Avec : Roman Polanski, André Katelbach.
Genre : Comédie - Drame.
Origine : France.
Durée : 16 minutes.
Date de sortie : 1960.
Synopsis : Un serviteur maigrelet joue de la flûte et du tambour pour amuser son imposant maître qui se prélasse au soleil devant son manoir. C'est la loi du plus fort...
Avec "Le gros et le maigre", j'en ai fini avec mon petit cycle court métrage. Je remercie d'ailleurs Oreo33 pour le prêt de son dvd "Le court des grands" que je vais maintenant pouvoir lui rendre. Je voulais finir avec celui de Roman Polanski car d'habitude son cinéma m'amuse et c'est donc sans trop d'appréhension que je me suis mis à le visionner.
Et c'est assez surprenant. Au-delà du fait que je trouve le titre un peu brutal dans sa façon de présenter les personnages (ils sont juste réduit à leurs apparences physiques, on ignore leurs prénoms) mais qui tranche bien avec l'inégalité qu'il peut y avoir entre eux, ce scénario de Roman Polanski m'a globalement amusé. J'ai bien aimé le côté très burlesque de cette fable. Pour son premier court métrage professionnel, le cinéaste tout juste sorti de l'école de cinéma s'en sort bien.
Adapté d'une histoire juive qu'il a entendu à propos d'une chèvre que l'on enferme dans une petite pièce avec 12 hommes pour leur montrer qu'il faut se contenter de ce qu'on a et que la vie est bien meilleure une fois que l'on enlève la chèvre malgré le nombre important d'hommes dans la pièce, je me suis amusé. Même si l'inégalité persiste ici entre le gros, représentant le maître tyrannique et le maigre, représentant le jeune serviteur soumis, j'aime cette philosophie qui veut qu'il faut se contenter de ce que l'on a dans une vie qui ne nous fait pas de cadeaux.
Il faut savoir faire avec ce que l'on a, comme ici un simple champ de tulipes artificielles qui rende heureux notre jeune héros, tout en gardant à l'esprit quand même que l'on peut toujours avoir mieux, avec ici cette vision de la tour Eiffel au loin, synonyme de liberté, d'évasion, que l'on regarde du coin de l’œil, que l'on convoite et que l'on aimerait bien atteindre. Avec ses faux airs de comédie burlesque, le court métrage décrit une vision de la condition humaine que j'ai bien aimé.
Devant la caméra, les acteurs s'en sortent plutôt bien. Roman Polanski lui-même en maigre est plutôt attachant. Dans ce film muet, il fait preuve dans sa présence d'une innocence et d'une légèreté assez agréable. On s'amuse avec lui et on s'y attache assez vite. A l'inverse, on ne s'attache pas, mais c'est volontaire, à André Katelbach qui incarne le gros. Tyrannique, profitant de son acquis social, ne faisant rien de ses journées (il se lève même pas pour aller aux toilettes, il se lève juste pour récupérer son serviteurs qui tente de s'échapper), l'acteur incarne bien son personnage. On sent même malgré tout un certain attachement du gros vis à vis du maigre et pas que pour les services qui lui rend. D'ailleurs, lorsque le maigre est attaché à une chèvre, est-ce la chèvre qu'on empêche de partir ou est-ce le maigre ? Le parallèle avec l'histoire juive entendu par Roman Polanski étant d'ailleurs bien amené.
Réalisé par Roman Polanski mais également par Jean Pierre Rousseau, j'ai trouvé que le travail fourni dans la mise en scène était fort sympathique. Il y a l'aspect burlesque bien sûr que l'on ressent dès les premières secondes mais à côté de ça, cette association de musique jazzy (signé Krzysztof Komeda) bonne ainsi que de comédie nous fait tout de suite pensé au cinéma de Charlie Chaplin ou de Buster Keaton. On pense aussi beaucoup au côté cartoon de Tex Avery qui dépeint pas mal eux aussi à travers l'humour les injustices sociales.
Le film n’est ainsi jamais ennuyeux. Bien rythmé, il est même très agréable à voir. On ne voit pas le temps passé et on se sent proche de ses personnages dans un cadre bien exploité. Les décors avec cette maison unique presque en ruine et ce champ à moitié dévasté à qui il faut replanter des fleurs pour donner de la vie apporte un côté encore plus tragique à cette histoire et pourtant, on garde le sourire aux lèvres du début jusqu'à la fin. Une fin touchante non dénué de tendresse dont chacun pourra se faire sa propre interprétation.
Pour résumer, "Le gros et le maigre" fait partie des courts métrages que j'ai bien aimé découvrir. Assez drôle dans son traitement, j'ai beaucoup aimé l'aspect clownesque de ce récit qui n'en demeure pas moins assez intéressant et très profond quand on commence à gratter un peu. Roman Polanski nous raconte sa vision de l'histoire juive qu'il avait entendu et c'est une vision que j'ai trouvé bonne et que je ne regrette pas d'avoir vu.