Who are you Unknown Pleasures Records?

Publié le 27 octobre 2014 par Hartzine

J’ai rencontré, ou plutôt commencé à correspondre avec Pedro il y a plus de dix ans… A l’époque, je sortais d’école de cinéma et je cherchais une musique choc pour illustrer mon court métrage de fin d’année. C’était une époque où la hardtek faisait encore fureur – les magasins de musique indus pullulaient dans les quartiers de Bastille, mais elle intégrait aussi parfaitement les bacs de la FNAC. Aujourd’hui, cold wave, minimal wave sont devenus des musiques marginales, bien qu’attirant un nombre toujours plus nombreux de fans grâce à un revival contaminant peu à peu techno, ambient, voire même pop musique. Entretien au vitriol ici avec un pilier du genre, patron de Unknown Pleasures Records, et made in France s’il vous plaît….

Pedro Peñas Robles l’Interview


Pedro, tu es dans la musique depuis pas mal d’années. Pourquoi avoir créé Unknown Pleasures Records aussi tardivement ?

J’ai commencé tout d’abord comme DJ il y a vingt-cinq ans, c’était mon vrai job, puis je suis devenu musicien il y a quinze ans avec HIV+. Je n’avais pas ressenti le besoin de monter ma propre structure auparavant car j’étais signé sur d’autres labels. A l’époque, l’underground power noise ou techno indus était vivace et des gens misaient des thunes sur des productions radicales comme les miennes, les disques sortaient les uns après les autres, que ce soient les miens ou ceux des très nombreux groupes que j’ai soutenus tout au long de ma carrière sur des tas de compilations. J’ai tourné pas mal au début des années 2000 avec la musique que je faisais à l’époque, pourtant très bruitiste, brute et radicale. Le son de HIV+ m’a amené dans des contrées lointaines et m’a permis de voyager sur d’autres continents pour exporter ma zique. Voila pourquoi il ne m’est pas venu à l’idée de monter moi-même un label à cette époque là.

En même temps, créer un label en 2014, c’est un peu comme sortir un nouveau magazine musical, ça ne sert strictement à rien en termes d’impact et de reconnaissance et c’est voué à l’échec financier à très court terme. Mais c’est justement dans un contexte de crise profonde du format physique que j’ai décidé de prendre le risque de me lancer dans cette aventure. Certains événements, comme la sortie de la compilation hommage à Daniel Darc & Taxi Girl que j’ai tenue à bout de bras passionnément, m’ont poussé dans cette logique de prendre les choses en main et de faire ce que plus personne n’avait envie de faire : publier des disques qu’on puisse encore toucher, sentir et chérir.

Comment définirais-tu l’esthétique de ton label ? Y a-t-il une ligne musicale que tu comptes faire perdurer ou es-tu au contraire ouvert à différents styles de musique ?

Notre but avec le label n’est pas de divertir les gens ou de les maintenir dans une nostalgie caricaturale, mais de les plonger dans une uchronie musicale, un monde parallèle empreint d’une certaine mélancolie, d’un romantisme obscur et connoté par des sons synthétiques particuliers. J’ai une fascination certaine pour les sons post-punk, cold minimalistes ou new wave du début des 80′s mais je ne conçois cette passion qu’avec l’exigence d’une production ancrée dans son présent. Je déteste les revivals mercantiles, je n’aime pas les caricatures et la dévotion dont certains font preuve pour des tas de groupes de leur jeunesse juste parce que ça leur rappelle leur premier flirt ou leur premier joint. Avec Unknown Pleasures Records, il n’y a pas de retour en arrière, mais ce passé pose des jalons qui me permettent de voir le futur autrement. Les racines post-punk et wave nous apportent une palette de sons, de couleurs émotionnelles et d’expériences que nous voulons pousser plus loin. Les bavardages incessants dans la presse ne nous intéressent pas, seul les objets publiés comptent.

