The return of the angry expat

Il y avait longtemps que je n’avais pas radoter râler. Mais de temps en temps, je reçois des liens envoyés par d’autres expats. Ce matin, je suis donc tombée sur cet article très intéressant ici. Voilà qu’on s’en prend encore aux expats, ça faisait longtemps. C’est comme la grippe, les franc-maçons, les sélections de cadeaux pour Noel et le palmarès des hôpitaux, ça revient régulièrement.

(La photo vient de expert-manager.fr)

Cette fois, il s’agit encore de nous faire payer des impôts français, puisque je rappelle que nous sommes tous d’infâmes profiteurs multimilliardaires, lâches et méchants. Si. C’est une évidence. Tant que nous restions en France, nous étions pauvres certes, mais honnêtes, sympathiques, avenants, le cheveux lisse et le sourire lumineux, et hop, dès qu’on a mis un orteil sur la frontière, on s’est transformé en monstres ignobles, boutonneux, fourbes, à l’haleine fétide et croulant sous des montagnes d’or, probablement amassées dans des conditions douteuses. Je ne vois que ça.

Déjà, j’ai du mal à comprendre la logique de la chose: les impôts, ça sert bien à payer les services publics, non? Parce que mes enfants sont scolarisés en Angleterre, pas en France. Ça nous ferait un peu loin tous les matins de devoir traverser la Manche pour aller à l’école. On se fait soigner par le National Health Service. Il vaudrait mieux qu’on prenne l’avion pour aller voir un médecin français à chaque rhume des enfants, parce que leurs parents sont nés en France? J’ai trouvé un portefeuille dans la rue la semaine dernière, j’ai eu tord de l’amener à la police station, j’aurais du faire le voyage en eurostar pour aller le déposer dans un commissariat français? On va encore me ressortir l’histoire de mes études…vu que j’ai fait une école de commerce privée, si je dois quelque chose à quelqu’un, c’est directement à mes parents. Et justement, je ne pense pas que les enfants de maternelle paient beaucoup d’impôts. Leurs parents le font par contre, et les expats, bien que véritables démons suceurs de sang, ne sont pas issus d’une génération spontanée, ils ont des parents (je sais, c’est fou un tel scoop) qui ont donc payé des impôts français du temps où ils étaient scolarisés, comme les miens l’ont fait. Et tous ces politiciens teigneux de tous bords qui hurlent comme des loups après les expats sont-ils capables d’être logiques? Parce que si il veulent qu’on paie des impôts français, il faut accepter aussi que tous les ressortissants étrangers installés en France ne paient plus en France, mais dans leur pays d’origine. Je ne suis pas sûre que l’état y gagne beaucoup.

Mais ce qui m’énerve le plus, ce n’est pas une énième proposition anecdotique, c’est cette manie de s’en prendre à nous. Cette caricature systématique de l’expat, ou plutôt de l’émigré, qui ne peut être qu’un évadé fiscal traître à sa patrie. Déjà, si elle veut qu’on l’aime, cette fameuse patrie, il faudrait peut-être qu’elle arrête de nous traiter comme ça. Rien que cette animosité, cette étroitesse d’esprit, c’est déjà une bonne raison de fuir! Tous les autres pays du monde sont capables de comprendre l’importance d’une diaspora, mais pas une minorité de politiciens français racornis. Les méchants expats participent au rayonnement économique, culturel et diplomatique de leur pays d’origine à l’étranger, mais ça, ça n’est pas important. Et il n’y a qu’un expat pour pleurer de joie à la vue d’un camembert fermier, avoir des frissons de nostalgie devant une choucroute ou obliger ses malheureux gamins à lire les trois mousquetaires en édition originale à 8 ans. Parce qu’on n’aime pas la France, donc. D’ailleurs c’est pour ça qu’on y revient tous les ans en vacances et qu’on ramène trois tonnes de spécialités locales à chaque fois.

Vous croyez aussi que tout le monde part pour cacher des millions à l’étranger? Parce que là, je sens que je me suis fait avoir…il y a les vrais expats, qui ont des contrats d’entreprises françaises et qui vont là où leur employeur les envoie, ils ne choisissent pas forcément de partir. Ceux là rentreront mais entre temps, ils auront participé à la réussite internationale d’une société française, sont-ils ignobles et sans scrupules quand même! Mais la majorité des français à l’étrangers sont des émigrés, des immigrés dans leurs pays d’accueil. On n’a aucun pactole caché (ou alors, il est vraiment bien caché puisque je ne savais même pas qu’il existait …il faut que je parle d’urgence à mon banquier, tiens). On vit exactement comme n’importe qui autour de nous. On est complètement intégré dans la société anglaise d’ailleurs, la majorité de mes amies françaises sont mariées à des anglais. Bien sur, elles ont fait exprès de tomber amoureuses d’un anglais juste pour ne pas payer d’impôt en France. On a des contrats de travail locaux et les impôts qui vont avec. Je ne veux pas briser le mythe, mais j’ai un mortgage (l’équivalent d’un prêt immobilier), on fait nos courses au supermarché du coin…pas de chauffeur, pas de nanny non plus. Notre vie serait à peu près la même en France. C’est juste que par hasard, et aussi par curiosité, on s’est retrouvé en Angleterre.

Je me répète, mais ça fait 18 ans qu’on est parti. On s’est marié à Dublin, nos enfants sont nés en Irlande et en Angleterre, ils ont la double nationalité sur le papier, mais ne sont pas français. Je ne le suis plus tant que ça. Toute ma vie d’adulte s’est faite en Irlande et ici. Je suis partie juste après mes études, je ne sais pas remplir une déclaration d’impôts en France, acheter une maison, inscrire un enfant à l’école. Je ne connais ni la carte vitale, ni les règles des droits à la retraite. Par contre, je peux vous expliquer comme ça marche en Angleterre, parce que c’est chez moi. Je suis attachée à la France comme on est attaché à ses souvenirs d’enfance et parce que j’y retrouve ma famille. Mais ce n’est pas une raison pour me laisser racketter par des politiciens en mal d’imagination!

Autant je trouve normal d’être imposée où je vis, autant je ne comprends pas un impôt sur la nationalité. Il faut payer pour être français? Le premier qui vient me réclamer un centime, je lui fais manger mon passeport français.

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