Paul Durand-Ruel (1831-1922), également considéré comme le "père du marché de l’art moderne".
La plupart des grandes collections impressionnistes publiques et privées se sont en effet constituées auprès de la galerie Durand-Ruel au tournant du XXe siècle. Encore aujourd’hui, nulle vente impressionniste qui n’ait lieu sans que des tableaux autrefois passés par la galerie n’y figurent. De sa découverte de l’impressionnisme au début des années 1870 jusqu’au succès du début du XXe siècle, Paul Durand-Ruel a acheté, vendu, exposé des milliers d’oeuvres de Manet, Monet, Renoir, Degas, Pissarro, Sisley, Morisot et Cassatt.
Cette histoire ne s’est pas déroulée sans heurts et, s’il est maintenant salué comme un marchand visionnaire, Durand-Ruel a bel et bien fait le pari de l’impressionnisme. Au fil du temps, les artistes sont en effet de plus en plus agacés par le principe novateur mis en place par le marchand : le monopole, c'est-à-dire la position d'exclusivité sur l'oeuvre d'un artiste. L'artiste bénéficie d'une sécurité financière, mais cela a une contrepartie : le marchand est libre de fixer les prix. Or ils aimeraient bien faire jouer la concurrence pour les négocier, ces fameux prix. C’est ce chapitre de l’histoire de la galerie et du parcours d’un homme que l’exposition, comme son catalogue entendent montrer et étudier grâce à de nouvelles recherches. Reflétant le rayonnement international de la galerie au XIXe siècle, cette exposition évoque avec Paul Durand-Ruel une figure centrale de l’impressionnisme.
Afin d’offrir une vision alternative de l’art de son époque, le marchand ouvrait son appartement à la visite. L’évocation de cet «appartement-musée» constitue le point de départ de l’exposition qui aborde au fil de cinq autres sections, le goût du marchand pour la « Belle Ecole de 1830 » (Delacroix, Rousseau, Corot, etc...), ses premiers achats aux impressionnistes et à Manet, à Londres et à Paris, les années de crise à travers l’exemple de l’exposition impressionniste de 1876, la promotion des artistes avec l’essor des expositions particulières autour du cas de Monet en 1883 et en 1892, pour se clore sur la diffusion de l’impressionnisme aux Etats-Unis et en Europe, avec un accent sur l’exposition historique des Grafton Galleries à Londres en 1905, encore à ce jour le plus important rassemblement de tableaux impressionnistes. Les collections des musées d’Orsay, de Londres et de Philadelphie comptent près de 200 oeuvres passées par sa galerie. L’exposition réunit plus de 80 tableaux et des documents, provenant de musées et de collections particulières du monde entier. Elle retrace entre fin des années 1860 et 1905, les moments-clés d’une autre histoire de l’impressionnisme, où la réception des oeuvres, leur diffusion, leur circulation sont considérées comme un élément de leur meilleure compréhension.
Cette exposition prend place dans les salles du Musée du Luxembourg qui abritait au temps de Paul Durand-Ruel le musée des artistes vivants, où les impressionnistes ont été difficilement et lentement acceptés.
A 89 ans, quelques années avant sa mort, Paul Durand-Ruel réalise qu’
« Enfin les maîtres impressionnistes triomphaient comme avaient triomphé ceux de 1830. Ma folie avait été sagesse. Dire que si j’étais mort à soixante ans, je mourais criblé de dettes et insolvable, parmi des trésors méconnus… ».
Il a risqué 2 fois la faillite à 15 ans de distance, d'une part à cause de la chute de la bourse d'autres part à cause de l'éveil de la concurrence. Son succès avait fait des émules.
Cette exposition est organisée par la Réunion des musées nationaux - Grand Palais en collaboration avec le musée d’Orsay, la National Gallery, Londres et le Philadelphia Museum of Art.
Elle sera présentée à la National Gallery de Londres du 4 mars au 31 mai 2015, puis au Philadelphia Museum of Art du 24 juin au 13 septembre 2015.
Paul Durand-Ruel
Le pari de l’impressionnisme
ouvrage collectif sous la direction scientifique de Sylvie Patry
L’exposition est accompagnée d’un catalogue réunissant des essais et des notices des oeuvres exposées faisant le point sur les relations entre Durand-Ruel et les impressionnistes à la lumière de recherches inédites, favorisées par la collaboration des Archives Durand-Ruel.
En dehors d’une biographie de Pierre Assouline chez Gallimard, il n’existait à ce jour aucune publication sur Durand-Ruel. (Que grâce lui soit rendu)
Paul Durand-Rue, Le pari de l’impressionnisme 9 octobre 2014 - 8 février 2015
Musée du Luxembourg 19 rue de Vaugirard, 75006 Paris