La langue de bois dont souffre également le milieu « underground », c’est fini, nous ne laisserons plus rien au hasard et ça commence à se savoir. J’ai observé de très près pas mal d’artistes reconnus du milieu techno et vu comment, à un moment donné de leur carrière, certains ont pris des chemins plus balisés ou ont vendu leur âme pour des synchros de publicités ou des sponsorings de grandes marques. La musique n’est pas un faire-valoir pour moi, que ça rapporte de la thune ou pas, j’en n’ai rien à battre, ce qui est important c’est ce qu’on fait ressentir aux auditeurs et au public.

Le disque inaugural du label était un Tribute to Daniel Darc & Taxi Girl, choix plutôt étrange au vu du nom du label, tu ne trouves pas ? On aurait pu plus s’attendre à quelque chose autour de Joy Division, alors pourquoi ce choix ?

Le choix du nom du label est bien évidemment un hommage au premier album de Joy Division, qui est pour moi le monolithe noir de la musique du XXIème siècle. Mais hormis cette référence, j’ai voulu donner du sens au terme « plaisirs inconnus » en m’adressant à un nouveau public que celui que j’avais avec HIV+, un public plus curieux, plus cultivé, plus hédoniste aussi.

Concernant le tribute à Daniel Darc il faut savoir qu’aucun label indépendant français à qui j’avais envoyé les reprises n’a daigné répondre à ma proposition de rendre hommage à l’ex-chanteur de Taxi Girl. J’ai même reçu des mails de ce genre : « Ce tribute à Daniel est vraiment chouette mais je n’ai pas envie de raquer des sous à la Sacem ! », ou alors : « Super tracklist, mais sans des artistes connus de la variété française ça n’intéressera personne ». Qu’est-ce que j’en ai à foutre de la variété française !

Ce qui m’a intéressé avec le tribute à Daniel Darc, c’est de reprendre les chansons d’un type que j’ai toujours aimé et respecté, même quand il errait claudiquant et défoncé dans les rues de Paris. Darc était un vrai musicien de l’underground, un artiste à vif qui, parfois, quand il arrivait à sortir la tête du trou, arrivait à nous remplir l’âme de poussière d’étoile. C’est un mec dont beaucoup de chansons m’ont profondément touché, notamment ses albumsNijinski mais aussi le très pop Crève-Cœur, qui est arrivé dans un moment de ma vie ou j’étais sentimentalement au bord du gouffre. Dans ces moments là, on rentre facilement en empathie avec les grands tourmentés de la vie. Depuis Taxi Girl, il y a toujours eu un peu de Daniel Darc en chacun de nous, enfin je pense qu’il faut avoir plus de quarante ans pour ressentir ce genre de trucs, et avoir vécu les années 80…  du côté obscur.

En tout cas nous l’avons fait, il s’est vendu intégralement, il y a eu quelques soirées sympas autour de l’événement, surtout celle que nous avons organisé au Point Éphémère avec des concerts et des DJ. Bref, les groupes qui sont sur ce disque ont tous été extraordinaires et je les remercie une fois de plus pour avoir contribué à perpétuer un peu de la mémoire de ce chanteur/poète si attachant.

Une petite mise au point qui intéressera les trois ou quatre détracteurs que nous avons pu croiser sur le net : vu la demande de mon distributeur, j’aurais pu en tirer 2000 exemplaires, mais je me suis engagé auprès du représentant des derniers ayants-droits de sa famille de ne pas faire de repressage et de respecter la série limitée à 500 exemplaires.

Et donc pour répondre encore à ta première question, c’est justement pour pouvoir être distribué en FNAC par La Baleine que j’ai été obligé de monter le label Unknown Pleasures Records. J’ai commencé par rédiger un petit manifeste que l’on peut lire ici.

Comment choisis-tu les artistes avec lesquels tu travailles et quelle relation développes-tu avec eux ?

Je choisis les musiciens en fonction de mes propres goûts et aspirations en dehors du temps et des modes. Étant donné que je n’arrive pas à ressentir quelque chose de durable pour les musiques simplement fonctionnelles, comme la techno au kilomètre que déversent certains labels qui se disent pointus, il faut que les gens qui prétendent venir chez moi expriment ce qu’ils ont vraiment sur le cœur à travers leurs machines ou leur voix.

