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Brooke Singer, de French For Rabbits : "J'aime écrire avec sincérité"

Publié le 28 octobre 2014 par Canalkiwi81 @TitusFR

Choisi par la Danoise Agnes Obel pour ouvrir la plupart des dates de sa tournée européenne, le duo néo-zélandais de dream pop French For Rabbits aura profité d'une appréciable plateforme de lancement pour son premier opus, "Spirits", dont la sortie est programmée ce mardi dans toute l'Europe. Brooke Singer, la chanteuse de la formation, a répondu à nos questions quelques minutes avant son entrée en scène, au Vinci de Tours, le 20 octobre.

Vous souvenez-vous de l'instant où la musique a fait irruption dans votre vie ?

C'est l'image du piano de ma mère qui me vient immédiatement à l'esprit. J'étais alors très jeune et les veines du bois de l'instrument me rappelaient le visage d'une sorcière, avec sa tignasse et son gros nez. Cela me faisait tellement peur qu'il me fallait le recouvrir d'une feuille de papier avant d'en jouer. Je me rappelle d'avoir écrit ma première chanson à l'âge de cinq ans, après la mort de mon chat, Monty. Je l'avais composée uniquement sur les notes noires du piano et, croyez-le ou pas, je suis encore capable de la jouer aujourd'hui…

Aviez-vous l'idée de devenir musicienne dès votre plus jeune âge ?

J'ai longtemps cru que je deviendrais vétérinaire parce que j'adorais les animaux. Je jouais de la musique constamment mais n'ai jamais vraiment envisagé d'en vivre. Je n'imaginais pas vraiment qu'on puisse en faire son métier. C'est vers la fin de mes études secondaires que je me suis désintéressée des études scientifiques au profit de la musique, des arts et des langues. 

Le système éducatif néo-zélandais est réputé pour la qualité de son enseignement des arts, et notamment de la musique. La production musicale foisonnante émanant de Nouvelle-Zélande en est la meilleure démonstration, non ?

Il est difficile pour moi de comparer car je n'ai pas d'idée précise sur l'enseignement prodigué dans les autres pays. C'est vrai que chez nous, la créativité est fortement encouragée à l'école. Je pense par exemple au Rockquest, un concours national lancé en 1988 au sein des écoles secondaires à l'attention des jeunes formations rock. (Beaucoup de grands noms de la scène néo-zélandaise actuelle, à l'instar de Brooke Fraser,  Anika Moa, Bic Runga, Julia Deans, Kimbra ou Midnight Youth, pour n'en citer que quelques-uns, ont été découverts par ce biais, Ndlr).  La Nouvelle-Zélande est un petit monde et la communauté musicale y est très vivante.  Comme Ariana Tikao ou Flip Grater, nous sommes originaires de la région de Christchurch et nous sommes tous très amis. Ces dernières ont tracé la voie et se sont produites en France. Flip y vit même une partie de l'année.

A quel moment s'est formé le duo French For Rabbits ?

J'ai rencontré John à l'issue de mes études secondaires. Il étudiait le jazz à l'université et moi, les techniques de composition… Nous sommes en couple, même si nous restons plutôt discrets à ce sujet… Nous avons toujours eu des penchants musicaux assez différents. Après le tremblement de terre de Christchurch, nous avons déménagé à Wellington, et c'est là, en 2011, que nous avons vraiment commencé à faire de la musique ensemble, environ quatre ou cinq ans après s'être rencontrés. Je détestais ma voix au début et John est la première personne à m'avoir entendu chanter. J'avais très peur. La confiance m'est venue à force de chanter.

Brooke Singer, John Fitzgerald et Ben Lemi Wood, musicien des Trinity Roots, qui a réalisé le premier opus de la formation et qui les accompagne en tournée cet automne.

Votre premier mini-album, "Claimed by the sea" est sorti peu de temps après…

Oui, nous avons commencé à enregistrer nos morceaux seulement quelques mois après nos débuts ensemble. Nous n'avons pas vraiment cherché à assurer la promotion de ce mini-album. Nous l'avons simplement mis en vente sur le web. J'étais assez nerveuse, car je pensais que personne n'aimerait ma voix, ou mes chansons. Mais c'est le contraire qui s'est produit. Nous avons eu de très bons échos, même si ça restait à petite échelle. Ça nous a permis d'économiser un peu d'argent et de réaliser une première tournée en Europe environ un an plus tard. L'occasion de nouer pas mal de contacts.

Cet automne, vous avez assuré la première partie d'Agnes Obel dans le cadre de sa tournée européenne. Comment cela a-t-il pu se concrétiser ?

Cela faisait des années que j'étais en contact avec Agnes par le biais d'internet. Elle n'était pas encore très connue et il était question qu'elle interprète une de mes chansons.  A l'époque, je ne chantais pas et je me contentais d'écrire pour les autres, notamment Tiny Ruins. Mais du fait du tremblement de terre, le projet de collaboration avec Agnes est resté en suspens. Ma vie a pris une nouvelle direction, et j'ai commencé à chanter. J'ai repris contact avec elle pour lui dire que nous nous apprêtions à sortir un album et lui proposer d'assurer sa première partie et elle a tout de suite acquiescé. 

