Il est des auteurs qui font l’unanimité, Art Spiegelman est de ceux-là. D’aucun de prétendre que cela est dû au sujet qu’il a choisi d’aborder. Maus, ce n’est pas une BD d’apitoiement, ce n’est pas un ouvrage réquisitoire, ce n’est pas un livre fait pour se souvenir, c’est un témoignage du passé qui ne s’encombre pas des prétentions de l’objectivité. Art Spiegelman, quand il laisse ses souris et ses chats s’étaler sur ses pages, prend dès la première vignette le parti de la spontanéité franche, honnête. Les mots viennent du cœur et les images de ses tripes. Art Spiegelman ne nous fait pas de leçons sur l’Histoire. Il ne condamne pas. Il n’est pas là pour ça et jamais, au détour de ses pages, il ne porte un jugement sur le passé. Ce qui est fait est fait. Ce qu’il y a de brillant dans son travail, c’est que non plus encombré des préoccupations de tous ceux qui traitent de la Shoah, il nous livre un témoignage bouleversant de sincérité et surtout, doublé de son propre regard. Parce que la déportation que nos pères ont subi ne sauraient nous laisser intacts. C’est ce regard, cette approche, qui fait tout le génie de son œuvre. Cette originalité ingénieuse et sublime, qui renvoie tous les faits à une réalité bien plus proche de nous. En désacralisant la Shoah, en la replaçant à l’échelle humaine, Art Spiegelman produit le plus beau manuel d’Histoire qui soit, celui dont on ne se lassera jamais de se rappeler l’horreur. La 2nde Guerre Mondiale reprend tout un sens, toute une réalité, que le devoir de mémoire exacerbé avait tant effacée, la rendant floue et lointaine, la résumant à une leçon de morale, à des dates, à des chiffres de victimes. Art Spiegelman n’est pas dans le spectaculaire ostentatoire et provocateur. Il ne montre pas d’images d’horreurs. Son noir et blanc souligne encore ses intentions de livrer tous les sentiments, les siens et ceux de son père, sans filtre et sans artifice. Ce noir et blanc est tout autant symbolique de cette volonté de ne jamais tomber dans l’exagération. Le trait est vif, fort, vigoureux, quasi impulsif. Mais ce noir jeté sur le blanc n’agresse jamais l’œil, si ce n’est dans un appel de détresse de l’auteur. Chaque vignette porte en elle le souci du détail, de la lourdeur du tant à dire. Le noir et blanc est efficace, dur, maîtrisé. Il nous rappelle le caractère sombre de l’histoire relatée, sans nous ensevelir sous une tristesse de synthèse ou une pitié de circonstance, rien que sous des sentiments vrais. Jamais d’effusion de sang, le sang est noir, il a déjà séché. Et sans doute peut-on de fait penser que les mémoires, du père et du fils, s’en trouvent apaisées. Soakette.
Il est des auteurs qui font l’unanimité, Art Spiegelman est de ceux-là. D’aucun de prétendre que cela est dû au sujet qu’il a choisi d’aborder. Maus, ce n’est pas une BD d’apitoiement, ce n’est pas un ouvrage réquisitoire, ce n’est pas un livre fait pour se souvenir, c’est un témoignage du passé qui ne s’encombre pas des prétentions de l’objectivité. Art Spiegelman, quand il laisse ses souris et ses chats s’étaler sur ses pages, prend dès la première vignette le parti de la spontanéité franche, honnête. Les mots viennent du cœur et les images de ses tripes. Art Spiegelman ne nous fait pas de leçons sur l’Histoire. Il ne condamne pas. Il n’est pas là pour ça et jamais, au détour de ses pages, il ne porte un jugement sur le passé. Ce qui est fait est fait. Ce qu’il y a de brillant dans son travail, c’est que non plus encombré des préoccupations de tous ceux qui traitent de la Shoah, il nous livre un témoignage bouleversant de sincérité et surtout, doublé de son propre regard. Parce que la déportation que nos pères ont subi ne sauraient nous laisser intacts. C’est ce regard, cette approche, qui fait tout le génie de son œuvre. Cette originalité ingénieuse et sublime, qui renvoie tous les faits à une réalité bien plus proche de nous. En désacralisant la Shoah, en la replaçant à l’échelle humaine, Art Spiegelman produit le plus beau manuel d’Histoire qui soit, celui dont on ne se lassera jamais de se rappeler l’horreur. La 2nde Guerre Mondiale reprend tout un sens, toute une réalité, que le devoir de mémoire exacerbé avait tant effacée, la rendant floue et lointaine, la résumant à une leçon de morale, à des dates, à des chiffres de victimes. Art Spiegelman n’est pas dans le spectaculaire ostentatoire et provocateur. Il ne montre pas d’images d’horreurs. Son noir et blanc souligne encore ses intentions de livrer tous les sentiments, les siens et ceux de son père, sans filtre et sans artifice. Ce noir et blanc est tout autant symbolique de cette volonté de ne jamais tomber dans l’exagération. Le trait est vif, fort, vigoureux, quasi impulsif. Mais ce noir jeté sur le blanc n’agresse jamais l’œil, si ce n’est dans un appel de détresse de l’auteur. Chaque vignette porte en elle le souci du détail, de la lourdeur du tant à dire. Le noir et blanc est efficace, dur, maîtrisé. Il nous rappelle le caractère sombre de l’histoire relatée, sans nous ensevelir sous une tristesse de synthèse ou une pitié de circonstance, rien que sous des sentiments vrais. Jamais d’effusion de sang, le sang est noir, il a déjà séché. Et sans doute peut-on de fait penser que les mémoires, du père et du fils, s’en trouvent apaisées. Soakette.