Ce samedi à Trois-Rivières, le premier ministre Philippe Couillard a ouvert le Conseil général 2014 du Parti libéral du Québec.
Centré sur l’économie, l’événement a tout de même abordé en grande partie le cas du numérique. Ce plan vise notamment à offrir un accès Internet haute vitesse «de qualité et abordable», généraliser les logiciels libres au sein des ministères et développer les données ouvertes (open data).
Son slogan? «Innover pour mieux gouverner». Or l’époque veut qu’à ce jour, l’innovation rime souvent avec numérique. Un terme aujourd’hui très large qui intègre Internet et les nouvelles technologies. Avant-hier, Hélène David, ministre de la Culture et des Communications, a ainsi présenté durant près de trente minutes le plan culturel numérique du Québec qui sera mis en place par le gouvernement.
Le Plan culturel numérique du Québec
Le premier point mis de l’avant par le PLQ est «que toutes les régions du Québec puissent être desservies par un service d’Internet haute vitesse de qualité et abordable».
Ce plan «vise à soutenir le développement de la culture numérique de nos talents d’ici». Pour cela, le gouvernement s’engage à consulter régulièrement la population «dans le cadre de l’élaboration d’une stratégie de gouvernance numérique ouverte et intelligente».
Le premier ministre, désormais responsable de cette stratégie, devra d’ailleurs présenter un bilan à l’Assemblée nationale périodiquement. Un poste de commissaire à la gouvernance numérique ouverte et intelligente sera aussi créé afin d’assurer une évaluation externe et transparente des dépenses effectuées en matière de gouvernance numérique et de l’atteinte des résultats. Il relèvera du bureau du Vérificateur général du Québec.
Concrètement, en quoi consiste donc ce plan? Le premier point mis de l’avant par le PLQ est «que toutes les régions du Québec puissent être desservies par un service d’Internet haute vitesse de qualité et abordable».
Un accès à Internet amélioré
Si les ménages Québécois sont en grande majorité connectés à Internet, nous savons aussi que certaines régions sont moins connectées que d’autres. La Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine, le Bas-Saint-Laurent, le Saguenay–Lac-Saint-Jean et l’Estrie sont ainsi largement sous la moyenne provinciale. Le tarif de l’offre est l’une des raisons de ces plus faibles taux. Qui plus est, le très haut débit à plus de 100 Mbits/s est encore peu développé parmi les particuliers, y compris dans les grandes villes.
D’après le tout dernier rapport 2014 de surveillance du CRTC sur les communications, 99% des ménages québécois ont tout de même accès à un débit entre 1 et 4,9 Mbits/s, soit un taux équivalent aux autres provinces du Canada. Pour les débits supérieurs, le Québec enregistre un léger retard sur l’Ontario, la Colombie-Britannique et l’Alberta; néanmoins, les écarts restent mesurés. Ces données regroupent toutefois tous les réseaux Internet, qu’ils soient filaires et mobiles.
Rappelons tout de même que dès 2008, un pays comme la Finlande a décidé d’offrir un débit de 100 Mbits/s pour toute sa population grâce à la fibre optique, ceci d’ici 2015-2016. En 2010, avoir Internet est même devenu un droit dans le pays scandinave, 1 Mbits/ devenant alors un droit, tel un minimum «vital».
Mais bien d’autres points sont aussi mis en avant dans ce plan :
- Intégrer des critères d’interopérabilité dans tous les appels d’offres du gouvernement touchant les ressources informatiques et informationnelles.
- Adopter une pondération favorisant le logiciel libre et le logiciel élaboré au Québec lorsqu’ils sont disponibles.
- Adopter le logiciel libre pour la bureautique comme logiciel d’usage par défaut. Les ministères et les organismes souhaitant utiliser un logiciel de bureautique propriétaire devront justifier cette dépense.
- Inciter les organismes publics à ordonner leurs informations en bases de données facilement manipulables.
- Rendre accessible en ligne de nombreuses données publiques (comme les administrations, les systèmes d’éducation et de santé, les services sociaux, Hydro-Québec et la SAQ).
- Proposer du Wi-Fi gratuit dans tous les édifices gouvernementaux.
- Favoriser le télé-travail chez les fonctionnaires.
- Créer «à long terme» un identifiant citoyen unique afin de permettre d’administrer l’ensemble de nos relations avec l’État et ses organismes (comme la SAAQ, la RAMQ et Revenu Québec).
- Mettre à jour les législations afin de légaliser les opérations des sites de consommation collaborative (comme AirBnB, Uber ou AmigoExpress) «tant qu’il ne s’agit pas d’une activité commerciale».
- Étudier la possibilité de demander aux intermédiaires de paiement (comme PayPal et les entreprises de crédit) de percevoir les taxes si le commerçant en ligne n’est pas enregistré auprès de Revenu Québec et qu’il ne retient pas la TVQ.
Le logiciel libre
Ici, le gouvernement fait un pas vers le logiciel libre dans le secteur de la bureautique. Et ailleurs? Le pas en avant est plus flou, le PLQ se contentant de parler d’une «pondération favorisant le logiciel libre».