Les techniciens, les ingénieurs du son, les geeks du synthé ou des plugs-in en tout genre ne m’intéressent pas, même s’ils sont nécessaires à la conception d’une œuvre. En revanche, la petite gonzesse sortie d’une école d’art de Glasgow et qui bricole avec une vieille boite à rythmes des chansons minimalistes et touchantes dans son studio, en chantant comme si elle avait subit les mêmes vicissitudes dans sa vie qu’une Billie Holliday ou qu’une Nico, là, oui, je prends tout de suite ! Elle se nomme d’ailleurs Hausfrau et son premier album est sorti chez nous le 18 septembre, jour du référendum avorté de l ‘indépendance de l’Ecosse, d’où elle est originaire.

Tu as récemment collaboré avec des artistes aussi divers que David Carretta, The Horrorist ou In Aeternam Vale. Qu’est-ce qui te plaît dans leurs univers ?

David Carretta, je le connais depuis super longtemps, mais c’était juste une connaissance. Je l’ai croisé dans des raves, des soirées avec notre vieil ami commun The Hacker ou dans le club Trolleybus ou je bossais à Marseille dans les 90′s, mais rien ne prédestinait à ce que nous bossions sur son label un jour.

L’été 2012, j’ai eu l’idée de faire passer mon nouveau groupe pour un duo d’homosexuels berlinois, au départ, et j’ai envoyé nos premiers morceaux d’Adan & Ilse à Space Factory, entre autres, en leur disant que nous étions gay, moi, chanteur DJ d’origine bolivienne, et mon comparse Usher (de Norma Loy), l’amant berlinois épris de vieux synthés, puis Peter, le troisième membre du groupe, est arrivé et il a fallut faire ménage à trois.

David a écouté notre maquette sans a priori, il a adoré tout de suite nos compos minimalistes et fragiles, puis nous a signés dans la foulée pour notre premier maxi, From The Waves. De plus, comme Peter, avait déjà sorti une paire de maxis en digital chez Space Factory, ça nous a permis d’affranchir David en lui révélant notre petit subterfuge, ça l’a bien fait rire et tout s’est très bien passé avec lui. Carretta, c’est un type adorable, rien à voir avec tous ces nouveaux DJ stars de la techno qui ont pris un énorme melon alors qu’ils ont tout pompé à David, à The Hacker, à Millimetric ou à Terence Fixmer !

The Horrorist, ça fait super longtemps aussi qu’on se capte et qu’on parle de faire des trucs ensemble, mais c’est la première fois qu’on achève un truc commun. Son remix du Swallow You All d’Adan & Ilse est vraiment superbe et il a également participé au Tribute To Suicide que je viens de publier sur Unknown Pleasures Records. En revanche, In Aeternam Vale, c’est Usher de Black Egg qui m’a fait connaître récemment en me faisant écouter des remixes très analogiques qu’il venait de faire pour son projet signé sur [aufnahme + wiedergabe]. Ceci dit, tout ça ce sont avant tout des rencontres musicales avant d’être amicales.

Ton son a radicalement changé en quinze ans : il y a une énorme différence entre tes premiers albums sous le pseudo de HIV + et ceux d’Adan & Ilse par exemple. A quoi est due cette évolution selon toi ?

Si t’as cinq minutes, je vais t’expliquer le pourquoi de cette « évolution » qui n’en est pas une pour ceux qui me connaissent depuis longtemps. Nous vivons une époque totalement absurde et amnésique, où chaque nouvelle séquence d’information efface la précédente comme si rien n’avait existé auparavant.

C’est le cas dans la plupart des médias de masse, mais c’est également le cas des médias de niche ou de la presse musicale spécialisée qui fait dans le « jeunisme » à tout prix sans aucun sens du long terme.

Le jeunisme, nouvelle doxa des sphères musicales mainstream comme la pop, le rock, la techno ou le hip-hop, est devenu prépondérant, voire vital, depuis la chute massive des ventes de disques. Au lieu faire sa propre auto-critique – la raison d’un échec total des supports physiques face au piratage phénoménal de cette dernière décennie – l’industrie musicale (et ses ersatz hypocrites que sont les labels et distributeurs indépendants adoubés par une presse papier corrompue) continue année après année à se fourvoyer à tenter de vendre de la merde jetable et remplaçable au lieu de bosser sur des artistes plus originaux et moins malléables à long terme.

