Un vent venu de l’Ouest souffle sur la Rock School Barbey en ce jeudi soir. Du fin fond de l’Ouest, là-bas, très loin, au pays des caribous, du sirop d’érable et de la poutine. Allez, on range les clichés et on attend avec impatience les magnifiques Timber Timbre, précédés de Tasseomancy. Deux groupes canadiens sur une même scène à Bordeaux, notez que c’est plutôt rare (et ça s’apprécie).
TASSEOMANCY
Un mec seul avec sa guitare nous propose une balade (très) mélancolique. Autant dire que pour commencer un set, on a vu mieux. Mais au moins, le public est prévenu. On n’est pas là pour secouer les cheveux et égorger des poussins. En tout cas, pas ce soir.
Trois filles viennent tenir compagnie au jeune homme et les chansons s’enchaînent. Un tempo lent, bien servi par le jeu subtilement jazzy du batteur, des mélodies mélancoliques à la guitare douze cordes, des basses faites de synthés et une voix de tête … spéciale, mais parfaitement maîtrisée par la chanteuse fantasque. Une sorte d’Arielle Dombasle version famille Adams. Arielle Adams quoi. Elle passe des aigus aux graves et inversement sans grand souci et le tout en simultané avec la voix de la guitariste, plus sobre et parfois celle du batteur. La sauce prend et, même si l’on croit facilement reconnaître du Cocorosie derrière tout ça, Tasseomancy possède bel et bien une identité propre et sait la retranscrire sur scène. Le public est amené dans un univers quelque peu baroque, teinté de nostalgie, de voyages et d’histoires d’amour. Le tout sur un tempo so smooth mêlé à des chants parfois à la limite du lyrique. Le tout manque peut-être de mordant pour précéder un groupe comme Timber Timbre …
Et en effet, la première partie est vite oubliée dès les premières notes sorties de la basse du génialissime Taylor Kirk.
Ce qui saisit, dès le début du set, c’est bien sûr cette voix profonde, complètement habitée nous comptant des histoires d’amour façon crooner torturé. Quelquefois un cri, un sursaut dans la voix qui rappelle le King, histoire de vous couper dans vos rêves brûlants. On y replonge volontiers dans ces rêves au fil des morceaux, tous aussi bien maîtrisés les uns que les autres. On s’imagine dans un western tourné au ralenti, avec un Léonard Cohen assis sur un banc chantant de suaves chansons …
La magnifique « Black Water » et son sublime refrain me déçoivent un peu : le refrain, justement, est pris plus haut que sur l’album, donc la voix du chanteur n’a pas le même effet. Seule déception du concert. « Hot Dreams » est parfaitement maîtrisée, un vrai délice (même si on regrette l’absence du saxo de Colin Stetson sur le solo, mais, à la Gibson version sixties, ça passe). L’americana très filmogénique* et enivrante des Canadiens semble s’arrêter net avant que Kirk, seul, ne revienne nous envouter avec deux morceaux en guitare/voix du plus bel effet (dont la très belle « Demon Host »). Malgré ses tics nerveux et ses cheveux teints en blond, ce mec dégage quelque chose qui laisse admiratif. Sans attendre, Arielle Adams et le reste de Timber Timbre reviennent pour finir en beauté « Run From Me », commencée par le blondinet. Puis s’enchaînent trois morceaux en guise de bouquet final, comme pour laisser une marque indélébile sur nos joues. Oui, Timber Timbre en live, c’est une vraie claque.
*Filmogénique : «qui collerait parfaitement à la bande originale d’un film quoi !» Si quelqu’un pouvait nous aider à retrouver le vrai mot, on en serait ravis !
P.S. : un grand merci à Jérémy pour nous avoir accordé sa plume pour un soir.
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