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Les paysans face à l'agro-industrie : Chanter pour mieux se faire entendre
Le 28 octobre, neufs militants de la Confédération paysanne vont se retrouver devant la Justice. Leur crime ? Avoir réalisé un tag géant et avoir démonté quelques engins de chantier et une salle de traite pour dire non à la ferme-usine des Mille Vache (située dans la Somme). Pourquoi ? parce qu'ils refusent l'industrialisation de l'agriculture, et qu'ils ont choisi l'action plutôt que de se résigner à disparaître. Car dans cette ferme-usine, les vaches ne verront, de leur vie, ni un pré ni un brin d'herbe. Ici, on exploite l'animal comme une machine. Et les paysans ne sont plus nécessaires...
Pour soutenir ces 9 militants, tous les paysans et les citoyens sont invités à se rassembler ce mardi 28 octobre 2014 à 9h au Palais de Justice d' Amiens. L'association Novissen a écrit une chanson à cette occasion que chacun pourra chanter devant le Tribunal, sur l'air du Chant des partisans.
Voici quelques unes des paroles :
Ohé, citoyens, ouvriers et paysans, c'est l'alarme
On ne se laissera pas polluer et maltraiter sans vacarme
Sortez de la ville, des banlieues, des campagnes camarades
L'argent, le profit, on rendu notre terre bien malade
Ohé l'exploiteur qui méthanise notre avenir, on résiste
On reste debout pour défendre notre monde, on résiste
C'est nous qui brisons, les tromperies, les mensonges, les chimères
Dans les fermes-usines, pour les bêtes comme pour les hommes, marche ou crève
Ram'ry entends-tu la colère qui nous vient de la plaine ?
Ram'ry entends-tu la souffrance des bêtes à la peine ?
Voir la vidéo du chant Novissen contre la Ferme des Mille Vaches sur www.dailymotion.com
Note : L'exploitation des Mille Vaches a été créée par l'entrepreneur Michel Ramery
Les paysans ont besoin du soutien de tous les Français
"L'agriculture est en train de se crasher dans le mur de l'industrialisation à outrance. Mais que veulent les citoyens ? Que veulent les paysans ? Que veulent les élus ? Des fermes ou des usines ? Doit-on " fabriquer " l'alimentation comme on multiplie les pièces de voiture ? Non, non et non !" s'indigne Laurent Pinatel, Porte-parole de la Confédération paysanne. "Nous revendiquons une agriculture avec des paysans. Des paysans qui ont un lien particulier avec leurs animaux, avec la nature... des paysans qui donnent un sens à leur vie, qui font que notre pays resplendit pour son excellence culinaire ! C'est tout ça qui se joue en ce moment... c'est cette page qui va se tourner sur les paysans si nous ne faisons rien..."
Pourquoi les paysans sont en colère ? Quels sont les enjeux de ce procès ?
Une déclaration a été publiée ce 27 octobre sur le site www.confederationpaysanne.fr. Elle explique lpourquoi les paysans sont en colère et pourquoi tous les Français sont concernés :
" Le nombre de paysans est en chute libre. La modernisation, qui a d'abord permis d'améliorer les conditions de travail, a conduit à une industrialisation de l'agriculture qui détruit progressivement le secteur. Il n'est plus question de sélectionner des semences à la ferme. Les industriels font la loi et nous imposent leurs OGM. Impossible aussi de gérer un troupeau avec le savoir-faire de l'éleveur, le puçage électronique des petits ruminants est obligatoire. Quant aux produits transformés sur la ferme, la multiplication des normes sanitaires a fait place nette pour les produits industriels.
Ce ne sont là que des traits saillants d'un mouvement poussé par les politiques agricoles. La PAC continue à soutenir l'agrandissement et à exclure les plus petits. La Loi d'avenir agricole, votée en septembre, ne fait rien pour protéger les paysans. La fin des quotas laitiers encouragera une explosion de la production face à laquelle beaucoup ne tiendront pas le coup. De toutes parts, on appelle les paysans à augmenter les volumes, à réduire les coûts. On fait semblant d'oublier ce qu'est une crise de surproduction.
La ferme-usine des 1000 vaches est le symbole de cette folie. 9 millions de litres de lait, vendus à 250 euros la tonne alors que les éleveurs s'en sortent à peine avec 350 euros. Le lait devenu sous-produit du lisier qui vient alimenter un méthaniseur géant. Un projet dont la rentabilité ne tient qu'à la production d'énergie subventionnée.
Les paysans doivent-ils regarder leur métier disparaître sans rien faire ? Il était temps de lancer l'alerte, de crier l'urgence de réagir si nous voulons continuer à voir des paysans dans les campagnes.
La Confédération paysanne a donc pris ses responsabilités en allant, par trois fois, sur le chantier de l'usine des 1000 vaches. Le risque était grand, bien sûr, de se retrouver devant un juge. Mais que signifie ce risque face à celui de leur disparition ?
Aujourd'hui, cette action légitime est criminalisée. La Confédération paysanne est allée à l'encontre de la volonté de nos gouvernants qui pensent en cours de bourse et en balance commerciale. Des militants qui dérangent et la répression syndicale se met en marche. En face, le promoteur des 1000 vaches, Michel Ramery, a installé ses vaches, en toute impunité, malgré les irrégularités flagrantes et les méthodes d'intimidation dignes de films de gangsters. Le deux poids deux mesures est évident.
Le fossoyeur des paysans, 369e fortune de France, a donc bien plus de soutien que n'en ont quelques centaines de milliers de paysans. Et qu'importe que les fermes disparaissent du paysage, que la désertification des campagnes se poursuive, que le chômage continue d'augmenter, que nous n'ayons plus qu'une alimentation standardisée, pourvu que la finance continue à s'engraisser."
Le chant de révolte contre l'industrialisation à outrance de l'agriculture résonnera-t-il dans toute la France ce 28 octobre ?
Mathilde Emery