Il est d’ailleurs à noter que l’on ne retrouve pas cette obsession du jeunisme dans les arts plastiques par exemple – ces arts majeurs comme disait Serge Gainsbourg – ou au contraire un artiste expérimenté est reconnu à sa juste valeur, respecté et suivi religieusement du fait qu’il a atteint avec les années une maîtrise totale de son médium d’expression. Dans les musiques dites « modernes » en revanche, c’est tout le contraire (exception faite dans le classique ou les musiques savantes), il faut à tout prix trouver un nouveau jeunot à traire, le surexposer médiatiquement et le vendre rapidement avec un consensus hallucinant dans tous les médias très souvent esclaves du système qui n’ont de « culturel » que le nom.

J’ai également fini par constater que les milieux de la musique pop, rock, etc. finissaient par faire l’éloge – une fois de plus à l’unanimité – d’artistes qui étaient mourants ou vraiment en fin de vie après des décennies de galères. C’est le cas de Johnny Cash, dont la plupart des médias européens n’avaient rien à foutre dans les années 80 ou 90 et qui, soudainement, a vu sa notoriété exploser de ce côté-ci de l’Atlantique après avoir sorti ses fameux American Recordings bourrés de reprises de groupes pop, rock ou métal internationalement connus (Depeche Mode, U2, Soundgarden, NIN…). Il est arrivé à peu près la même chose à Lee Hazlewood à la fin de sa vie, et on constate le même consensus autour des derniers albums – il faut l’avouer : inécoutables – du vieux Scott Walker.

Aujourd’hui dans la pop, le rock ou l’électro, il faut être un jeune newcomer aux dents longues ou un vieillard à l’article de la mort pour pouvoir bénéficier d’une visibilité hors du commun dans les médias. Entre les deux, tu crèves tout seul dans ton coin ou tu pointes à Pôle Emploi, ce qui revient d’ailleurs à peu près à la même chose.

C’est juste pathétique, et de ce fait je suis le premier heureux de constater que le marché de la musique pour les masses se soit écroulé aussi fortement. Bien fait pour leur gueule ! A force de prendre les gens pour des vaches à lait et de leur vendre des plagiats, des compilations insipides, des revivals à deux balles et de la musique de supermarché merdique, nous arrivons au constat actuel. Le degré zéro de la musique a été atteint il y a déjà longtemps, mais de nos jours, ils sont passés bien en dessous.

En même temps, je dis ça mais je ne me sens pas du tout concerné par cette bérézina. Je n’ai pas besoin de ce que pourrait me rapporter la musique pour vivre ou pour plaire à un public. Je fais ce que je veux, je suis libre et réellement indépendant. Pendant longtemps j’ai fait de la musique expérimentale, bruyante, difficile d’accès ou mentalement perturbée par opposition à ces musiciens qui vendaient leur âme pour vivre un quart d’heure de gloire dans des pseudos charts bidons ou avoir leur tronche dans un magazine qui finira aux chiottes quelques semaines plus tard. Au final, j’ai dit tout ce que j’avais à dire dans le milieu indus, dark ou goth. A savoir que des millions de disques sont envoyés au pilon chaque année. C’est la seule place que méritent la plupart des artistes de ces scènes allemandes en général.

A la fin des années 90, toute une nouvelle scène électro dark est apparue avec des presets de sons de synthés utilisés dans la trance la plus commerciale ou l’eurodance la plus vomitive, tout cela mixé à des riffs de métal super basiques. Comme sortis du trou du cul du monde, nous avons vu arriver des wagons entier de groupes dits « EBM » (rien à voir avec la vraie EBM européenne des années 80 initiée par DAF ou Front 242) avec des voix de méchants maléfiques ridiculement saturées et des beats, aussi crétins que ceux de la makina, qui ont fini par métamorphoser le mouvement dark initial en un ramassis de crétins finis avec des looks de ploucs satanistes avec moumoutes fluos et New Rock à 200 euros encore plus ridicules qu’un vampire en plastoc dans The Blade.