L’importance donnée au logiciel libre par le PLQ n’est pas nouvelle, mais doit être analysée avec soin. Depuis plusieurs années maintenant, le gouvernement a souvent été pointé du doigt pour exclure systématiquement les logiciels libres de ses contrats, au bonheur de Microsoft, Oracle, Symantec et Adobe. Ici, le gouvernement fait un pas vers le logiciel libre dans le secteur de la bureautique. Et ailleurs? Le pas en avant est plus flou, le PLQ se contentant de parler d’une «pondération favorisant le logiciel libre».
Le meilleur exemple dans le monde en matière de transition vers les logiciels libres reste de loin la ville de Munich. L’agglomération allemande a ainsi décidé il y a une dizaine d’années de passer à Linux et OpenOffice et donc d’abandonner Windows et la suite Office. L’objectif était d’économiser 10 millions d’euros (plus de 14,4 millions de dollars), ceci en modifiant environ 15 000 ordinateurs de la ville. Une opération qui a pris de longues années et qui s’est terminée récemment.
L’apprentissage de la programmation en milieu scolaire
Centré sur l’innovation, le Conseil général du PLQ a aussi indiqué que le gouvernement comptait mettre en œuvre une politique nationale de l’innovation industrielle et des entreprises innovantes, ceci afin de «favoriser l’émergence d’un écosystème propice à l’innovation». Pour cela, de nombreuses mesures seront adoptées.
On retrouve par exemple l’acquisition de compétences de base en programmation dans le cursus scolaire secondaire, ou encore la mise en place d’un incitatif fiscal afin de soutenir la robotisation, la modernisation de la machinerie et l’implantation de progiciels de gestion intégrée.
Ces idées rappellent celles d’Axelle Lemaire, secrétaire d’État chargée du Numérique en France, qui a ainsi déclaré il y a quelques mois que les enfants devaient apprendre à coder. «Apprendre la programmation, permet de dépasser la simple sensibilisation au numérique et de se rendre compte qu’on peut modifier les smartphones qu’on utilise, qu’on peut réaliser des films, qu’on peut créer des jeux» expliquait-elle lors d’une discussion en ligne organisée par le quotidien 20 Minutes. Quant à la robotique, un plan spécifique a été présenté dès l’année 2013 par le gouvernement français.
Un encadrement des plateformes de sociofinancement
L’Autorité des marchés financiers pourrait aussi réviser ses règles dans le but de développer le financement participatif (ou crowdfunding), «tout en gardant en tête sa mission de protection des investisseurs». Le PLQ imagine même que l’AMF puisse «développer son propre portail pour faciliter le financement participatif en toute légalité». Ce type de financement, dont Kickstarter et Indiegogo sont les plateformes les plus connues pour les projets grand public, permet aujourd’hui à des sociétés naissantes de développer leurs produits ou même d’accroître leur capital.
Un encadrement par l’AMF est toutefois indispensable pour développer ce marché au Québec, sachant qu’à ce jour «le financement participatif en capital est prohibé au Canada, à moins qu’il soit effectué en conformité avec la réglementation en valeurs mobilières, ce qui comprend notamment l’obligation d’établir un prospectus ou de se prévaloir d’une dispense de prospectus. De plus, l’exploitation de portails de financement participatif en capital entraînerait l’obligation d’inscription à titre de courtier en valeurs» selon le site de l’AMF. De nombreux pays ont déjà légiféré en ce sens, il serait dommage que le Canada prenne du retard en la matière.
Soutenir les incubateurs d’entreprises innovantes est aussi cité parmi les résolutions du PLQ, sachant que ce secteur prend une place toujours plus importante, notamment à Montréal.
Pour les sociétés en démarrage (startups), le gouvernement entend aussi leur offrir davantage de support à travers des structures comme Investissement Québec et les Centres locaux de développement (CLD), «pour qu’elles puissent bénéficier du support de professionnels lors de certaines étapes clés de leur développement comme la mise en marché, l’analyse de productivité et la protection de la propriété intellectuelle». Soutenir les incubateurs d’entreprises innovantes est aussi cité parmi les résolutions du PLQ, sachant que ce secteur prend une place toujours plus importante, notamment à Montréal. Le Centre d’entreprises et d’innovation de Montréal (CEIM) permet ainsi à de très nombreuses entreprises québécoises de se développer.
Enfin, la population pourra profiter, à des dates encore inconnues, des services suivants :
- Un système de gestion des files d’attente et de la prise de rendez-vous par internet dans le système de santé.
- La mise en place de cybertribunaux.
- Le vote en ligne pour les élections scolaires, puis municipales et éventuellement provinciales.
- La mise en place d’un outil informatisant le rôle d’évaluation foncière de façon à ce qu’il soit continuellement mis à jour lors de l’émission de permis de construire ou lors de la vente d’un immeuble.
- La mise en place d’un réseau électrique intelligent afin d’optimiser la consommation d’énergie.