Cette tournée vous a permis de vous représenter dans des pays où vous n'aviez jamais joué…

En effet, nous sommes allés jusqu'en Pologne, ou en Espagne. Et cela nous a permis de jouer dans de très grandes salles. C'est la troisième fois que nous venons jouer en Europe, mais la première fois que nous nous produisons en groupe, avec un ou deux musiciens.

Brooke Singer dédicaçant l'album "Spirits" à l'issue du show au Vinci de Tours, lundi 20 octobre 2014. 

Dans quelles conditions a été enregistré votre premier véritable opus, "Spirits", dont la sortie est programmée ce mardi 28 octobre en Europe ?

Nous l'avons enregistré au début de l'année 2013 dans plusieurs studios de Nouvelle-Zélande, à Auckland et Wellington. Certaines pistes vocales ont aussi été enregistrées à la maison, car je suis toujours intimidée lorsque je dois chanter en petit comité… Notre ami Ben Lemi Wood, musicien des Trinity Roots, a particulièrement soigné la production en accentuant le côté onirique. Le résultat est bien plus dynamique que ce que nous avions pu faire sur le mini-album de nos débuts. Notre son est désormais davantage celui d'un groupe.

Le son de l'album est très riche, en effet…

Ce n'était pas vraiment l'idée initiale. Mais le projet s'est peu à peu développé, et nous avons superposé de nombreuses strates. De nouvelles textures sonores, du violon, etc.

Brooke Singer et John Fitzgerald.

Quel est votre rapport à l'écriture ?

J'aime écrire avec sincérité. Je ne pourrais pas écrire quelque chose qui ne me ressemble pas. J'attache beaucoup d'importance à la qualité de l'écriture. J'aime manier les métaphores, souvent d'ailleurs inspirées du monde maritime. Le fait d'avoir grandi au bord de le mer n'y est sans doute pas pour rien. L'essence-même de la Nouvelle-Zélande infuse profondément mon écriture. 

Qu'avez-vous de prévu à l'issue de cette tournée européenne ?

Nous allons promouvoir l'album chez nous pendant quelques mois, et puis nous espérons revenir en Europe. Durant cette tournée, nous avons écrit trois ou quatre nouvelles chansons, et nous aimerions aussi les publier dans quelques mois, sous la forme d'un mini-album.

Allez-vous faire comme une autre de vos compatriotes, Flip Grater, qui parvient à ne vivre que l'été en passant six mois en France et le reste de l'année en Nouvelle-Zélande ?

Peut-être bien (rires).  J'aime beaucoup la France, particulièrement la campagne et ses vertes collines, les petits villages et leurs très vieilles demeures. mais il faut vraiment qu'on se décide à apprendre votre langue. Notre intention est en tout cas de revenir chaque année si possible !

Surtout avec un nom prédestiné comme le vôtre, "French For Rabbits" ? Où êtes-vous allés chercher ça ?

Ça va peut-être vous paraître fou, mais je n'ai pas un souvenir précis du jour où cette expression est apparue. Comme je l'ai dit, je ne voulais pas qu'on sache, au début, que je chantais, et j'avais créé une page secrète sur le web, qui s'est appelée "French For Rabbits". Je l'ai montrée à quelques amis proches pour avoir leur opinion. Et le lien a fini par être partagé et le nom est resté… J'aime sa sonorité. Ça me fait aussi penser parfois à un ouvrage d'école qui serait conçu pour enseigner le français à des lapins.  

Propos recueillis à Tours le 20 octobre 2014. L'intégralité de cette interview a également été publiée sur le site du Télégramme le 24 octobre.

A noter

Sortie de l'album "Spirits" le mardi 28 octobre en Europe (Lefse Records). Prochains concerts en France : le vendredi 31 octobre, à L'Alimentation Générale à Paris; le 8 novembre, El Chico, à Bordeaux.

Dans les bacs dès le 28 octobre : "Spirits"

Choisie par la Danoise Agnes Obel pour ouvrir la plupart des dates de sa tournée européenne de l'automne (notamment à Paris, Tours et Amiens), la formation néo-zélandaise French For Rabbits a bénéficié d'un sérieux coup de pouce pour la sortie de son véritable premier opus, "Spirits", dont la sortie est programmée mardi dans toute l'Europe. Le duo, qui s'est déja taillé une belle réputation en Nouvelle-Zélande et outre-Manche, n'en est pas à son coup d'essai. La formation, lancée en 2011 à Waikuku Beach, dans la région de Christchurch, par Brooke Singer et John Fitzgerald, avait déjà reçu, en 2013, le prix du meilleur duo folk aux New Zealand Music Awards pour son mini-album "Claimed by the sea". Cette nouvelle production très aboutie, réalisée par un musicien des Trinity Roots, Ben Lemi Wood, légende vivante aux antipodes, étonne d'abord par la somptuosité des arrangements. Cette dream pop atmosphérique aux ambiances éthérées - et iodées -, qui nous ramènent parfois aux grandes heures des Cocteau Twins, présente aussi des qualités poétiques indéniables. Dix titres flamboyants qui s'impriment durablement, à l'image de la ballade incandescente "Spirits" ou de l'entêtante "Woke up to a storm". Le duo lancera officiellement son album à Paris, vendredi, à L'Alimentation Générale.  

(Lefse Records)

Pour en savoir plus :

Le site officiel de French For Rabbits

La page Bandcamp du groupe

La page Facebook de la formation 


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