Quand j’ai composé les premiers albums de HIV+, j’ai voulu justement vomir toute cette merde « hellektro » à la Suicide Commando, Wumpscut, Das Ich, etc. en la détruisant et en la caricaturant à tel point que même des gens comme Hocico m’ont demandé de les remixer en 2004, ce qui prouve que mon ironie n’a pas été comprise. Bon, j’ai quand même volontairement massacré leur morceau, comme je l’ai fait pour Morbid Angel en 2010 quand Season Of Mist m’a demandé de m’occuper de la sélection du double album de remixes de ce fameux groupe death metal.

Il y a trente ans, j’écoutais autant de la new wave que de l’industriel, de la cold wave, de l’EBM, du noise ou de la batcave et en 2014, je continue exactement dans la même veine. Il n’y a donc aucun retournement de veste, je fais toujours la même chose dans un même esprit, même si je creuse d’autres sillons que j’avais longtemps laissés de côté par manque d’assurance ou de maîtrise artistique.

Au niveau vocal, par exemple, la seule différence entre mes disques de HIV+ et ceux d’Adan & Ilse, c’est qu’avant je me cachais derrière des effets et des distorsions plongées dans un magma sonore violent alors qu’aujourd’hui, et grâce à mes deux comparses Usher et Peter qui m’ont fortement poussé dans cette voie, j’ai fini par ne plus avoir envie de cacher les sensations et émotions que ma voix, fragile, incertaine, avec encore un peu de maladresse, me permet d’exprimer tel un instrument désaccordé mais… bien humain. Avec la synth pop que nous faisons aujourd’hui, je veux faire du bien aux gens qui nous suivent, donner au public la possibilité de ressentir des sensations positives à travers notre musique, de se laisser transporter dans l’univers onirique et unique que nous avons réussi à créer avec Adan & Ilse.

Mais il n’y a pas que ça. Quelque part j’ai aussi envie de démontrer que 90% des groupes qui se disent électro pop ou wave font tout simplement de la merde avec des chanteurs chauves qui la plupart du temps sont profs d’anglais, agents immobiliers ou vendeurs de matériel informatique et qui rêvent secrètement de finir au lit avec Dave Gahan ou Martin Gore.

Dans un autre domaine plus pointu, j’avais aussi envie de dénoncer ce consensus stupide autour de types comme Fernow de Prurient/Vatican Shadow, Mondkopf ou Perc alors qu’ils pillent l’héritage techno industriel de leurs aînés des années 90, notamment le son de groupes des labels Ant Zen, Hands ou Galakthorro.

Si vous avez vingt ans et que vous pensez vraiment que Mondkopf a inventé quelque chose avec Hadès jetez une oreille sur A Shocking Hobby de Speedy J. sorti chez Mute à la fin des années 90, vous comprendrez très vite le sens de « techno industrielle ».

Je profite de cette interview pour pousser aussi une petite gueulante sur la situation actuelle des milieux musicaux. Quand tu penses à tout cet argent des contribuables gaspillé dans des subventions à une télévision publique que plus personne de normalement constitué ne regarde, tous ces millions filés complaisamment à des grands journaux qui font semblant d’être indépendants, toutes ces enveloppes bien dotées pour financer des festivals de merde type celui d’Avignon ou d’Aix-en-Provence ou n’importe quel festival du sud qui s’adresse aux plus de soixante-dix ans, tous ces millions engouffrés dans des assos péraves alors que la plus grande partie de la jeunesse se barre dans les pays voisins l’été venu pour profiter d’une vraie offre culturelle adaptée à son époque, ça me révulse.

Comme le dit philosophe qui a écrit cet article du Monde : « Seule est un peu inventive la musique électronique. » J’espère d’ailleurs qu’il ne se réfère pas à David Guetta ou aux Daft Punk !

Pourrais-tu nous présenter des projets LAAG ou Fluxus, encore très confidentiels ?

