Face à tant d’injustice sociale, il fallait bien ça, même si cela peut vous paraître bien dérisoire… Hier soir, dans un grand élan spontané qui faisait plaisir à voir, des centaines de comptes twitter se sont mis sans que l’on sache trop pourquoi à dupliquer le fameux tweet de GG Filoche qui a horrifié le bourgeois au cul serré et aux lèvres pincées qui trône à présent au Parti Dominant, et aux figures interchangeables (UMP et PS, même combat économique : saigner les classes populaires jusqu’à l’os ?). Leur discours est toujours le même : le patron le salarié est trop payé, le smic devrait être supprimé ou contourné, les employés ont trop de droits et les patrons pas assez, trop de contraintes, le code du travail est un frein à l’emploi, les fonctionnaires sont trop nombreux, coutent trop cher à la nation, le CDD et le CDI doivent disparaître, il faut contrôler plus sévèrement les chômeurs, les gauchistes sont des monstres préhistoriques qui empêchent de faire des profits colossaux sur le dos des salariés qui n’ont plus aucun droit sinon celui de se taire la société d’évoluer et de se diriger vers davantage de modernité en dépassant les clivages partisans. Nous ne sommes plus dupes de toutes ces belles paroles qui bien que souvent dites de manière doucereuse par Valls ou Macron comme par Copé ou Lemaire, n’en sont pas moins porteuses d’une violence sociale inédite. Le peuple qui ne se reconnait plus dans ces partis et ces discours dominants, et pas davantage nécessairement, contrairement aux idées reçues (que fait-on dire aux abstentionnistes, à présent le parti le plus populaire de France ?), dans les idées à vomir du FN et de ses conjoints, se sent abandonné. Aussi, quand il voit avec effarement cet emballement médiatique et politique, les deux à l’unisson dans une confondante complicité, se répandre dans une touchante unanimité en discours larmoyants sur la bonté et la grandeur du grand patron de l’une des sociétés les moins éthiques qui soit, et de plus fondre comme un seul homme sur sa proie, le bouc émissaire pourtant (malgré lui) parole du peuple qu’est Filoche, il a peut-être le droit de ruer (un peu) dans les brancards, en se sentant injustement désigné à la vindicte médiatique. Pire, il est révolté par l’injustice qui consiste à envoyer le soldat Filoche au tribunal militaire alors que les plus coupables et responsables de ce parti, la bande de la MNEF, les Le Guen, Les Cambadélis plusieurs fois condamnés, les Guérini et autres socialistes bon ton en délicatesse avec la morale et la justice, eux, ne sont jamais inquiétés. Le dernier communiqué d’Ensemble, la formation politique à laquelle j’appartiens dit tout cela bien mieux que moi. Alors, oui, nous nous reconnaissons dans le combat de GG à travers son tweet, malgré ses outrances, malgré l’incompréhension de le voir encore et toujours dans ce parti si éloigné de nos idéaux communs, et nous le faisons savoir, sur twitter, par centaines (et non quelques poignées, Juan), en reprenant en écho le tweet de notre GG national, à qui l’on fait dire ce qu’il ne dit pas. Non, nous ne crachons pas sur les morts, mais sur Total, ses magouilles, son fonctionnement capitalistique prédateur et incontrôlé, et le fait qu’il ne paie aucun impôt en France. Pire, malgré cela, l’Etat devrait peut-être lui faire un chèque pour les bons services qu’il a rendu à l’économie française. En ne payant aucun impôt. Et il faudrait se taire, ne rien signifier, ne pas broncher. Et ben non, nous avons nous aussi une morale, une conscience, un combat. Nous en avons marre que la lutte des classes soit gagnée chaque jour un peu plus par les riches, dont Monsieur De Margerie était un représentant. Et nous le faisons savoir comme nous pouvons, puisque nous ne sommes plus entendus. Il ne faut pas le dire, mais la guerre est là : elle est économique, et nous en faisons les frais chaque jour un peu plus, en plus grand nombre. L’ex patron de Total est mort dans un accident d’avion, pendant que des milliers de paysans se suicident, des centaines de salariés sont victimes de burn-out sous des pressions insupportables, vont jusqu’à s’immoler… Des milliers d’emplois sont supprimés, les trains de licenciements n’émeuvent même plus… Et nous pleurerions la mort d’un homme, un seul, fusse-t-il grand patron et « capitaine d’industrie » ? La mort de Margerie en vaut une autre, surtout quand elle est sacrifiée sur l’autel du grand profit international. Et de cela, nul ne pipe mot parmi les nantis, les ceusse qui ont une bonne conscience malgré les dégâts sociétaux et personnels irréparables. Et donc, dans ce contexte, dans ce flot de tweets nourris de tout ou partie de cela à la fois, voir paraître ce tweet raisonne comme une provocation à notre conscience de classe :
Monsieur De Sarkofrance, tu ferais mieux d’avoir honte de ce que ceux qui ont choisi le camp de Margerie font de sa mort. Tu ferais mieux d’avoir honte de commettre la même erreur que ceux de ta classe et de ton champ idéologique font en réduisant le combat d’un homme à un malheureux tweet, dont je ne partage pas nécessairement la forme, mais le fond. Tu commets la même en réduisant l’ami Pourrito, que tu balances comme ça en place publique (mais il est assez grand pour se défendre tout seul) à un seul tweet. Si tu ne le comprends pas, c’est que tu n’es pas franchement du même monde….. Sais tu ce que c’est seulement, de rechercher un emploi, de connaitre la galère de se voir désigné par les pouvoirs en place comme l’ennemi à abattre bien davantage que le grand patron qui fait des profits incommensurables et part tranquilou en retraite avec son parachute doré et sa retraite chapeau malgré les pertes considérables de son groupe et les milliers de licenciements ? n’est-ce pas plutôt ça l’insulte faite à notre société, et à notre pays ? Tu as choisi ton camp, permets nous de choisir le nôtre. Nous ne sommes pas du même monde. ce qui ne m’empêche nullement, comme tu le vois, de communiquer. Paix à ton âme.