Ce sont justement des projets qui sont ultra confidentiels et qui, vu la conjoncture actuelle, le resteront probablement pour l’éternité… ou pas, car personne n’est à l’abri d’un succès.

LAAG tout d’abord, c’est un musicien breton qui officie dans le plus pur anonymat depuis toujours, à l’exception d’un maxi sorti en vinyle avec Commuter contenant un remix par The Hacker. Je n’ai jamais rencontré Ronan de LAAG en personne mais j’ai toujours adoré sa voix et la façon très particulière qu’il a de faire sonner ses synthés old school. Quand j’écoute ses morceaux, j’ai l’impression d’avoir déniché une vieille tape obscure des années 80 ou un de ces vieux 45 tours rarissime d’un groupe synth pop que j’ai toujours aimés. Pour moi, c’est le Frank Tovey français, sauf que personne ne le sait.

Pour ce qui est de Fluxus, c’est un duo de musique industrielle minimaliste fondé par mon vieux compatriote catalan, Mauri, et moi même, autour de la thématique des maladies mentales. On n’a tenu à faire qu’un seul album, sec et concis, et il n’y aura qu’un seul concert dont nous choisirons le jour et le lieu quand nous serons prêts pour cela. Ça sonne quelque part comme un mélange de Pan Sonic et de Klinik mais sous kétamine.

En septembre est donc sorti sur mon label le premier album d’HAUSFRAU, Night Tides, pour fans du The Cure de l’époque cold wave et des productions « angst pop » du label Galakthorro, dont l’ingénieur du son Friedemann Kootz a fait le mastering. Et puis, la cerise sur le gâteau : nous venons de publier un  tribute aux légendaires Suicide qui risque de faire parler de lui vu les invités prestigieux présents sur la tracklist, des invités comme les mecs de Front242, DAF, Neon Judgement, Absolute Body Control, Die Krupps, David Carretta, The Horrorist, Marc Hurtado avec Alan Vega en personne, puis quelques autres moins connus mais exceptionnellement bons dans leurs genres respectifs. Le disque est distribué par La Baleine ou en vente directe sur le site d’Unknown Pleasures Records.

Quels sont les artistes avec qui tu aimerais absolument travailler ?

Bon, j’ai déjà travaillé avec pas mal de monde dont beaucoup de mes anciens héros de jeunesse. Il en reste encore beaucoup avec qui j’aimerais faire des trucs, mais sinon dans un futur idéal j’aimerais bien sortir un nouvel album de Sisters Of Mercy, un 45 tours d’Haus Arafna, faire une rave avec Necro Deathmort en live, sortir un nouvel album de Position Parallèle ou même de The Hacker s’il décide un jour d’arrêter de faire de la techno et qu’il me réserve pour UPR ce fameux disque influencé par le  Seventeen Seconds de The Cure dont il me parle depuis dix ans…

Mais pour des tas de raisons différentes, il y a de fortes chances pour que tous ces souhaits ne se réalisent jamais.

Peux-tu nous présenter ta mixtape en quelques mots ?

Oui, mets la cassette dans ta chaîne hi-fi, appuie sur le bouton « loudness », monte le potard à 11, assieds-toi sur ton canapé avec ta copine après vous avoir servi une vodka glacée, allume une clope qui fait rire et écoute attentivement ce qui va suivre. Merci pour tes questions.

Mixtape

00. HIV+ & Wired Brian- dark box (intro)
01. Mondkopf – the stars are falling
02. Fluxus – alzheimer (Shorai remix v2 )
03. Salem – better off alone (Alec Empire Atari Teenage Riot remix)
04. Necro Deathmort – the ultimate testament (remix)
05. Gesaffestein – pursuit (Alek Drive remix)
06. Carretta & Workerpoor- the intruders (The Hacker remix)
07. Audio & Tiga – fever (Kink remix)
08. Front 242 – never stop (Dominatrix Remix V1)
09. Adan & ilse – dream up (Alek Drive instrumental rmx)
10. Monolith – near crash
11. Dimeuhduzen- resistance is useless
12. Lado – identify yourself
13. Dimeuhduzen- first nature
14. Gabi Delgado – science fiction liebe